Pourtant, ce n’est pas comme si la Banque Nationale, Desjardins, Industrielle Alliance, Fiera Capital et les autres n’avaient pas sorti leur chéquier à répétition depuis l’an 2000.
Oui, nous avons «perdu» des acteurs importants au jeu de la consolidation. Après tout, j’écris ce billet dix jours après l’annonce de l’achat de Standard Life Canada par la Financière Manuvie. D’autres poids lourds ont perdu un peu de tonus au fil des ans, mais certains gestionnaires se sont développés.
C’est pourquoi nous avons fait le classement des gestionnaires de portefeuille fondés depuis 2000 au Québec et qui sont encore en activité. Le tableau est publié en page B5.
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Nous avons déterminé 62 firmes, donc en moyenne quatre par an. Ce n’est pas énorme, mais d’ores et déjà, il est faux d’affirmer qu’il n’y a pas d’entrepreneuriat dans l’industrie.
Soulignons qu’un tiers des gestionnaires n’ont pas voulu nous dévoiler leur actif sous gestion, une chose que je comprends dans le cas de ces sociétés privées. Mais je ne me trompe pas en disant que la grande majorité d’entre elles a un actif sous gestion modeste.
Ensuite, un autre tiers gère moins de 100 M$, et dix autres gestionnaires, entre 100 et 250 M$. Nous avons plus des trois quarts de notre tableau ici.
Si on continue, cinq autres gestionnaires ont entre 250 M$ et 1 G$, et sept d’entre eux ont franchi la barre du milliard d’actif sous gestion.
Oui, il se gère beaucoup d’argent à Montréal, mais il pourrait s’en gérer plus.
Du temps, de l’expérience et de l’argent
Comme on s’en rend compte à la lecture du texte en page B4, démarrer une société de gestion de portefeuille est difficile.
Lorsqu’on examine les sept gestionnaires qui ont plus de un milliard d’actif, on constate qu’ils sont dirigés par des hommes très expérimentés. Et que la réussite n’est pas instantanée. La plus jeune firme du groupe, AlphaFixe Capital, a été fondée en 2008.
Évidemment, la taille est un enjeu crucial dans l’industrie aujourd’hui. Elle le sera plus encore demain, affirme Jean-Guy Desjardins, dans un texte à la page B6.
Or, on sait aussi que pour gérer des actifs plus importants, il faut… des actifs plus importants. On en revient au paradoxe de l’oeuf et de la poule. Une caisse de retraite ne donnera pratiquement jamais un mandat de gestion de 10 M$ à un gestionnaire qui gère un actif total de 25 M$.
À mon avis, la clé sera de créer un contexte favorable pour que les sociétés émergentes qui ont fait leurs preuves (historique de rendement, solidité de l’équipe, respect de la réglementation, etc.) accèdent à des capitaux afin d’atteindre la taille qui leur permettra de servir des clients plus importants.
Par exemple, un coup d’oeil rapide au tableau nous montre que le passage des gestionnaires au-delà du seuil des 500 M$ engendre la création d’emplois. Ainsi, les trois premiers gestionnaires ont créé environ 300 emplois.
Il sera capital de reproduire de telles réussites.
Évidemment, je ne veux pas mélanger les pommes et les oranges, mais si on allouait ne serait-ce que l’équivalent d’une infime partie des sommes consenties aux crédits d’impôt pour fonds de travailleurs à la croissance de sociétés financières établies au Québec, j’ai l’impression que dans 15 ans, on dresserait un bilan très positif de l’expérience.
Deux autres axes de développement
Les données recueillies nous montrent aussi que le marché des fonds communs est difficilement accessible. Ils constituent – et de loin – la catégorie la moins importante de clients servis par les gestionnaires.
Cela n’est pas surprenant, mais est-ce que cela va changer ? Probablement pas. En effet, on a remarqué depuis environ cinq ans que les sociétés de fonds tendent à rapatrier les mandats de gestion à l’interne, ce qui ne facilite pas la tâche aux gestionnaires indépendants.
Sur ce plan, on peut au moins se réjouir du fait que les dernières années ont été marquées par l’ouverture de bureaux de gestion à Montréal par des sociétés de fonds communs établies. Le cas le plus connu est celui de Fidelity, qui gère désormais un actif de plus de 14 G$ à partir de Montréal.
Cependant, plusieurs grandes sociétés établies hors Québec ont confié des mandats de gestion de fonds communs aux gestionnaires d’ici. Entre autres, Groupe Investors, les Fonds Dynamique et AGF, pour ne nommer que celles-là.
Enfin, l’an 2000 ayant marqué la spécialisation de la Bourse de Montréal en produits dérivés, il fallait s’attendre à un certain dynamisme dans ce secteur. Or, un peu plus de la moitié des gestionnaires ont indiqué les stratégies alternatives parmi leur actif géré. C’est encourageant, non ?