«Il doit y avoir encore plusieurs centaines de GPC au Québec qui n’ont pas demandé le transfert», estime Marc Flynn, directeur principal, Affaires réglementaires et normes d’accréditation au CSI. Ces conseillers ne paient pas la cotisation annuelle et n’ont pas à se conformer aux obligations de formation continue autres que celles de l’OCRCVM. Le Canada compte plus de 5 000 CIM, dont environ 800 au Québec.
Francis Sabourin fait partie de ces conseillers qui n’ont pas souhaité changer de titre. Le gestionnaire de portefeuille discrétionnaire chez Richardson GMP est devenu GPC en 2008. Il préfère conserver l’ancien titre, car «cela exprime bien ce que je fais, et le CIM ne dit pas grand-chose à grand monde», souligne-t-il.
«Nous renouvelons nos voeux tous les ans en adhérant au Code de déontologie des CIM et en payant nos droits de licence. La formation pousse un peu plus loin le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM), mais le titre est beaucoup moins difficile à obtenir que pour les détenteurs de la charte CFA. Il y a peu de collégialité et le CSI ne communique pas vraiment avec nous. Il n’y a aucune vie professionnelle autour de la désignation», déplore Vincent Cliche, CIM et conseiller en placement à la Financière Banque Nationale. Notons cependant qu’il existe en ligne un portail réservé aux CIM ainsi qu’un répertoire de tous ses membres.
CIM et gestion discrétionnaire
Par ailleurs, une autre source de confusion vient du fait que plusieurs CIM ne font pas de gestion de portefeuille discrétionnaire. Certains ne répondent simplement pas aux exigences de la firme de courtage qui les emploie. Pour d’autres, c’est un choix personnel. L’OCRCVM impose également ses propres contraintes relativement aux compétences et à l’expérience requises afin qu’un conseiller soit autorisé à exercer comme gestionnaire de portefeuille discrétionnaire. On doit ainsi obtenir le titre de GPC ou CIM ou encore, avoir réussi les trois volets du programme d’analyste financier agréé du CFA Institute.
«Un conseiller peut donc obtenir le titre de CIM, mais cela ne lui donnera pas automatiquement l’aval de la société pour avoir la désignation de Gestionnaire de portefeuille», confirme Martin Boulianne, directeur de succursale chez Richardson GMP. Pour faire de la gestion discrétionnaire, on devra remplir un document d’une vingtaine de pages qui détaille la formation et l’expérience du conseiller. On analysera la composition et la taille de la clientèle, y compris l’approche de construction des portefeuilles, la qualité de l’équipe de soutien, etc.
«Nous avisons nos conseillers qu’ils devraient satisfaire à nos exigences internes avant d’obtenir leur désignation CIM afin que les cours réussis auprès du CSI n’expirent pas avant d’avoir reçu l’approbation de la firme et de l’OCRCVM. Les conseillers sont toutefois responsables de faire le suivi de leur formation continue des désignations qu’ils possèdent», ajoute-t-il. Les candidats au CIM doivent effectivement faire leur demande dans un délai maximum de cinq ans après avoir réussi le cours de Méthode de gestion de portefeuille en plus d’avoir accumulé deux ans d’expérience professionnelle pertinente.
Chez BMO Nesbitt Burns, les CIM qui souhaitent faire de la gestion discrétionnaire devront notamment cumuler cinq ans d’expérience à titre de conseiller en placement. «Il faudra aussi avoir un minimum de 50 M$ d’actif sous gestion», précise Sylvain Brisebois, premier vice-président, directeur général et directeur régional, Est-du-Canada, et gestionnaire de portefeuille chez BMO Nesbitt Burns. «Certains de nos CIM vont préférer appeler les clients avant de négocier afin de mieux les éduquer sur les changements à apporter dans leur portefeuille. C’est une niche comme une autre et ces conseillers seront tout de même à honoraires», ajoute-t-il.
