Il évoque 68 dénonciations effectuées depuis le lancement du programme en juin 2016, « des dénonciations que nous n’aurions pas eues autrement ». De ce nombre, « un peu plus de 50% » a donné lieu à l’ouverture d’une enquête ou a généré de l’information liée à un dossier d’enquête existant. Pour l’instant, aucun dossier d’enquête ne s’est traduit par des poursuites.
« Une dénonciation, c’est le jour un du dossier potentiel d’enquête. Certaines dénonciations vont ensuite donner lieu à des dossiers d’enquête. Pour l’instant, nous ne sommes pas encore dans des dossiers où il y a des poursuites, mais des dossiers d’enquêtes sont en cours à la suite de dénonciations reçues », signale Jean-François Fortin.
Dans le cas des dénonciations n’ayant pas mené à l’ouverture d’un dossier d’enquête, ça ne veut pas dire que l’information n’est d’aucune utilité, précise Jean-François Fortin.
Un dossier d’enquête est ouvert lorsqu’il y a « des motifs suffisants de croire qu’il y a une infraction qui est commise où qu’il y a quelque chose d’illégal qui est survenu. Les dossiers pour lesquelles nous n’avons pour suffisamment d’information pourraient nous servir ultérieurement ».
Un choix réfléchi
C’est l’analyse de différents programmes de dénonciations mis en place par des régulateurs à travers le monde qui a mené l’AMF à choisir de ne pas rémunérer les dénonciateurs.
« Je ne dis pas que nous sommes contre un programme de récompenses et que nous n’irons pas éventuellement dans cette voie, mentionne Jean-François Fortin. Toutefois, nous n’avons pu constater d’éléments qui démontraient véritablement que les récompenses, c’est ce qui amenait un dénonciateur potentiel à dénoncer ».
Jean-François Fortin souligne qu’un programme de récompenses implique du financement et nécessite une analyse qui va au-delà de la dénonciation. « En plus d’enquêter sur l’infraction potentielle, il faut valider la qualité du dénonciateur et déterminer s’il se qualifie pour avoir une récompense. »
Pour sa part, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario a lancé son programme de dénonciation presque au même moment que l’AMF, et a choisi d’y inclure des incitatifs. Jean-François Fortin affirme toutefois ignorer « combien les Ontariens ont mis d’argent dans leur programme », ainsi que le nombre de dénonciations récoltées depuis le lancement de ce programme.
Générer des dénonciations
Le programme de dénonciation de l’AMF vise tous les types d’infractions potentielles, qu’elles soient commises dans le cadre de la distribution de produits financiers, d’assurances, ou en valeurs mobilières. Le programme, s’il s’adresse à monsieur et madame Tout-le-monde, concerne particulièrement « les participants de marchés, les employés de l’industrie qui sont dans les institutions financières et qui ont pu être témoins de situations d’illégalité ayant pu échapper au régulateur », précise Jean-François Fortin.
Lors de la mise en œuvre du programme, L’AMF s’est assurée d’y inclure des éléments tels qu’un mécanisme de confidentialité et d’immunité. Ainsi, en matière de protection offerte aux dénonciateurs, les mesures son multiples. Au final, certains dénonciateurs pourraient agir de manière totalement anonyme, l’identité de certains autres pourrait ne jamais être dévoilée, alors que d’autres dénonciateurs pourraient ne jamais avoir à témoigner, illustre Jean-François Fortin.
« Lorsque nous avons lancé le programme, nous savions qu’il ne contenait pas toutes les mesures voulues et que des amendements législatifs étaient requis, mais nous avons quand même choisi d’aller de l’avant », confirme Jean-François Fortin. Des éléments venant compléter le programme sont inclus dans le projet de loi 141 déposé en octobre par le ministre des Finances Carlos Leitao.
Il s’agit essentiellement de mesures anti-représailles visant à protéger la personne qui, de bonne foi, fait une dénonciation à l’AMF ou qui collabore à une enquête. Les mesures de représailles sont illustrées dans le projet de loi 141 comme étant la rétrogradation, la suspension, le congédiement ou le déplacement d’une personne, « ainsi que toute sanction disciplinaire ou autre mesure portant atteinte à son emploi ou à ses conditions de travail ».