Sondage élections : les conseillers choisissent les libéraux à 49 %

En ce qui a trait aux autres options de réponses offertes, la Coalition avenir Québec (CAQ) récolte l’appui des répondants à 27,8%, le Parti québécois (PQ) à 17,8% et Québec solidaire (QS) à 2,2%. Un total de 3,7% ont dit demeurer indécis. (Voir graphique 1)

À la question « À quel sujet général accordez-vous le plus d’importance? », les conseillers ont sans surprise ciblé l’économie comme priorité à 66,7%. Beaucoup plus loin, suivent la santé, 12,2%, l’éducation, 8,9%, le travail, 6,3% et les régions, 2,2%. Les services sociaux, l’environnement, la culture ainsi que la sécurité publique n’ont, quant à eux, guère reçu la faveur des répondants. (Voir graphique 2)

À notre troisième question, « Quels enjeux concernant l’industrie financière devraient, selon vous, occuper plus de place dans la campagne électorale québécoise 2014? », les représentants de l’industrie financière ont somme toute accordé un poids équilibré à tous les choix offerts. Néanmoins, les enjeux classés en ordre de grandeur, c’est celui de l’entreprenariat et de la relève qui s’est particulièrement démarqué, choisi en première place à 56,%% par les conseillers sondés. En terme d’importance accordée viennent ensuitre le Régime volontaire d’épargne-retraite (RVER), la littératie financière et assez loin en queue de peloton le Fonds d’investissement.

Plateformes et avis d’experts

Finance et Investissement a aussi examiné les plateformes électorales de QS, du PQ, du PLQ et de la CAQ tout en consultant trois analystes politiques. Nos loupes respectives se sont arrêtées sur quelques enjeux susceptibles d’intéresser les professionnels de l’industrie financière, mais consensus général : ils sont peu nombreux et l’aspect économique et surtout financier ne représente pas le nerf de la guerre de la campagne électorale provinciale 2014.

« Je crois qu’il y a normalement plus de place réservée à l’économie durant les campagnes électorales, mais de toute manière, il est rare qu’on y parle des questions importantes. Pourtant, quand on sonde les gens, la question identitaire est loin dans leurs priorités. Je n’ai pas noté grand chose pour l’industrie financière », mentionne d’entrée de jeu, Germain Belzile, maître d’enseignement à l’Institut d’économie appliquée à HEC Montréal.

Brett House, professeur de la faculté d’Économie et maître de recherche de la Fondation Jeanne Sauvé de l’Université McGill déplore qu’il n’y ait pas de « vraie discussion économique profonde » tout en précisant que « ce n’est pas exceptionnel puisque c’est ainsi dans la plupart des campagnes électorales ».

« À mon avis, les distinctions entre les plateformes économiques du PLQ, du PQ et de la CAQ sont minimes. On ne voit pas de grandes visions pour stimuler la croissance au Québec ou pour créer des secteurs stratégiques et des emplois. Il n’y a pas de grandes visions, ce sont plutôt des plateformes de gestion », exprime-t-il.

« Il n’y a plus d’argent. Ils ne sont pas capables d’aller en chercher d’autre. C’est à peu près impossible d’aller chercher des fonds supplémentaires », ajoute Germain Belzile pour expliquer la similitude et la minceur des régimes électoraux.

En même temps, souligne Michel Mailloux, enseignant à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM et spécialiste de la conformité en finance, les questions qui préoccupent les conseillers mentionnées dans notre sondage telle que la réglementation et la relève du secteur financier ne suscitent pas d’avance les passions parmi l’électorat.

« Peut-être que ce sont des enjeux soulevés pas les lobbys, mais je ne vois pas aucun politicien essayer de présenter cela dans un débat à la télévision. Les gens diraient :  »Il est complètement dans le champ celui-là!  ». Même si la réglementation financière et le problème des polices orphelines sont des réalités importantes, elles passent carrément sous le radar, car elles ne sont pas tangibles pour le particulier », souligne-t-il.

La question des lacunes en matière de littératie financières a certainement à y voir, fait-il aussi remarquer.

Comme exprimé par ces experts, dégager les éléments qui pourraient concerner vos clients s’apparentait à trouver l’aiguille dans la botte de foin. Il existe cependant des mesures à considérer et quelques engagements plus concrets et chiffrables dans les plateformes.