«La gestion discrétionnaire convient seulement à certains profils de conseillers, puisque les firmes seront davantage exposées au risque de poursuites. Historiquement, chez Assante, on a davantage embauché des planificateurs financiers puisque nous sommes plus orientés vers la planification financière que vers les investissements», indique Éric Lauzon, vice-président régional, développement des affaires, Gestion de patrimoine Assante. Leurs conseillers en placement qui sont CIM ne font pas de gestion discrétionnaire actuellement, puisque la firme n’a pas encore de plateforme de gestion de portefeuille qui le permet. Ce devrait être le cas vers la fin de 2018.
Formation continue
Et qu’en est-il de la formation continue du CIM : est-elle vraiment identique à celle des conseillers en placement qui sont des représentants inscrits auprès de l’OCRCVM ? Bien qu’il s’agisse dans les deux cas d’une formation de 42 heures sur un cycle de trois ans (30 heures de perfectionnement professionnel et 12 heures de conformité), des nuances s’imposent.
«Afin de simplifier la vie des conseillers en placement, le CSI a aligné son cycle de formation continue sur celui de l’OCRCVM. Ceci a pu prêter à confusion. Il faut donc s’assurer que ces heures de formation admissibles auprès de l’OCRVM le sont également pour nous», explique Marc Flynn, directeur principal, Affaires réglementaires et normes d’accréditation au CSI. Ainsi, certains cours en planification financière ou en assurance, par exemple, ne respecteront pas les critères de formation continue pour le CIM, mais pourraient être admissibles pour le représentant inscrit auprès de l’OCRCVM.
«Idéalement, on suit 42 heures de formation qui sont comptabilisées à la fois pour le conseiller en placement et pour le CIM afin de réduire les heures de formation continue à suivre par cycles de trois ans», ajoute-t-il. Une grande majorité des formations CSI sont d’ailleurs valables pour les deux entités. Mais n’oublions pas que les conseillers suivent également plusieurs formations à l’interne, sans oublier les conférences, séminaires et webinaires offerts par des tierces parties. Ces activités devront être reliées aux compétences exigées pour l’obtention du titre CIM. Notons que le CSI vérifie aléatoirement environ 10 % des détenteurs du titre CIM au moment du renouvellement de l’adhésion. Ils doivent alors présenter les documents attestant les unités de formation continue suivies (UFC).
On peut également s’interroger sur la pertinence de la formation continue pour ceux qui font au quotidien de la gestion de portefeuille discrétionnaire et qui détiennent le titre CIM. Nous avons posé la question à l’OCRCVM puisqu’il fixe les lignes directrices qui régissent le contenu, la durée et la difficulté des cours de formation continue des personnes autorisées (Règle 2900). «L’OCRCVM ne décerne, n’approuve ni n’avalise aucun titre professionnel», rappelle simplement Paul Howard, directeur des communications et des affaires publiques de l’organisme.
Si l’OCRCVM ne se prononce pas sur la valeur des titres professionnels des employés du secteur des services financiers au Canada, le régulateur s’attend toutefois à ce que les conseillers se tiennent à jour. L’OCRCVM fixe des normes de compétence pour les personnes inscrites travaillant dans les sociétés qu’il réglemente. De plus, «il revoit continuellement ces normes, avec l’appui du Comité sur l’éducation et les compétences, pour veiller à repérer et à donner suite aux occasions d’améliorer le contenu des cours, en collaboration avec le CSI, et pour s’assurer que ce contenu correspond aux réalités du marché», peut-on lire dans un bulletin aux investisseurs publié par l’OCRCVM.
«Il y a environ deux ans, nous avons révisé le profil de compétences des CIM en organisant deux groupes de réflexion (focus group) auprès de gens du détail et de l’institutionnel», précise Marc Flynn. La formation continue est également fonction de l’expertise qui est sous-jacente aux compétences nécessaires pour obtenir le titre de CIM et elle va s’adapter au fil du temps.