L’ombudsman Sherra Profit, dont le mandat de cinq ans prend fin en juillet prochain, présente son dernier rapport annuel. Intitulé Transformation par la perturbation, le rapport souligne les points saillants et réalisations de l’année et offre quelques réflexions sur le mandat de l’ombudsman.
Rappelons que le mandat du Bureau de l’ombudsman des contribuables (BOC) est de réduire le déséquilibre de pouvoir entre les plaignants et l’Agence du revenu du Canada (ARC). Il examine les plaintes et recommande ensuite à l’ARC, si nécessaire, les mesures à prendre pour résoudre le problème.
Au début du rapport, l’ombudsman rappelle qu’en tant qu’organisme impartial et indépendant, les employés du BOC examinent objectivement les opérations et la prestation de services de l’ARC. Ils peuvent ainsi avoir leur propre opinion sur les problèmes et faire part de leurs commentaires. Pour s’assurer de bien communiquer, ils ont d’ailleurs lancé une page Web sur le site Internet de l’ARC qui permet de faire connaître le BOC et fournit des renseignements sur leurs activités.
En 2019-2020, le nombre de demandes de renseignements généraux reçus par le Bureau a diminué. Cette baisse pourrait être expliquée par l’accroissement de la sensibilisation du public et la connaissance des programmes fiscaux et des prestations actuels ou par l’utilisation accrue du site Web ou des plateformes des médias sociaux pour obtenir des renseignements.
Cette année, le BOC a reçu 1415 demandes de renseignement général, a ouvert 1506 dossiers et en a fermé 1962. En tout, 3098 problèmes ont été soulevés dans les dossiers de plainte ouverts.
Le BOC a procédé à 574 examens des plaintes des particuliers, une augmentation de 196 % du nombre d’examens effectués par rapport à l’exercice précédent. Dans 69 % des cas, l’ARC n’a pas respecté un ou plusieurs des droits du plaignant en matière de service.
Dans les enjeux les plus souvent soulevés, on retrouve :
- Le manque d’équité du processus de recouvrement des dettes
- Les retards dans le traitement des déclarations de revenus et de prestations des particuliers (T1)
- Le manque de clarté des renseignements concernant le traitement des déclarations T1
- Les retards dans le traitement des demandes de redressement des déclarations T1
La grande majorité des plaintes reçues par le BOC (90 %) se rapportent à trois droits :
- Le droit de s’attendre à ce que l’ARC rende compte de ses actions (10 %)
- Le droit d’être traité de façon professionnelle, courtoise et équitable (26 %)
- Le droit à des renseignements complets, exacts, clairs et opportuns (54 %)
Cette année, le BOC a introduit la Demande de document. Celle-ci permet de demander à l’ARC de fournir des documents précis et de les recevoir dans un délai de 5 jours ouvrables, afin d’aider les agents à accéder à des renseignements détaillés et complets plus tôt dans le processus d’examen.
Gérer les problèmes systémiques
En 2017, le BOC a mis en place l’outil de Demande d’amélioration des services qui permet de recommander des changements aux problèmes systémiques qui ne nécessitent pas un examen systémique complet. Cela permet d’aborder et de régler davantage de problèmes systémiques. Cette année, 5 demandes de la sorte ont été envoyées à l’ARC.
- Problème de terminologie : l’ARC a changé le terme « cotisation arbitraire », le remplaçant par « cotisation factuelle », mais n’a pas fait les changements partout apportant ainsi de la confusion.
- Lettre d’excuse : le BOC suggère de mettre en place une politique à l’échelle de l’ARC sur l’envoi de lettres d’excuses aux contribuables qui n’ont pas reçu le niveau de service auquel il aurait droit. Cela permettrait d’améliorer la responsabilisation et de traiter toutes les personnes d’une façon équitable.
- Disponibilité des coordonnées de l’ARC : l’ARC n’offre plus de services au comptoir sans rendez-vous, pourtant elle offre que peu d’information aux gens qui n’accèdent pas aux renseignements en ligne ou qui ne sont pas au courant qu’il n’est plus possible de parler à un agent à un bureau local de l’ARC ou de livrer des documents à cet établissement. Le BOC suggère notamment des affiches pour expliquer que ce service n’est plus offert pour remédier au problème. Cette affiche fournirait une liste de numéros de téléphone généraux où les gens pourraient obtenir de l’aide.