Parti libéral

(Voir p.2)

Parti libéral

Le PLQ promet de créer un régime épargne-propriété (REP) pour permettre aux contribuables d’« amasser la mise de fonds nécessaire à l’achat d’une première résidence principale ». Les montants déposés dans ce fonds seront déductibles d’impôt.

Vos clients pourront y déposer jusqu’à 5 000 $ par année pendant un maximum de 10 ans. L’argent épargné devra obligatoirement servir à l’achat d’une première résidence. Les contributions au REP ne réduiront pas les contributions admissibles au REER. Si les sommes accumulées dans le REP ne sont pas utilisées au terme des 10 ans, le montant pourra être versé dans un REER à l’intérieur des contributions maximales permises.

Les rouges veulent de plus mettre en place un crédit d’impôt pour la rénovation de 20 % jusqu’à un maximum de 2 500 $. La valeur minimale des travaux réalisés devra atteindre 3000 $.

Le Parti libéral y va aussi d’une promesse pour la clientèle aînée : il veut instaurer un crédit d’impôt remboursable de 20 % pour les activités physiques, artistiques et culturelles, jusqu’à concurrence de 200 $, destiné aux personnes âgées de plus de 60 ans, qui gagnent moins de 40 000 $ par année.

Mesure qui pourrait intéresser les investisseurs et entrepreneurs : afin de protéger les sièges sociaux québécois, le PLQ veut permettre au Fonds des générations d’accumuler qu’à 10% des actions d’une société ciblée par une offre d’achat.

Les libéraux prévoient également abolir la taxe santé de 200 $ mise en place sous la gouverne de Jean Charest et augmenter le tarif des garderies, présentement à 7 $, en les indexant à l’inflation à compter de 2015.

La faisabilité de leur cadre financier dépend d’une croissance économique espérée, 4,5 %, plus ambitieuse que celle du Parti québécois. Le PLQ mise entre autres sur la mise en place d’une « stratégie maritime » pour la développer. Le retour à l’équilibre budgétaire est porté à 2015-2016.

« Le Parti libéral mise plus sur la nécessité de réduire la dette de la province. Il s’engage à utiliser les surplus pour arriver à cette réduction plus rapidement que le PQ. C’est une des distinctions importantes. Selon moi, le PLQ est vraiment convaincu que la croissance à long terme et l’investissement ici au Québec reposent sur la nécessité de réduire la dette », dit Brett House. Il croit que le Parti québécois a présenté, en raison des ses objectifs de souveraineté, « un budget très prudent pour démontrer qu’il est un parti d’affaires capable de gérer la province dans une situation économique d’après crise ».

Parti québécois

Dans son budget présenté avant le déclenchement des élections le PQ avait eu la chance d’afficher quelque peu ses couleurs. Il annonçait de son côté hausser le tarif des garderies à 9 $ d’ici 2015.

En ce qui a trait à la question des sièges sociaux, le PQ a l’intention de changer la loi pour permettre l’adoption de droits de vote multiple pour les actionnaires pour protéger les sociétés d’offres d’achat hostiles. Le responsable des finances, Nicolas Marceau a aussi mentionné qu’il voulait donner des crédits d’impôts pour moderniser le secteur manufacturier.

Le PQ compte diminuer le taux du crédit d’impôt relatif à l’achat d’actions de Capital régional et coopératif Desjardins (CRCD) de 50 % à 45 %. La limite de souscription pour un client demeurerait à 5 000 $ par actionnaire.

La lutte à l’évasion fiscale est aussi abordée dans la plateforme du Parti québécois, sans toutefois que le document n’offre de précision sur la façon dont elle sera orchestrée différemment.

L’accent est davantage mis sur la réduction des dépenses consolidées. Leur croissance a atteint 3,7 % en 2013. Le PQ désire la ramener à 2,5 % en 2014 et à 2 % en 2015. Les péquistes sous Pauline Marois souhaitent, eux aussi, un retour à l’équilibre budgétaire en 2015-2016.

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Coalition avenir Québec

La Coalition avenir Québec est le seul parti qui se croit en mesure d’atteindre l’équilibre budgétaire pour la période 2014-2015. Il prévoit obtenir davantage de marge de manœuvre en réduisant significativement l’appareil administratif de l’État pour laquelle il compte aller chercher 2,3 G$.

