En effet, les experts sont unanimes. Le marché du travail connaît des changements en profondeur et bon nombre de Canadiens devront reprendre des études à l’âge adulte. D’où l’intérêt d’examiner de plus près le REEE pour adultes.

Jean-François Guay, planificateur financier pour BMO Investissements, à Sherbrooke, est inconditionnel quant à la pertinence d’investir dans un REEE si on est parent. «Les subventions provinciales et fédérales peuvent atteindre jusqu’à 30 % des cotisations la première année dans le cas d’un enfant», affirme-t-il.

Il tient néanmoins à apporter un bémol si le bénéficiaire est un adulte. «Il n’y a pas de subventions pour un bénéficiaire adulte. Il existe d’autres moyens plus simples, par exemple le compte enregistré libre d’impôt (CELI). Dans un CELI, on peut retirer des sommes n’importe quand sans être imposé. De plus, on peut les réinvestir dans le CELI par la suite si on le juge à propos», ajoute Jean-François Guay.

Serge Lessard, avocat et planificateur financier, acquiesce. «Dans la majorité des cas, le CELI demeure l’outil de choix pour un adulte qui veut retourner aux études. Le REEE est une option intéressante s’il n’y a plus d’espace pour cotiser au REER ou au CELI», explique celui qui est aussi conseiller principal, service de fiscalité et retraite, chez Investissements Manuvie.

Étude de cas

Serge Lessard cite le cas de Madame Dubois, 45 ans tout comme son conjoint, qui a un revenu brut de 100 000 $. Elle rêve de retourner à l’université pour décrocher un certificat en planification financière. Elle envisage donc de prendre une année sabbatique pour faire son certificat dans le confort de son foyer (les cours par correspondance ou en ligne sont admissibles).

Madame Dubois pourra ouvrir un REEE individuel dont elle sera à la fois bénéficiaire et souscriptrice. Elle cotisera 5 000 $ par année pendant 10 ans (contributions maximales à vie de 50 000 $). «Si on anticipe un rendement annuel de 5,71 %, son REEE sera de 65 000 $ après 10 ans», dit Serge Lessard.

Retour aux études

La première option qui s’offre à Madame Dubois est de retourner au cégep ou à l’Université. «Comme son REEE a au moins 10 ans, elle pourra retirer 5 000 $ (2 500 $ pour des études à temps partiel) comme paiement d’aide aux études (PAE) si elle s’inscrit à un cours d’au moins 13 semaines», remarque Serge Lessard.

Le PAE est le versement au bénéficiaire des revenus de placement accumulés dans le REEE, et des subventions, le cas échéant, lit-on dans un document produit par Manuvie. Il constitue un revenu imposable pour le bénéficiaire, donc pour Madame Dubois, dans l’année du versement.

Après cette période de 13 semaines, le contribuable pourra retirer le solde total du PAE restant au REEE sans autre restriction.

De plus, le contribuable pourra profiter de différentes mesures fiscales pour étudiants, dont les crédits d’impôt pour études (400 $ par mois pour des études à temps plein ou 120 $ pour des études à temps partiel), le crédit d’impôt pour manuels scolaires (65 $ par mois pour un étudiant à temps plein ou 20 $ par mois pour un étudiant à temps partiel) ainsi que la déduction pour frais de scolarité, selon ce document.

Transfert à son REER

Qu’arrive-t-il si Madame Dubois ne retourne pas aux études ? «En principe, les paiements de revenu accumulé (PRA), si on ne s’inscrit pas à un établissement reconnu ou si le régime est établi depuis moins de 10 ans, sont imposables et sont assujettis à un impôt additionnel de 20 % (12 % au fédéral et 8 % au provincial)», prévient Serge Lessard. Noter que cet impôt ne s’applique qu’au revenu de placement obtenu, et non au remboursement des cotisations au REEE et des subventions, le cas échéant.

Toutefois, le contribuable peut éviter cette situation malencontreuse. «Si Madame Dubois a des droits de cotisation inutilisés, elle pourra transférer jusqu’à 50 000 $ à un REER», rassure Serge Lessard.

Transfert au REER du conjoint

Si Madame Dubois ne dispose pas de droits de cotisation à son REER, elle pourra alors verser ses PRA au REER de son conjoint si elle a pris soin d’établir un REEE conjoint ou d’ajouter son conjoint à titre de souscripteur. Cette possibilité de fractionner un revenu avec un conjoint est d’autant plus intéressante si celui-ci a un revenu dans une tranche d’imposition inférieur.

Pas de retour aux études

Si ni Madame Dubois ni son conjoint ne disposent de droits de cotisation au REER inutilisés, celle-ci pourra trouver un programme d’études postsecondaires prévoyant des coûts minimes inférieurs à la pénalité de 20 % (un programme collégial par exemple) d’une durée de plus de 13 semaines, et ce, même si elle n’a pas vraiment l’intention de suivre les cours puisque la présence aux cours et la réussite des examens ne sont pas requises.

Ainsi, Madame Dubois pourra retirer la somme initiale de 5 000 $ dans les 13 premières semaines du cours. Une fois les 13 semaines écoulées, Madame Dubois pourra retirer le solde en entier (dans ce cas, 60 000 $).

Serge Lessard fait également remarquer que la durée de vie maximale d’un REEE est de 36 ans. «Dans le cas de Madame Dubois, cela lui donnera donc jusqu’à 81 ans, soit 10 ans de plus que pour un REER, d’où une période plus longue de report de l’impôt», observe-t-il. Madame Dubois, elle, aura donc jusqu’à 81 ans pour parfaire ses connaissances en… planification financière. Il n’est jamais trop tard pour bien faire !