Le Parlement du Québec en été, Québec.
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Québec souhaite regrouper la Chambre de la sécurité financière (CSF) et la Chambre de l’assurance de dommages (ChAD) au sein d’une nouvelle chambre, soit la Chambre de l’assurance, selon un projet de loi présenté par le ministre des Finances Eric Girard, mardi.

D’après celui-ci, ce nouvel organisme d’autoréglementation (OAR) perdrait des pouvoirs d’encadrement des représentants en épargne collective et des représentants en plans de bourses d’études.

L’Autorité des marchés financiers (AMF) devrait ainsi, à terme, rendre une décision de reconnaissance « visant notamment le retrait de l’exercice des fonctions et pouvoirs de la Chambre de l’assurance à l’égard des représentants en épargne collective et des représentants en plans de bourses d’études », lit-on dans le projet de loi 92 intitulé Loi modifiant diverses dispositions principalement dans le secteur financier.

Il s’agit du projet de loi omnibus que le ministère des Finances avait promis d’adopter périodiquement et qui vise à moderniser différentes lois du secteur financier du Québec.

Le projet de loi prévoit également le transfert des « dispositions instituant le Fonds d’indemnisation des services financiers dans la Loi sur l’encadrement du secteur financier et précise notamment que les courtiers en placement sont maintenant visés par ce fonds. »

La fusion des deux chambres ainsi que les modifications à l’encadrement des représentants en épargne collective sont un « changement important dans l’encadrement de la distribution des services financiers au Québec, qui mérite une réflexion posée et rigoureuse de notre part », a indiqué Daniel Richard, vice-président, relations avec les communautés, à la CSF. L’organisme d’autoréglementation souhaite effectuer une analyse approfondie de ce projet de loi avant de se prononcer davantage.

« Nous entendons collaborer de façon constructive avec toutes les parties prenantes, et contribuer au dialogue sur cette réforme afin d’assurer que les mécanismes de protection du public québécois soient préservés et renforcés », a ajouté Daniel Richard.

Claudyne Bienvenu, vice-présidente pour le Québec et l’Atlantique de l’Organisme canadien de réglementation des investissements (OCRI), entend également examiner les effets du projet de loi dans sa version définitive avant de se prononcer.

« Nous sommes prêts à ajuster le tir, au besoin, et à collaborer avec tous nos partenaires du secteur et les organismes d’autoréglementation pour assurer la protection des investisseurs au Québec. Nous espérons aider à réaliser des gains d’efficience en matière de réglementation de la manière souhaitée par le ministre et l’AMF à la suite du projet de loi proposé », a-t-elle indiqué.

Le diable est dans les détails

Finance et Investissement a tenté d’obtenir la réaction de différents acteurs de l’industrie, mais peu d’entre eux étaient immédiatement disponibles pour commenter le projet de loi de 47 pages.

Le projet de regroupement des deux chambres a surpris Maxime Gauthier, président de Mérici Services Financiers. Il a hâte d’en comprendre la résultante et donne la chance au ministre des Finances d’en expliquer la pertinence.

« J’ai plus de questions que de réponses. On comprend la structure qui veut être mise en place, mais le diable va se cacher dans les détails », a-t-il dit.

Selon lui, la haute direction de la Chambre de l’assurance, nommée par le ministre, en donnera le ton et influera sur ce à quoi ressemblera l’organisme fusionné.

Par rapport au retrait de l’exercice des fonctions et pouvoirs de la Chambre de l’assurance à l’égard des représentants en épargne collective, Maxime Gauthier s’attend à ce que ces pouvoirs soient transférés rapidement à l’OCRI.

« Pour le secteur de l’épargne collective, c’est susceptible de générer une efficience accrue parce que, autant les individus que les courtiers et les organisations vont être (encadrés) au sein d’un même organisme d’autoréglementation, avec un même ensemble de règles. Tout va être uniformisé. Pour les courtiers qui ont des activités hors Québec, ils vont avoir une cohérence augmentée », a-t-il souligné

Maxime Gauthier reste préoccupé par le coût d’adhésion à la Chambre de l’assurance pour les représentants qui sont actifs à la fois en épargne collective et en assurance de personnes.

« Potentiellement, un conseiller qui a deux permis va devoir quand même payer à deux organismes des frais annuels. On sait déjà que l’OCRI veut charger 250 $ par individu. La nouvelle entité, combien va-t-elle facturer par individu ? » a-t-il ajouté. Selon lui, la CSF et l’OCRI devraient éventuellement avoir une courroie de transmission d’informations advenant que l’un ou l’autre découvre des comportements déviants, et ce, afin d’améliorer la protection du public.

Par ailleurs, Maxime Gauthier comprend la volonté du ministre d’étendre le Fonds d’indemnisation des services financiers (FISF) à l’ensemble du secteur des valeurs mobilières. Or, il craint que les courtiers du Québec doivent payer à la fois pour le FISF et pour le Fonds canadien de protection des investisseurs, ce qui accroît les coûts d’opération au Québec. Malgré le peu de détails sur la manière dont la cohabitation des fonds d’indemnisation se fera, il espère une sorte de reconnaissance mutuelle entre les fonds afin d’éviter un dédoublement de coût.

Cet article a été mis à jour le 9 avril à 11h15.