La vente approuvée des activités canadiennes de HSBC à Banque Royale du Canada (RBC) réduirait la concurrence dans le marché hypothécaire, déplore un stratège hypothécaire critique de la transaction.
Le stratège hypothécaire Robert McLister qualifie l’approbation de la transaction par le gouvernement Trudeau de « triste journée pour les emprunteurs hypothécaires ».
Il juge que HSBC Canada avait une approche différente de celle des grandes banques canadiennes. Il affirme que les grandes banques affichaient régulièrement des taux d’intérêt fixes et variables supérieurs de 20 à 80 points de base.
HSBC Canada pensait qu’elle pouvait compenser ses taux plus bas en attirant des « clients de qualité » qui faisaient moins défaut et détenaient plus d’actifs financiers, analyse Robert McLister.
« C’était un prêteur qui offrait des prix bas au quotidien, ce qui est extrêmement précieux sur le marché canadien », insiste le stratège, soulignant qu’il est difficile pour les plus petits joueurs du secteur financier d’accumuler des parts de marché au Canada, où les six grandes banques sont si dominantes.
La vente de HSBC Canada à RBC pour 13,5 milliards de dollars (G$) a franchi son dernier obstacle le 21 décembre dernier, en obtenant le feu vert de la ministre des Finances, Chrystia Freeland. La ministre a cité la conclusion du Bureau de la concurrence, publiée en septembre, lorsqu’elle a, elle aussi, approuvé la transaction, selon laquelle l’acquisition n’étoufferait pas la concurrence dans le marché hypothécaire, qui, selon elle, était « la plupart du temps dynamisé par la concurrence entre les cinq plus grandes banques ».
Le président et chef de la direction de RBC, Dave McKay, a dit, en entrevue qu’il existe une forte concurrence dans le secteur bancaire canadien et que l’accord ne la diminuerait « sous aucune forme ».
« Il y a une énorme concurrence dans le marché canadien. Il y a plus de 50 banques, il y a des coopératives financières dans chaque province qui livrent une chaude concurrence, il y a des concurrents non financiers. De nouveaux concurrents entrent constamment dans ce secteur », défend-il.
Pouvoir de négociation
Pour les Canadiens qui n’avaient pas l’intention de quitter leur banque, « le principal avantage de HSBC est qu’elle offrait aux emprunteurs des arguments dans leurs négociations », souligne Robert McLister.
« J’ai parlé à d’innombrables clients au fil des années qui allaient sur le site Internet de HSBC, trouvaient un taux et en discutaient, par la suite, avec leur banquier, raconte le stratège. En général, la banque n’offrait pas exactement le même taux, mais elle s’en rapprochait suffisamment pour éviter de perdre son client. »
HSBC a déclaré, au lendemain de l’annonce de l’approbation de la transaction, dans une brève mise à jour qu’elle et RBC continuaient de progresser vers la conclusion de la transaction. L’accord devrait être officiellement finalisé au premier trimestre 2024.
Son président et chef de la direction, Noel Quinn, a déclaré que même si HSBC est présente au Canada depuis de nombreuses années, « la réalité est que HSBC Canada ne détient qu’une part de marché d’environ 2 % et nous ne pouvons pas donner la priorité aux investissements nécessaires pour la développer davantage ».
« Il est donc dans l’intérêt supérieur des clients de HSBC Canada que la banque fasse partie de RBC, ce qui lui permettra de passer à un niveau supérieur », a-t-il déclaré dans un communiqué.
L’approbation de la ministre Freeland comporte des conditions pour RBC, notamment qu’aucun des 4 000 employés de HSBC Canada ne soit licencié dans les six mois suivant la date de clôture, ou dans les deux ans pour le personnel de première ligne. Les services bancaires doivent continuer à être fournis dans au moins 33 succursales HSBC pendant quatre ans.
RBC a également accepté de fournir 7 G$ de financement pour la construction de logements abordables à travers le pays dans le cadre des conditions d’approbation.
Le gouvernement fédéral a lancé une consultation sur le renforcement de la concurrence dans le secteur financier, qui examinera des questions, notamment celle de savoir si les fusions entre grandes banques devraient être formellement interdites et si le gouvernement devrait limiter la croissance des grandes banques par le biais d’acquisitions.
Plusieurs intervenants avaient demandé que le rachat de HSBC Canada par RBC soit bloqué, car cela réduirait la concurrence dans un secteur bancaire déjà fortement concentré, selon eux.
Keldon Bester, directeur général du Canadian Anti-Monopoly Project, croit qu’Ottawa a raté une occasion « de protéger la concurrence et l’abordabilité dans le secteur bancaire ».
« Même si les engagements liés au financement du logement abordable semblent positifs, il y a peu de moyens de protéger les propriétaires canadiens dans un environnement de taux d’intérêt plus élevés », dénonce-t-il dans un communiqué.
Keldon Bester juge qu’en approuvant la transaction, le gouvernement aurait pu obtenir des engagements visant à protéger les clients hypothécaires de HSBC contre les augmentations de taux lors de leur renouvellement. Au lieu de cela, il accuse le gouvernement d’avoir agi comme s’il « avait décidé de se contenter de bien informer les clients de HSBC de leurs options limitées à l’avenir ».
(Avec les informations de Ian Bickis)