Ainsi, la procuration permet d’assurer qu’une tierce personne s’occupe des affaires courantes du client alors qu’il n’est plus en mesure de le faire ou qu’il en est temporairement incapable.
Plusieurs responsabilités peuvent ainsi être confiées à ce tiers : le paiement du loyer et des factures courantes, la vente de certains biens, les dépôts et les retraits, le renouvellement des polices d’assurance, la gestion des placements, le paiement du prêt hypothécaire, des cartes de crédit et du prêt automobile, etc.
La personne qui donne la procuration s’appelle le mandant et celle qui l’accepte, le mandataire, d’après le ministère de la Justice du Québec.
Facile à rédiger
En principe, la procuration est facile à rédiger. Plusieurs modèles sont disponibles sur Internet, entre autres, sur le site du ministère de la Justice.
«Le mandant pourrait même écrire ses volontés sur une serviette de table», remarque Maxime Gauthier, avocat et chef de la conformité chez Mérici Services Financiers.
Cependant, les institutions financières refuseront une procuration qui n’a pas un caractère assez officiel. Elles demanderont plutôt au client de remplir leur procuration maison.
En fait, «elles accepteront toute procuration conforme aux règles en cours qui donne au mandataire la capacité légale d’effectuer les opérations financières au nom du client», précise Yasmine Abdelfadel, porte-parole de l’Association des banquiers canadiens (ABC).
Cela implique que le document doit permettre d’identifier le mandataire, et qu’il précise la volonté du mandant, les tâches à accomplir et la période pendant laquelle le mandat est en vigueur.
Idéalement, pour s’assurer de rédiger une procuration générale valide, le client devrait solliciter l’avis d’un expert juridique (notaire, avocat).
«Certaines institutions l’exigent, même lorsque la procuration n’a pas été remplie à l’interne, dit Johanne Pilote, notaire et agent de 1-800-notaire à la Chambre des notaires du Québec. En effet, elles s’assurent ainsi qu’elle est valablement donnée, c’est-à-dire que le mandant est lucide et qu’il comprend l’impact de ce document.»
La procuration notariée facilite aussi l’identification du mandataire… ce qui permet de certifier que ce dernier n’est pas un imposteur ou un fraudeur.
L’expert juridique évitera aussi d’employer des clauses sujettes à interprétation.
«Par exemple, il précisera les tâches à accomplir par le mandataire, plutôt que d’écrire qu’il doit « s’occuper de ses affaires », remarque Maxime Gauthier. Cette expression soulève beaucoup de questions.»
Le client voulait-il dire «ses affaires en matière de placement» ou parlait-il de ses biens personnels ?
Document souple
La procuration a l’avantage de donner beaucoup de latitude au client. Il peut en outre la révoquer en tout temps, sans aucune justification.
Malgré l’existence de ce document, le mandant garde lui aussi le pouvoir de gérer son argent, d’administrer ses biens ou de les vendre. «Même si ces droits ont été accordés à un autre, il peut toujours remplir la tâche», dit Johanne Pilote.
La procuration peut également être facilement adaptée aux besoins de celui qui la rédige. Il est en effet possible de préciser les pouvoirs qui sont délégués, de prévoir des mécanismes de contrôle, de limiter la durée, etc.
Ces précisions permettent d’éviter les dérapages, et disons-le, les fraudes, car les gestes du mandataire peuvent être restreints et surveillés.
Un mandataire loyal
Qui peut être nommé mandataire ? «Le client doit prendre soin de choisir une personne d’une loyauté infaillible», répond Johanne Pilote. En effet, une fois que ce pouvoir lui sera dévolu, elle n’aura pas à demander au mandant son approbation avant de prendre une décision.
La personne choisie ne doit en aucun cas se retrouver en situation de conflit d’intérêts. Un conseiller ne peut pas être le mandataire d’un client.
Dans son choix, le mandant devrait aussi considérer les avis de ses proches afin d’éviter les conflits.
«On constate par exemple que les gens ont souvent le réflexe de choisir un parent, remarque Johanne Pilote. Or, même si ce parent est parfaitement honnête, les autres membres de la famille, qui ont été privés de responsabilités, ont souvent des suspicions à son endroit.»
Par conséquent, «il est souvent préférable de nommer deux mandataires qui agiront conjointement, indique le Guide pour la prévention des abus financiers envers les aînés de l’Association coopérative d’économie familiale Rive-Sud de Québec (ACEF). Il faut aussi prévoir des remplaçants au cas où ces derniers ne seraient plus capables d’assumer leurs responsabilités (perte d’autonomie, décès).»
Pour être désignée mandataire, la personne choisie par le client doit être informée de l’étendue des responsabilités qu’il veut lui transférer et accepter de jouer ce rôle dans les conditions spécifiées.
«Dans sa tâche, le mandataire peut cependant se faire aider, voire même engager des gens, note Johanne Pilote. Par exemple, s’il a le mandat de produire une déclaration de revenus, il peut demander à quelqu’un d’autre de le faire.»
Recours contre le mandataire
Le mandant ne doit pas donner de procuration à la légère, car il reste responsable de ses affaires et devra répondre des erreurs de son représentant. Ainsi, si un client délègue les instructions pour son compte de placement, il ne pourra pas poursuivre le mandataire si celui-ci accumule les pertes…
Le client qui accorde une procuration n’a de recours contre son mandataire que si ce dernier outrepasse son mandat. Par exemple, il lui a seulement demandé de payer les dépenses courantes de la maison, mais il découvre qu’il paie autre chose à partir de son compte.
Ce droit de poursuivre n’est toutefois pas une sinécure. «Pour lancer un recours, il faut amasser des preuves, aller devant les tribunaux, attendre le verdict», note Johanne Pilote.
«C’est pourquoi il est plus prudent de donner un mandat partiel et de mettre en place des mécanismes de surveillance, dit Maxime Gauthier. Qui voudrait remettre la totalité de ses finances à une tierce personne ? Plus le client contrôle, plus il est en sécurité.»
Ainsi, il peut être important de prévoir un montant maximum d’emprunt au nom du client et de demander aux mandataires de faire des rapports périodiques des actes réalisés, accompagnés des pièces justificatives.
Par ailleurs, le conseiller et l’institution financière ont également une responsabilité en regard de la procuration.
«Ils doivent vérifier l’identité du mandataire (pièce d’identité ou autre), la validité et la durée du document, l’étendue du mandat, etc.», dit Maxime Gauthier. Autrement dit, ils ne doivent aller de l’avant que si tout est en règle…
La procuration peut, par exemple, avoir été signée pour une période donnée et être arrivée à terme. Ou encore, si le client n’a plus sa capacité de discernement et qu’il est inapte, la procuration n’est pas valide.