Par ailleurs, note-t-elle, l’absence de rééquilibrage présentait le plus de risques, tant sur le plan de la volatilité que de la marge de déviation par rapport au rendement des indices de référence.

Autres coups d’oeil

À la BN, on a adopté un point de vue différent en partant d’un portefeuille composé à 50 % d’actions canadiennes et à 50 % d’obligations mondiales pour une période de 15 ans jusqu’au 31 décembre 2012.

On s’est demandé quels seraient les rendements de la pire période de 12 mois. Dans le cas du portefeuille rééquilibré, ils sont de – 9,3 % ; dans le cas du portefeuille non rééquilibré, de – 14,3 %, montre l’analyse.

Quant à l’analyse de Vanguard (The New York Times, 23 mars 2012), elle montre que dans un portefeuille composé en 1987 à 60 % d’actions et à 40 % d’obligations, la proportion d’actions, sans rééquilibrage, aurait gonflé à 71 % jusqu’à la fin de 2011. Si cette composition avait démarré en 1946, ce pourcentage serait passé à 97 %.

La norme historique, comme le montre la lecture de Vanguard, établit que les actions dominent les marchés, et que c’est leur proportion qui déséquilibre sans cesse les portefeuilles et en augmente le risque. Or, on pourrait penser qu’au cours des quatre dernières années, alors que les obligations ont dominé dans un marché très volatil, la portion des obligations a grossi, rendant les portefeuilles moins risqués – et tout aussi performants.

L’analyse de la BN tend à montrer le contraire. Un portefeuille de 100 000 $ répartis également entre actions et obligations le 1er janvier 2008, mais non rééquilibré, aurait valu 105 938 $ le 31 décembre 2012.

Sa version rééquilibrée aurait valu 115 032 $ à la même date.

Se donner une règle

À quelle fréquence faut-il rééquilibrer un portefeuille ? Certains le font automatiquement à intervalles de trois, six ou douze mois. À la BN, les portefeuilles gérés (wrap accounts) à caractère tactique sont systématiquement rééquilibrés tous les trois mois, les portefeuilles gérés à caractère stratégique, tous les six mois.

L’étude de Karen McRae n’indique aucun avantage plus marqué, qu’un rééquilibrage soit fait aux trois, six ou douze mois. Par contre, les frais de transaction peuvent gruger les gains. C’est pourquoi elle recommande de privilégier un rééquilibrage sans calendrier fixe, mais basé sur une règle qu’on se donne. Par exemple, rééquilibrer dès que la proportion d’une catégorie d’actif dévie de 5 % de sa cible.

Que pensent les conseillers financiers du rééquilibrage ? Quand ce sont les fonds communs qui le pratiquent, ils semblent le priser.

«La rétroaction qu’on reçoit de leur part est positive et ils sont conscients des avantages du rééquilibrage», avance Roland Sakha. Celui-ci dit qu’au cours des dernières années, on a assisté à une faveur croissante des portefeuilles gérés et des fonds de fonds, dans une grande mesure parce qu’ils sont rééquilibrés automatiquement et que les clients s’en trouvent satisfaits.

Cependant, les conseillers financiers pratiquent-ils le rééquilibrage ? «Le fardeau administratif peut être important pour celui qui le fait pour tous ses clients», constate Roland Sakha.

Or, le rééquilibrage n’entraîne pas l’adhésion de tous, même si l’on fait abstraction de ce fardeau administratif. «Il faut donner au gestionnaire la chance de faire son travail», juge Jean-Benoît Laurin, directeur adjoint, épargne, à l’Agence Labelle, qui compte 70 conseillers.

«Si on commence à rééquilibrer chaque fois qu’on a un gain de 3 %… Disons que je ne suis pas un adepte du repositionnement systématique.» Et d’ailleurs, ce n’est pas une pratique systématique chez les 70 conseillers de l’Agence.

Plutôt que le rééquilibrage, les conseillers pratiquent la réallocation. À intervalles réguliers, les conseillers revoient les portefeuilles avec leurs clients, à la lumière des objectifs de ceux-ci.

Selon le contexte financier et les prévisions de marché, on choisira, par exemple, de conserver une part de 60 % en obligations, mais en délaissant un peu les obligations gouvernementales pour donner une prépondérance plus grande aux obligations d’entreprise à plus haut rendement. Jean-Benoît Laurin trouve une telle pratique plus productive.

Cela n’enlève rien aux vertus du rééquilibrage qui peut, dans bien des cas, s’avérer un complément précieux pour préserver le profil de risque et de rendement d’un portefeuille.