Après une longue attente, les autorités de réglementation ont autorisé, en janvier dernier, la vente de fonds d’investissement alternatifs destinés aux clients de détail.
Mackenzie a ouvert le bal. De grands noms tels que Fonds Dynamique, Placements IA Clarington, Placements CI et Investissements Russell sont entrés dans la ronde avec une rafale de produits visant à populariser des stratégies typiques aux investisseurs institutionnels et individus fortunés.
En principe, Monsieur et Madame Tout le Monde pourraient recourir à ces produits afin de mieux diversifier leurs portefeuilles et se protéger à l’égard de la volatilité et de baisses éventuelles des marchés.
Toutefois, ces produits n’ont pas enflammé l’imagination des consommateurs … ni celle de leurs conseillers. D’après Strategic Insight, les 27 fonds alternatifs disponibles au Canada avaient, fin janvier, amassé une somme totale de 290 M$ (ou 21 M$ par fonds en moyenne).
Le produit cherche son public
Ex-vice-président senior, solutions gérées chez Fonds Dynamique, Marc St-Pierre connaît bien le monde de l’investissement. Les ventes anémiques de fonds alternatifs ne le surprennent pas car selon lui, ces produits cherchent leur public.
« Les organismes de réglementation veulent de plus en plus que les conseillers comprennent bien ce qu’ils vendent. Or, les stratégies des fonds alternatifs sont très complexes. Les conseillers doivent les comprendre et ensuite les expliquer à leurs clients », dit-il.
Et qu’ils soient conseillers en valeurs mobilières ou conseillers en épargne collective, ces professionnels du conseil font face au même dilemme.
« Comment définir ces divers fonds alternatifs ? Que font-ils au juste ? Quelles fonctions exercent-ils dans les portefeuilles ? Par rapport à quoi tel ou tel fonds alternatif joue-t-il un rôle complémentaire ? Voilà les questions auxquelles on doit trouver réponse lorsqu’on construit un portefeuille. Cela ne va pas de soi ! », estime Marc St-Pierre.
Maintenant consultant, notamment en matière de gestion de caisses de retraite, Marc St-Pierre ajoute que ces produits sont issus de solutions bâties pour des clientèles institutionnelles.
« Les manufacturiers ont tendance à extrapoler d’un univers à l’autre. Par exemple, les gestionnaires de régimes de retraite savent et acceptent que l’horizon de placements privés s’étend sur sept ou dix ans. Les épargnants ne peuvent pas réagir de la même façon », dit-il.
Cela dit, ajoute Marc Saint-Pierre, certaines stratégies alternatives trouveront quand même leur public.
« Ce sera le cas de fonds alternatifs dont l’offre sera complémentaire aux produits existants et qui sera comprise comme telle par les conseillers et leurs clients. Mais il n’y aura pas de raz-de-marée », précise Marc Saint-Pierre.
La question des frais
Lors d’un panorama des fonds alternatifs publié en avril, James Gauthier analyste de fonds chez iA Valeurs mobilières a mis en évidence la structure particulière des frais de gestion de ce domaine. Parmi les 25 fonds alternatifs recensés, 17 affichent des frais de performance de 10 % à 20 % qui s’ajoutent aux frais de gestion qui s’établissent entre 0,40 % et 1,25 %.
La question des frais n’échappe pas à Dan Hallett, vice-président et directeur de HighView Financial Group.
« Les fonds alternatifs grand public sont affligés de frais élevés, ce qui influence négativement les rendements. Et bien souvent les meilleurs fonds ne sont pas disponibles aux clients de détail », observe-t-il.
Faisant référence aux obligations croissantes de connaissance de produit et de conformité, Dan Hallett conclut que « il n’est pas étonnant que les ventes de fonds alternatifs aient été léthargiques ».