Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) risquent de pousser deux types de conseillers à abandonner leurs petits comptes, si leurs propositions d’abolir les frais d’acquisition reportés et leurs réformes ciblées, rendues publiques en juin, sont adoptées telles quelles.
C’est ce qu’estime Gino-Sébastian Savard, président de MICA Cabinet de services financiers. Parmi le premier groupe figurent des conseillers expérimentés, qui ont déjà un bloc d’affaires important, et qui risquent d’être découragés par l’ensemble des nouvelles réformes ciblées proposées par les ACVM.
Parmi ces réformes, les ACVM proposent entre autres d’imposer aux représentants et aux firmes de courtage de réexaminer et mettre à jour l’information relative au client recueillie tous les 36 mois minimums, parfois plus souvent, comme tous les 12 mois pour les gestionnaires de portefeuilles ayant des comptes discrétionnaires.
Pour en connaître les détails, merci de lire le dossier sur le point sur les commissions intégrées et les réformes ciblées.
« Les conseillers qui ont des gros books avaient déjà leur rémunération et faisaient un peu de pro bono pour des petits comptes. Si on ajoute de la conformité pour l’ouverture de compte, ces conseillers ne vont plus prendre de petits comptes », indique Gino-Sébastian Savard.
Gino-Sébastian Savard se demande si les ACVM ont bien évalué l’impact cumulatif de conformité additionnelle à l’ouverture de chaque dossier et de l’impossibilité de travailler avec des frais d’acquisition reportés (FAR) ou des frais d’acquisition réduit (low load).
« Est-ce qu’il y a quelqu’un qui a fait l’adéquation entre le service donné au client et la rémunération que le conseiller touche? Les ACVM sont en train de faire un cadre règlementaire où le client n’aura pas accès au service. Ça n’a pas de bon sens! », mentionne-t-il. Il souligne que plusieurs conseillers sont des entrepreneurs à but lucratif et donc doivent prendre des décisions d’affaires lorsque vient le temps de servir des clients offrant une faible marge bénéficiaire à court terme.
Le deuxième groupe de conseillers qui risquent de réduire leur nombre de petits comptes sont malheureusement ceux qui sont souvent les plus enclins à les servir : les représentants de la relève, selon Gino-Sébastian Savard.
D’après lui, pour certains clients, le fait qu’un conseiller puisse toucher une sorte d’avance de commission grâce aux FAR ou aux frais d’acquisition réduits permet aux conseillers de la relève de donner du service aux clients ayant peu d’actif à investir.
« Si un conseiller a un client qui veut ouvrir un compte et y investir 5000 $, il va trouver ça plate de se faire facturer 250 ou 500 $ de frais. Avec les FAR, c’était la famille de fonds qui assumait ces frais », indique Gino-Sébastian Savard. Le client risque alors de ne pas investir son argent avec le conseiller et, ainsi, de se priver de conseil financier.
Le dirigeant de MICA aurait préféré que les régulateurs encadrent mieux l’utilisation des FAR. Rappelons que certains proposaient par exemple que ce soit le conseiller, et non le client, qui doive rembourser les FAR si ce client devait sortir l’argent du fonds avant la fin du barème de frais de rachat.
« [Toutes ces propositions réglementaires] sont des bâtons dans les roues pour notre modèle d’affaires et pour les jeunes conseillers qui développent des petits comptes », déplore Gino-Sébastian Savard.