Le Régime de rentes du Québec (RRQ) a beaucoup évolué lors de la dernière décennie, notamment pour assurer la pérennité du régime et la sécurité financière des Québécois. En février 2023, le gouvernement du Québec a mené une consultation publique afin d’examiner des pistes de réflexion qui permettront d’accroître la sécurité financière à court et à moyen terme.
Dans le cadre du budget déposé le 21 mars, le gouvernement propose plusieurs changements qui auront des répercussions sur la planification de la retraite, notamment pour les contribuables qui comptent travailler une fois à la retraite et reporter le début du versement de leur rente de retraite. Quelques précisions des mesures seront faites dans les mois à venir puisque la mise en œuvre de certaines mesures nécessite des modifications législatives et réglementaires.
La période cotisable à revoir
Le budget 2023-2024 présenté par le ministre des Finances Eric Girard prévoit des modifications législatives dans le but de protéger les revenus de rente du RRQ des travailleurs de 65 ans ou plus qui gagneront un revenu inférieur à leur moyenne de gains en carrière.
En d’autres mots, un contribuable de 65 ans qui continuerait de travailler verrait sa rente de retraite être moins influencée négativement s’il la diffère à 70 ans par exemple.
Pour mieux comprendre l’intention de cette modification, il faut connaître le fonctionnement du calcul de la rente de retraite au RRQ. Sommairement, le calcul de la rente de retraite au RRQ varie en fonction de la moyenne des gains de travail. Il faut retrancher 15 % des mois de la période cotisable affichant les apports les plus faibles. La période de cotisation qui sert à calculer la rente de retraite se termine au plus tôt le mois précédant le début du versement d’une rente de retraite, le mois du 70e anniversaire de naissance et le mois de décès.
Actuellement, un contribuable qui travaille après l’âge de 65 ans pourrait voir sa rente être réduite s’il diffère à 70 ans le début de son versement parce qu’il inclue des années supplémentaires dans le calcul du 15 %. Il restera ainsi moins de mois à faible contribution qui pourront être retranchés du calcul. À l’opposé, si une rente est demandée à l’âge de 60 ans, plus d’années à faible revenu seront considérées dans le calcul de la rente de base.
Selon la proposition budgétaire, certaines personnes pourraient reporter leur demande de rente du RRQ au-delà de 65 ans tout en continuant à travailler, sans s’inquiéter d’un potentiel effet négatif sur le calcul de leur rente de retraite. Le gouvernement prévoit modifier la méthode de calcul de la rente du régime de base du RRQ, dès le 1er janvier 2024, pour assurer que les années de faibles gains de travail à partir de 65 ans ne peuvent réduire la moyenne de gains utilisée pour le calcul de la rente de retraite.
Il y aura ainsi un faible impact/coût sur le régime. Les modifications législatives suivront. Cette mesure permettra de protéger la rente de plus de 12 000 travailleurs de 65 ans ou plus.
Augmentation de l’âge maximal du report à 72 ans
Les conseillers en services financiers connaissent le principe du report des prestations gouvernementales au maximum pour augmenter le taux de remplacement de revenu à la retraite et pour gérer le risque de longévité.
Afin d’aider les travailleurs à améliorer leur sécurité financière, le gouvernement annonce l’augmentation de l’âge maximal d’admissibilité à une rente de retraite de 70 à 72 ans dès le 1er janvier 2024. Cette hausse aura comme effet d’augmenter la sécurité financière des retraités. Avec un facteur d’ajustement de 0,7 % par mois pour ceux qui demandent leur rente de retraite après 65 ans, la bonification totale pourrait être de 58,8 % à 72 ans si on a pleinement cotisé au régime.
Une personne demandant sa rente à 72 ans connaîtra dans ce scénario une hausse à vie de sa rente d’un montant maximal de 2 634 $ par année.
Heureusement, l’impact de la hausse de l’âge maximal n’a pas d’impact/coût pour le régime. Les modifications législatives suivront, mais avec le faible nombre de personnes qui demandent actuellement leur prestation à 70 ans, il sera encore plus important pour le conseiller en services financiers de démontrer aux clients les avantages associés au report de la rente de retraite du RRQ, particulièrement à ceux dont les épargnes sont insuffisantes.
Cotisation facultative au RRQ après 65 ans
Actuellement, les cotisations salariales versées au RRQ après le début du versement de la rente de retraite donne droit au supplément à la rente de retraite de 0,66 % des gains cotisés l’année précédente.
Le budget 2023-2024 introduit un nouveau choix qui permet à un travailleur âgé de 65 ans ou plus de cesser de verser des cotisations au RRQ, en autant qu’il reçoive la rente de retraite du RRQ ou du RPC. Cette cessation de cotisation sera applicable à la fois pour le salarié et pour l’employeur. De plus, ce choix demeure en vigueur jusqu’à la prise de décision ou jusqu’à ce que le travailleur ait plus de 72 ans, alors qu’une nouvelle obligation de cesser de cotiser pour les travailleurs s’amorce à compter de ce moment.
Les cotisations facultatives auront un coût important pour le régime, mais on ne craint pas pour sa solvabilité puisque le régime détient une marge de manœuvre financière suffisante, et la conservera par la suite.
Reconnaître les situations particulières
Les mesures en place dans le cadre du régime de base du RRQ permettent de retirer du calcul du montant de la rente certaines périodes d’invalidité et celles nécessaires pour s’occuper d’un enfant à charge. D’ailleurs, cette mesure n’a pas été introduite lors de l’adoption du régime supplémentaire.
Avec le budget 2023-2024, le gouvernement annonce que des travaux seront amorcés afin de reconnaître des périodes d’aide offertes par des personnes proches aidantes, ainsi que des lacunes observées dans le régime supplémentaire.
La reconnaissance au moyen de crédits de gains pour les périodes d’invalidité, pour la prise en charge d’un enfant et pour les périodes d’aide offertes par des personnes proches aidantes sera ainsi examinée.
David Truong est Expert conseil, Centre d’Expertise, Banque Nationale Gestion privée 1859.