Se targuant d’être le « parti des contribuables », la CAQ promet un remboursement d’impôt de 1000$ par famille d’ici cinq ans en éliminant progressivement la taxe santé et la taxe scolaire.

En ce qui a trait aux frais de services de garde, la CAQ les augmenterait aussi en les indexant à l’inflation, mais ne précise pas à partir de quand. Elle compte aussi réduire la hausse des tarifs d’électricité qui vient d’entrer en vigueur de 4,3 % à 2,2 %.

La plateforme de la CAQ ajuste aussi son focus sur les compagnies. Elle promet notamment de remettre en question les crédits d’impôt aux grandes entreprises. Une des mesures que le parti de François Legault considère déjà est de geler la moitié des crédits aux entreprises du multimédia de 20 %.

La Coalition compte également créer des « zones d’innovation » notamment dans la Vallée du Saint-Laurant qui ont le potentiel de stimuler la croissance du Québec.

Québec solidaire

Québec solidaire a entre autres pour objectif d’introduire un revenu minimum garanti, d’augmenter les dépenses en santé en éducation et pour le logement social.

Françoise David et les solidaires souhaitent conserver les tarifs de garderies à 7$ ainsi qu’éliminer la taxe santé. Pour financer leurs aspirations sociales, ils comptent mettre en place Pharma Québec, un programme d’achats groupés de médicaments et ainsi recueillir 1 G$.

D’autres revenus proviendraient d’impôts pour les entreprises et ceux des particuliers les plus nantis. QS veut réduire les contributions au Fonds des générations pour éponger déficit.

Au pouvoir, le parti instituerait « une banque d’État, soit par la création d’une nouvelle institution, soit par la nationalisation partielle du système bancaire » et réglementerait « le système banquier afin que les banques commerciales reviennent à leur fonction première d’intermédiation entre l’épargne et le crédit, que la spéculation, notamment sur les devises, soit interdite et que les frais administratifs imposés aux clients soit contrôlés », selon sa plateforme.

La prospérité du Québec serait soutenue notamment par l’investissement dans l’énergie verte et l’économie sociale.

Plaidoyer du réalisme

Les experts n’ont pas été étonnés des intentions de vote des conseillers illustrées par le sondage. Néanmoins, la tendance libérale traditionnelle des acteurs du secteur financier québécois ne signifie pas que les libéraux ressortent du lot en ce qui concerne leur stratégie économique, sauf par rapport à Québec solidaire.

Malgré qu’il déplore l’absence de grande vision à long terme, Brett House estime que les petites mesures pour les contribuables présentées par le Parti libéral, la Coalition avenir Québec et le Parti québécois sont équivalentes et peuvent être bénéfiques.

« C’est important de garder en tête le fait que nous sommes encore dans les derniers mois de la crise. ll y a un élément temporel qui est lié à chaque mesure. Les propositions qui ne sont pas des mesures à long terme peuvent créer des conditions pour relancer la croissance. Même si elles ne créent pas de la croissance durable, on doit faire des choses à court terme qui peuvent aider l’économie à atteindre une bonne vitesse de croisière », dit-il.

Germain Belzile affirme de son côté que les effets de la crise économique de 2008 sont derrière nous au Québec et que pour assurer la croissance de la province, les partis devront faire des choix plus drastiques : « On veut tout avoir, une croissance économique, des revenus élevés, beaucoup de programmes, des taux d’imposition faibles, un équilibre budgétaire du gouvernement et même un resserrement de la dette. C’est de la magie qui est souhaitée! »

Pour les enjeux en matière de réglementation du secteur financier, Michel Mailloux, estime pour sa part qu’ils devront être davantage mis de l’avant dans le futur « Tous les partis vont devoir s’y mettre. Si le public se sent mal protégé, ce sont les conseillers qui en subissent les conséquences parce que les clients vont aller vers les grandes institutions financières et délaisser les cabinets. »

Les données du sondage ont été recueillies auprès d’un échantillon non-probabiliste de 270 lecteurs de Finance et Investissement entre le 26 au 31 mars 2014 de façon confidentielle et volontaire.

Photo Bloomberg