Tout un contraste avec l’ensemble des pays émergents, qui continuent de progresser mais à un rythme moins rapide que celui de la Chine. Cette année, leur PIB cumulatif augmentera de 4,5 % pour atteindre 4,8 % en 2018, selon le Fonds monétaire international (FMI).
Malgré tout, les gestionnaires de portefeuille et les stratèges demeurent très prudents vis-à-vis des marchés émergents, et au premier chef de la Chine.
Le Mouvement Desjardins recommande par exemple aux investisseurs de sous-pondérer les actions des pays émergents dans leur portefeuille, selon Michel Doucet, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins.
MRB Partners propose quant à elle d’adapter les stratégies d’investissement selon le type de pays émergent. La firme de recherche montréalaise suggère par exemple de surpondérer l’Inde, mais de sous-pondérer la Chine.
Comment investir en Chine dans ce contexte ?
Investir dans les sociétés canadiennes exposées à la Chine
Luc Vallée, stratège en chef chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne, ne recommande pas d’investir en ce moment en Chine en raison de la mauvaise conjoncture.
Par contre, pour les investisseurs qui, afin de réaliser de meilleurs rendements, sont plus tolérants au risque, il suggère d’investir dans les actions d’entreprises canadiennes exposées au marché chinois.
On parle ici de sociétés qui vendent des biens ou des services en Chine. C’est une façon prudente, dit Luc Vallée, de profiter de la croissance économique de la Chine, qui demeure malgré tout supérieure à 6 %.
Investir dans la consommation chinoise
Cimon Plante, gestionnaire de portefeuille à la Financière Banque Nationale, ne recommande pas, lui non plus, d’investir en Chine. «La forte progression du crédit, surtout en provenance des sociétés d’État, fait que le risque de crédit devient de plus en plus élevé», dit-il.
Pour les investisseurs qui veulent malgré tout s’exposer au marché chinois, il faut éviter les banques chinoises, l’immobilier ainsi que les sociétés d’État, affirme Cimon Plante, et ce, afin de miser plutôt sur des valeurs sûres.
Le gestionnaire suggère entre autres d’investir dans le fonds négocié en Bourse (FNB) américain China Consumer ETF (CHIQ) de Global X. «Ce fonds permet d’investir dans des sociétés de consommation discrétionnaires chinoises», dit-il.
Cimon Plante croit aussi qu’investir dans la technologie en Chine est une bonne stratégie. C’est pourquoi il recommande d’acheter le FNB Guggenheim China Technology ETF (CQQQ). Il permet de s’exposer au secteur technologique avec des acteurs comme le géant du commerce de détail en ligne Alibaba ou le fournisseur de services Internet Baidu, le Google chinois.
«Ces entreprises nécessitent peu de réinvestissement en capitaux, elles sont très rentables et elles sont près du consommateur», souligne Cimon Plante.
Selon lui, l’achat de l’indice chinois CXSE est aussi une voie intéressante, car il exclut les sociétés d’État en Chine.
Investir dans les obligations chinoises
Keith Taylor, gestionnaire de portefeuille chez BMO Gestion mondiale d’actifs à Hong Kong, affirme pour sa part qu’il faut éviter de devenir trop conservateur si l’on adopte une stratégie défensive en Chine.
Il souligne que la croissance annuelle du PIB de la Chine a dépassé les 6 % depuis des décennies. C’est pourquoi à ses yeux les investisseurs ne devraient pas réduire leur exposition au marché chinois malgré la décélération de l’économie.
«Si l’on souhaite réduire ses risques, il est probablement plus pratique de réduire le poids des actions et d’augmenter l’allocation aux obligations dans son portefeuille», dit-il.
À l’étranger, de nombreuses entreprises chinoises émettent des obligations en dollars américains ainsi qu’en yuans, la devise chinoise. On peut acheter ces dernières dans les centres de négociation du yuan aux quatre coins du monde, notamment au Canada.
Cela dit, depuis le 3 juillet, il existe une troisième option.
La Chine a déverrouillé son gigantesque marché obligataire – le troisième en importance au monde après les États-Unis et le Japon – afin d’offrir aux investisseurs étrangers la possibilité d’acheter la dette chinoise libellée en yuans directement en Chine.
Les investisseurs y ont accès par le mécanisme Bond Connect situé à Hong Kong.
Choisir minutieusement ses actifs
Pour réduire le risque présenté par l’investissement en Chine, Marc Larente, vice-président chez Gestion de patrimoine TD, préconise une gestion minutieuse de l’allocation d’actifs du portefeuille.
«La Chine, comme les autres pays émergents, a un rôle à jouer dans un portefeuille, dit-il. Ces marchés sont désormais des incontournables, puisqu’ils représentent, et vont continuer de représenter, une part importante du PIB mondial.»
La Chine est en profonde restructuration, insiste Marc Larente.
Le PIB chinois a affiché une croissance de plus de 8 % en moyenne depuis les années 1980. Un dynamisme qui rappelle celui du Japon après la Deuxième Guerre mondiale.
Aujourd’hui, le rythme de la Chine a diminué, car la croissance tend à se «normaliser» et à opérer une transition vers une économie plus «mature», selon Marc Larente.
«La croissance économique, qui était nourrie par la production manufacturière, en particulier le textile, s’est réorientée depuis les dernières années vers la technologie et les produits à valeur ajoutée», dit-il.
La donne est donc en train de changer pour les investisseurs.
«Désormais, la Chine est la deuxième puissance économique mondiale. Elle représente plus de 10 % de l’ensemble des exportations mondiales. Elle importe également énormément. Sa nouvelle classe moyenne consomme de plus en plus, ce qui fait de ce marché l’un des plus grands bassins de consommateurs au monde», affirme Marc Larente.
Le gouvernement chinois est aussi un facteur de croissance, car il investit des milliards de dollars en infrastructures chaque année.