Les changements climatiques ces dernières décennies créent des risques pour la vie, les écosystèmes, mais aussi les économies. Pour y faire face, les banques devront agir sur deux fronts : elles devront gérer leurs propres expositions financières, mais aussi contribuer au financement d’un programme écologique pour atténuer les impacts de ce réchauffement. Pour cela, elles devront adopter une excellente gestion des risques climatiques, note McKinsey.
Des impacts à prendre en compte
Les risques du changement climatique sont omniprésents. Le réchauffement pourrait nuire à l’habitat et à l’activité professionnelle en augmentant par exemple la probabilité de vagues de chaleur mortelles. Il sapera également les systèmes alimentaires, ce qui risque ainsi de causer une chute importante des rendements céréaliers, les biens matériels, les infrastructures et les habitats naturels, notamment en raison du nombre d’inondations qui est appelé à augmenter.
Ces impacts entraîneront des risques et des opportunités de transition dans l’économie, notamment des changements dans la demande, le développement de nouvelles ressources énergétiques, etc. Les secteurs qui seront les plus touchés seront notamment le pétrole et le gaz, où la demande pourrait chuter de 35 % au cours de la prochaine décennie selon McKinsey, l’immobilier, l’automobile et les transports, la production d’électricité et l’agriculture.
Il devient donc nécessaire pour les banques de gérer efficacement les risques et opportunités qui découlent des changements climatiques.
Des pressions externes
En plus de devoir considérer le calendrier environnemental, les banques doivent également faire face à la pression réglementaire et commerciale croissante pour se protéger des effets du changement climatique et s’aligner sur le programme mondial de développement durable.
Les régulateurs bancaires du monde entier réfléchissent actuellement à de nouvelles règles pour la gestion des risques climatiques et ont l’intention de mettre en place des tests de résistance exigeants dans les mois à venir.
L’Autorité de régulation prudentielle du Royaume-Uni a par exemple déjà défini des attentes détaillées en matière de gouvernance, de processus et de gestion des risques. Ces attentes exigent des banques qu’elles identifient, mesurent, quantifient et surveillent leur exposition au risque climatique et qu’elles s’assurent que la technologie et le talent nécessaires sont en place.
De plus de nombreux investisseurs, poussés par les demandes de leurs clients, tiennent déjà compte des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs décisions d’investissement.
Dans un environnement concurrentiel où les banques sont souvent jugées sur leurs références écologiques, il est logique de développer des offres de financement durable et d’intégrer les facteurs climatiques dans l’allocation des capitaux, l’approbation des prêts, le suivi des portefeuilles et les rapports.
Deux défis se dégagent comme moteurs de l’engagement à court et moyen terme selon McKinsey :
1) Protéger le bilan de l’incertitude : à mesure que les risques physiques et de transition se matérialiseront, les entreprises seront de plus en plus vulnérables à l’érosion de la valeur qui pourrait nuire à leur statut de crédit. Ces risques peuvent à leur tour avoir un impact négatif direct et indirect sur les banques, notamment une augmentation des actifs échoués, des valeurs résiduelles incertaines et la perte potentielle de réputation si les banques, par exemple, ne sont pas perçues comme soutenant efficacement leurs clients.
2) Financement d’un programme vert : les énergies renouvelables, la remise à neuf des installations et les technologies d’adaptation nécessitent toutes des niveaux de financement importants. Ces améliorations permettront de réduire les émissions de carbone, de capturer et de stocker le carbone atmosphérique, et d’accélérer la transition vers l’abandon des combustibles fossiles.
McKinsey estime que cinq principes soutiendront la transformation pour la gestion des risques climatiques. Car pour devenir des gestionnaires efficaces, les banques doivent quantifier les facteurs climatiques dans l’ensemble de leurs activités et mettre en place les outils et les processus nécessaires pour en tirer parti de manière efficace. Dans le même temps, elles doivent également s’assurer que leurs activités sont en phase avec les demandes des parties prenantes externes.
1) Formuler une gouvernance des risques climatiques : cela permettra au conseil d’administration de garder un œil sur les expositions aux risques et de réagir rapidement.
2) Adapter la stratégie commerciale et de crédit : les considérations climatiques doivent être profondément ancrées dans les cadres de risque et les processus d’allocation de capital.
3) Aligner les processus de gestion des risques : afin d’aligner l’exposition au risque climatique sur l’appétit pour le risque et sur la stratégie commerciale et de crédit, les gestionnaires de risques doivent intégrer les considérations relatives au risque climatique dans tous les processus de gestion des risques, y compris l’allocation de capital, l’approbation des prêts et le suivi du portefeuille.
4) S’informer sur les tests de résistance : les analyses de scénarios et les tests de résistance, qui figurent en bonne place dans les programmes des entreprises et des autorités de réglementation, seront des leviers essentiels pour aider les banques à évaluer leur résilience.
5) Se concentrer sur les facilitateurs : les banques manquent souvent des compétences techniques nécessaires pour gérer le risque climatique. Elles devront s’attacher à les acquérir. Elles doivent donc prévoir dans leur budget des investissements accrus dans les technologies, les données et les talents.
Ne pas aller trop vite
La plupart des banques se sentent obligées de réagir face aux réalités climatiques pour faire face aux demandes des clients et des investisseurs. Toutefois, certaines veulent aller trop vite, ce qui augmente le risque de faux pas.
La bonne stratégie requiert une préparation adéquate et complète affirme McKinsey. Une banque peut créer une feuille de route axée sur la valeur, établissant un programme adapté à sa situation et tenant compte du statu quo tant physique que réglementaire, suggère la firme.
Selon McKinsey, pour élaborer une approche globale de la gestion de risque, il y aurait trois étapes clés réalisables en quatre à six mois.
1) Définir et articuler son ambition stratégique
Chaque banque doit être sûre du rôle qu’elle veut jouer et identifier les segments de clientèle et les secteurs industriels où elle peut apporter le plus de valeur ajoutée. Elles doivent également établir et mettre en œuvre des cadres de gouvernance pour les risques climatiques qui prévoient le recours à du personnel senior spécialisé, ainsi qu’une norme minimale pour les rapports de haut en bas de l’entreprise.
2) Construire les fondations
Les banques doivent identifier de toute urgence les processus, les méthodologies et les outils dont elles auront besoin pour gérer efficacement les risques climatiques. Les analyses de scénarios et les tests de stress seront les piliers des cadres de surveillance et devraient être considérés comme des capacités essentielles.
3) Construire un cadre de gestion des risques climatiques
Les banques doivent s’efforcer d’intégrer les facteurs de risque climatique dans la prise de décision à travers leurs activités de front office et de back-office et pour les risques financiers et non financiers. Les données sont nécessaires pour comprendre les fondements du changement climatique, ainsi que l’impact qu’il aura sur des activités telles que la fixation des prix, le risque de crédit et la gestion des relations avec les clients. Dans la mesure du possible, les banques devraient mesurer les expositions au climat à plusieurs niveaux, notamment par portefeuille, sous-portefeuille et même par transaction. Cela permettra de créer des cartes thermiques et des rapports détaillés de situations spécifiques si nécessaire.