Cette nouvelle version, appelée fonds de parts négociées sur le marché, résout plusieurs des problèmes traditionnels des fonds à capital fixe. Tout d’abord, les frais liés à l’émission sont limités à 50 points de base ou 0,50 %.
Par conséquent, lorsqu’il est porté au compte du client, le titre aura une valeur de (ou extrêmement proche de) 10 $, soit le prix d’émission. Avec un fonds à capital fixe traditionnel, un investisseur intéressé à acheter une stratégie spécifique n’a pas avantage à acheter un fonds à l’émission, puisqu’il pourra l’acheter au rabais par rapport au prix d’émission une fois qu’il sera lancé sur le marché.
Habile mélange entre FCP et FNB
C’est ce qui a régulièrement fait en sorte que des émissions n’ont pas vu le jour au cours des dernières années, puisque la taille nécessaire pour l’émission d’un fonds a souvent été trop faible pour voir le jour.
Par ailleurs, deux séries du même produit seront lancées simultanément :
Une série T (pour «transigeable», à ne pas confondre avec les fonds de série T), directement cotée sur le marché, sans commission de départ et à frais de gestion faibles ;
Une série A (pour «advisor»), émise comme un billet et échangeable en série T, assortie d’une commission à l’achat et de frais de gestion plus élevés.
Ainsi, le produit peut convenir aux conseillers qui sont rémunérés par des commissions sur transactions ou de suivi ainsi qu’aux conseillers rémunérés sur honoraires.
La série A, à la manière d’un billet structuré ou d’un fonds à capital variable assorti de frais de sortie, verse une commission «financée» par la société promotrice. Une fois la période initiale avec frais de négociation anticipée passée, les parts sont automatiquement échangées en parts de série T, avec une réduction de frais subséquente.
Par exemple, si un fonds de série A paie une commission de 2,5 %, les unités auront des frais de gestion de 2 % (par rapport à 1 % pour la série T) et seront échangées, sans frais de conversion, après deux ans et demi.
A contrario, les fonds à capital fixe traditionnels sont lancés par l’intermédiaire d’appels publics à l’épargne, paient une commission aux courtiers et aux représentants inscrits qui les distribuent, puis se négocient directement en Bourse entre acheteurs et vendeurs. Cette structure sonne certainement comme un modèle d’affaires vieillot et peu adapté aux comptes sur honoraires d’aujourd’hui.
Par ailleurs, pour assurer un faible écart de suivi entre la juste valeur marchande (JVM) du fonds et le prix au marché, le fonds rachètera des parts négociées afin de soutenir les prix à un escompte maximal de 1,5 % de la JVM.
Également, à partir de la deuxième année, l’émetteur procédera à un rachat annuel à la JVM. Cela règle le sempiternel problème de liquidité des fonds à capital fixe, pour lesquels il y a plus souvent qu’autrement peu de vendeurs et d’acheteurs compte tenu de la taille des fonds, pour la plupart assez petits.
Comme le prix au marché varie en fonction de l’offre et de la demande, il arrive souvent qu’un fonds se trouve à escompte, parfois très élevé, par rapport à la JVM des placements sous-jacents. Cela permet certes d’acquérir des unités à prix d’aubaine dans des périodes de volatilité, mais lorsque le prix demeure toujours au rabais, il faut suivre rigoureusement les moments d’acheter ou de vendre ces produits, sans quoi un investisseur peut vraiment perdre au change.
Finalement, si une stratégie connaît du succès, de nouvelles émissions de parts pourront avoir lieu à la JVM à la suite de l’appel à l’épargne initial. Si de nouvelles unités de série A sont émises, elles seront sujettes à une conversion en série T avec des délais analogues à ceux de l’émission de départ.
Plusieurs avantages restent
Le niveau de liquidités affiché par un fonds à capital ouvert varie beaucoup. Certains fonds conservent des montants disponibles pour des rachats. D’autres reçoivent d’importants investissements sans pouvoir déployer intelligemment les sommes reçues.
Dans le cas d’un fonds à capital fermé ou des fonds de parts négociées, le gestionnaire peut investir la totalité du fonds sans avoir à se soucier d’entrées de fonds ou de rachats. Il s’agit d’un avantage indéniable pour des gestionnaires spécialisés dans des titres moins liquides tels que les titres à petite capitalisation, les obligations à rendement élevé ou certaines actions de marchés émergents. Ainsi, en cas de liquidation des parts par les investisseurs, aucune vente de feu n’a besoin d’être réalisée par le gestionnaire.
La fonction «d’absorption» de la volatilité des parts ne demeurera pas et le fonds annulera les parts rachetées pour limiter les escomptes. Ainsi, le fonds devra liquider des titres et perdra une partie de l’avantage initial, soit de pouvoir déployer l’ensemble du capital. L’avantage de pouvoir acheter à escompte élevé dans des marchés à très forte volatilité n’existe plus compte tenu de la demande soutenue de ce fonds.
Les fonds à capital fixe ont souvent été populaires à cause de certains de leurs attributs qui les distinguent fondamentalement des fonds à capital variable. Les actions scindées (split shares) en sont un bel exemple. Contrairement aux fonds communs traditionnels, les fonds fermés peuvent émettre des actions privilégiées.
Ils peuvent ainsi diviser entre deux catégories d’actions un panier de titres sous-jacents, soit une version qui profite de la plus-value du capital et une autre version axée sur la génération de revenus. Les fonds de parts négociées pourront procéder à ce type de mise en place.
Dans des actions scindées comme dans des fonds à capital fixe ou fonds de parts négociées, on peut aussi utiliser un levier financier afin de générer des revenus plus élevés pour les investisseurs, ce que les fonds à capital variable ne peuvent pas faire.
Les investisseurs retraités en quête de revenu peuvent recevoir des distributions fiscalement avantageuses plus élevées qu’avec un panier de titres ou un fonds standard sans avoir à piger dans leur capital, ce qui en fait une solution à considérer pour ce type d’investisseur.
Seul bémol : le levier peut entraîner des risques plus élevés en cas de baisse des marchés, notamment à cause de la volatilité accrue et de la position en amont des créanciers dans la structure de capital du fonds, ce qui est à considérer avant d’acheter un tel titre.
De façon générale, les fonds de parts négociées sont appelés à permettre l’innovation dans le secteur des placements canadiens. De nombreux gestionnaires d’actif préféreront cette structure à celle des FNB, puisqu’ils ne devront pas constamment divulguer aux mainteneurs de marché les titres qu’ils détiennent pour permettre aux FNB de pister les titres sous-jacents et d’offrir les bons cours acheteur et vendeur.
En raison d’un seuil minimum d’émission aux environs de 20 M$, de nouveaux produits non traditionnels pourraient pénétrer le marché canadien avant de se propager à l’ensemble de l’industrie. Pensons notamment aux prêts à taux variables et aux stratégies de vente d’options d’achat couvertes, deux catégories de produits qui ont vu le jour par l’intermédiaire des fonds à capital fixe. Dans l’avenir, nous pourrions voir d’autres nouveautés de ce genre émerger en raison des fonds de parts négociées.