- Temps d’attente au téléphone : il n’est déjà pas évident de trouver le numéro de téléphone où joindre l’ARC. Le temps d’attente indiqué ne correspond qu’au temps requis par l’ARC pour répondre à l’appel initial et non le temps d’attente lors du transfert vers la bonne unité. Le BOC s’attend donc à ce que l’ARC fournisse ces différents renseignements à leurs clients.
- Réclamation de la prestation trillium de l’Ontario (PTO) : cette Demande d’amélioration des services a mis l’accent sur les problèmes liés au service qui surviennent lorsque l’ARC n’adapte pas la communication qu’elle envoie aux particuliers en fonction de leur situation. Ainsi, pour valider la PTO, il faut fournir des documents comme les reçus de location ou les relevés d’impôt foncier. Toutefois, pour les particuliers qui vivent dans une réserve, les montants admissibles à la PTO ne sont pas liés aux reçus de location ou à l’impôt foncier, mais plutôt aux coûts d’énergie domiciliaire. Il faudrait donc modifier les lettres qui sont envoyées aux demandeurs de la PTO habitant dans une réserve.
L’Ombudsman des contribuables souligne que l’ARC devrait accueillir les perturbations et s’en servir comme catalyseur du changement transformationnel.
« Les conflits et les perturbations peuvent être très stressants pour ceux qui sont touchés, mais ils peuvent également représenter des occasions de changement. Tout au long de mon mandat à titre d’ombudsman des contribuables, j’ai accueilli les perturbations et je m’en suis servi comme catalyseur de la transformation positive. Cette approche m’a aidée à remettre en question le statu quo et à chercher des façons productives de collaborer et de régler des problèmes qui pourraient autrement être négligés. Mon équipe travaille fort pour aider les gens à naviguer dans le processus de règlement des plaintes et à réduire le nombre d’interruptions éprouvées par un plaignant lorsqu’il tente de résoudre des problèmes avec l’ARC » a ajouté Sherra Profit.
Sachant qu’il est important de rencontrer des employés de l’ARC en personne, l’ombudsman s’est rendue dans des bureaux régionaux. Elle en a ainsi profité pour démystifier son rôle et celui du BOC auprès des employés.
Elle a également animé un atelier à l’intention d’étudiants inscrits en sciences sociales à l’Université Concordia et s’est adressée à des élèves du secondaire provenant de collectivités situées autour de Cambridge Bay, en plus de discuter avec de futurs avocats à la Faculté de droit de l’Université de Toronto.
Il reste de la place à l’amélioration
Outre ce rapport, Sherra Profit a publié une déclaration au sujet de son mandat à titre d’ombudsman des contribuables.
Dans celle-ci, elle remercie son équipe et souligne avoir fait son possible pour que « l’expérience de chacun soit entendue et que le caractère unique de chaque expérience soit pris en compte dans l’examen des problèmes présentés à mon Bureau et à l’ARC ».
Elle affirme être consciente de l’incidence des politiques, des processus et des procédures de l’ARC sur les contribuables et savoir que les contribuables et bénéficiaires de prestations ne sont pas tous égaux face à l’accès aux ressources pour se conformer à leurs obligations. Elle souligne ainsi l’importance de bénéficier d’une diversité de point de vue pour faire preuve de plus d’équité et de justice.
Elle souligne que si son Bureau et son équipe ont permis de faire des progrès pour combler les lacunes en matière de service, il reste encore du travail à faire.
Elle note aussi le manque de ressource. Ainsi elle souligne que le budget de son Bureau n’a pas changé en 12 ans, alors que le nombre de plaintes a considérablement augmenté. Ce manque ajoute, selon elle, une pression sur la charge de travail du personnel et au fonctionnement du Bureau, l’empêchant de trouver rapidement des solutions aux problèmes des plaignants.