Le départ de Martin Lavigne, qui était président de Financière Banque Nationale Gestion de patrimoine (FBNGP) jusqu’à lundi dernier, ne laisse personne indifférent dans l’industrie, à commencer par les conseillers en placement de la FBNGP.
Selon une source, plusieurs d’entre eux ont été surpris de l’annonce, qui a été faite par Martin Lavigne, conjointement avec Martin Gagnon, coprésident et cochef de la direction, Financière Banque Nationale, et premier vice-président à la direction, Gestion de patrimoine, à la Banque Nationale, lundi après-midi.
À ce moment, certains auraient perçu que Martin Lavigne « ne partait pas de son plein gré ». Il n’a pas été possible d’obtenir une entrevue avec le principal intéressé ni avec Martin Gagnon, ceux-ci étant non disponibles pour ce faire « à court terme », d’après Marie-Pierre Jodoin, directrice principale, Affaires publiques, à la Banque Nationale.
Difficile de connaître précisément les raisons du départ. Marie-Pierre Jodoin n’a pas donné suite à notre question en ce sens.
Selon une source de l’industrie, Martin Lavigne ne se serait pas caché d’avoir postulé sur le poste qu’occupe actuellement Martin Gagnon depuis juillet 2016, à l’instar d’autres cadres de la Banque Nationale. Une autre source estime que la qualité de la relation entre les deux dirigeants n’était, disons, pas parfaite.
Quoi qu’il en soit, Martin Lavigne était « très apprécié » des conseillers en placement et de leur équipe, près d’eux et s’intéressait personnellement à eux. On le décrit comme quelqu’un de travaillant, consacrant de longues heures à ses fonctions.
« C’est quelqu’un pour qui j’ai beaucoup d’admiration. Martin est un gars d’équipe, un gars positif. Il voit toujours le verre plein, même quand il est aux deux tiers vide », indique Vincent Hogue, qui a travaillé avec lui à une autre époque chez Fidelity Investments.
À ce moment, Martin Lavigne créait une belle synergie avec tous ses collègues, témoigne Vincent Hogue : « Il était relativement près de ses employés. Il travaillait très fort. Quand on regarde tout ce qu’il a légué à la FBN, je lui lève mon chapeau. »
Lors d’un portrait de Martin Lavigne, publié par Finance et Investissement en 2018, Luc Paiement, alors conseiller à la direction de la BN et ancien cochef de la direction de la FBNGP, décrivait Martin Lavigne comme « un motivateur hors pair, un compétiteur très agressif et focalisé », qui est « prêt à passer au travers d’une porte s’il y a un problème ».
On y notait que l’actif sous gestion (ASG) de la firme est passé de 49 G$ au 31 octobre 2011 – avant l’intégration des firmes Wellington West Holdings et Valeurs mobilières HSBC (Canada), acquises respectivement en 2011 et en 2012 – à 70 G $ au début de 2012 et à plus de 100 G $ à la fin de 2017.
« FBNGP a surperformé les cinq autres grandes banques canadiennes pour la croissance sur les six dernières années des revenus et des bénéfices avant impôts, selon l’Investor Economics profitability report» d’après la Banque Nationale (BN), pouvait-on lire dans ce texte.
Plus récemment, de la fin de février 2019 à fin de février 2020, le nombre de conseillers en placement est passé de 710 à 703 à la FBNGP et son ASG, de 106,3 G$ à 111 G$. Si on exclut les conseillers du Québec, le nombre de conseillers de la FBNGP dans le reste du Canada est passé de 308 à 295 et leur ASG, de 38,9 G$ à 40 G$.
Selon une source de l’industrie, ce sont d’ailleurs les activités de la FBNGP dans le reste du Canada qui seraient un défi pour l’organisation. Cette diminution du nombre de conseillers de la FBNGP dans ces provinces pourrait s’expliquer par la perception de la firme auprès des représentants, d’après le Brokerage report, card, publié en mai 2020 par Investment Executive, notre publication sœur. Il s’agit d’un sondage équivalant à celui fait dans le cadre du Pointage des courtiers québécois.
Selon ce rapport d’Investment Executive, l’Indice IE de la FBNGP s’élève à 8,0 sur 10, soit en deçà de la moyenne de 8,4 de toutes les firmes de courtage, et de la moyenne des firmes (8,1) de courtage qui sont filiales de banques. Les conseillers répondants accordent à la FBNGP un taux de recommandation (net promoter score) de 48, ce qui est inférieur à la moyenne de 62,6 pour toutes les firmes, mais supérieur à la moyenne des scores (44) des courtiers qui sont des filiales de banques.
Changements technos accélérés
Martin Lavigne sera remplacé par Jonathan Durocher, qui était jusqu’à tout récemment président de Banque Nationale Investissements (BNI) depuis 2014. « Il a travaillé pendant de nombreuses années au sein de FBNGP et est un passionné du conseil », lit-on dans le communiqué de la Banque Nationale.
D’après une source de l’industrie, Jonathan Durocher est respecté à l’interne et est perçu comme fort en technologies. « Il connaît son monde, se souvient du nom des gens. Il est plus jeune, plus doux et est toujours très souriant et très gentil. Tout le monde aime beaucoup Martin Lavigne, tout comme c’est le cas pour Jonathan Durocher. »
Même si la nomination de Jonathan Durocher soulève des questions sur l’indépendance des conseillers de choisir les meilleurs produits pour leurs clients, par opposition à devoir offrir des fonds maison, cette crainte reste faible, car BNI n’offre pas de fonds gérés à l’interne, selon une source.
Jonathan Durocher aurait plusieurs défis technologiques à relever. La crise de la COVID-19 a accéléré l’adoption de nouvelles technologies à la FBNGP, tout comme ailleurs dans l’industrie, ce qui amène des défis de gestion budgétaire et d’établissement des priorités. Cette cadence élevée pourrait continuer ainsi encore plusieurs mois.
En même temps, Jonathan Durocher devra s’assurer de la mise en place adéquate de nouveaux outils technologiques déjà prévus à la FBNGP, comme le logiciel de gestion de clientèle Salesforce et le nouveau logiciel de planification financière. L’intégration de ces outils aux systèmes actuels pourrait présenter son lot de difficultés, selon une source.
Il peut toutefois compter sur des conseillers en placement relativement engagés et satisfaits au Québec, selon le Pointage des courtiers québécois de 2020 de Finance et Investissement. L’Indice FI de la FBNGP se chiffre à 8,2, par rapport à 8,1 pour la moyenne des firmes de courtage faisant l’objet de l’enquête. Son taux de recommandation net est de 76,9 par rapport à 56,4 pour la moyenne des courtiers québécois.