Selon toute apparence, tout semble bien aller sur le marché. À la fin de la semaine dernière, le Dow Jones Industrial Average a gagné 779,74 points, soit 3,3 %, pour terminer la semaine à 24 465,16, tandis que l’indice S&P 500 a augmenté de 3,2 %, à 2955,45, et le Nasdaq Composite a grimpé de 3,4 %, à 9324,59, relève un article du Barron’s.

La semaine a offert également de nombreuses raisons de se montrer optimiste. À commencer par le discours optimiste du président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, lors d’une interview dans le cadre de l’émission 60 Minutes. Ensuite Moderna a révélé avoir fait un essai de vaccin pour la COVID-19 sur huit patients dont les résultats semblent montrer une certaine efficacité. Et finalement de nombreux pays, États aux États-Unis et provinces au Canada, se déconfinent gentiment. Ces bonnes nouvelles ont permis au S&P 500 de clôturer proche de son plus haut niveau depuis le 6 mars.

Toutefois, Ben Levisohn, rédacteur en chef adjoint chez Barron’s et ancien courtier en Bourse, estime que ce n’est pas forcément assez pour se relancer sans souci dans le marché. Il relève que, malgré cette hausse, le marché n’a pas progressé. Il note ainsi que le S&P 500 n’est pas vraiment allé très loin depuis son sommet d’avril de 2939,51. Du 29 avril au 22 mai, l’indice n’a gagné que 0,5 %, soit moins que sa moyenne quotidienne de 1,2 % dans les deux sens depuis lors.

Pour Robert Buckland, stratège chez Citigroup, ce manque de progression s’explique. Selon lui, le S&P 500 est coincé entre deux forces concurrentes. D’une part, il y a les 6 000 milliards de dollars d’achats d’actifs par les banques centrales dans le monde entier qui ont créé une offre sur le marché. D’autre part, il y a l’offre, qui pourrait entraîner une baisse de 50 % des bénéfices mondiaux en 2020.

Cette bataille entre deux forces serait particulièrement visible lorsque l’on constate où se situe le S&P 500 par rapport à ses moyennes mobiles de 50 et 200 jours. La moyenne sur 50 jours, qui est une mesure à court terme de la tendance du marché, se situe aux alentours de 2730 et devrait offrir un certain soutien au marché. La moyenne sur 200 jours, en revanche, se situe à 3 000 et offre une résistance évidente.

Selon l’histoire, lorsque cette situation se présente, il y a de fortes chances qu’ensuite on assiste à une baisse. Selon Jason Goepfert, de Sundial Capital Research, c’est la trentième fois depuis 1928 que le S&P 500 stagne entre les deux moyennes mobiles pendant au moins 20 jours. Lors des 29 fois précédentes, le S&P 500 a franchi 21 fois la barre des 50 jours à la baisse et seulement huit fois celle des 200 jours à la hausse, ce qui suggère qu’il y a 72 % de chances que le prochain mouvement soit à la baisse.

Jason Goepfert précise également que, même si le S&P 500 parvient à franchir sa moyenne mobile de 200 jours, dans le passé, l’indice a constamment baissé au cours des six mois suivants, avec une baisse moyenne de 12,7 %.

« Le problème, c’est que les acheteurs n’ont pas montré suffisamment de dynamisme pour progresser ces derniers temps, écrit-il. Lorsque cela se produit pendant des marchés à la baisse comme ceux dans lesquels nous avons été, avec une longue période proche, mais inférieure à la moyenne de 200 jours, cela indique des problèmes plus importants et cela a presque toujours signifié une nouvelle faiblesse à venir ».

Ben Levisohn cite également David Rosenberg, stratégiste en chef de Rosenberg Research, qui lui se montre également pessimiste, mais pour une toute autre raison. Il a ainsi décomposé le marché en indices représentants les thèmes qui animent les actions actuellement et qui montrent qu’il n’y a pas autant de déconnexion entre l’économie et les marchés que beaucoup peuvent le penser.

Ben Levisohn estime donc que si les résultats ne sont pas encore clairs, les risques eux sont connus. Il pense ainsi à une deuxième vague du virus qui pourrait frapper à l’automne, au fait que la récession sera la plus profonde depuis la Grande Dépression et finalement, que les tensions entre les États-Unis et la Chine, qui ont terminé la semaine en proposant de nouvelles mesures de sécurité visant Hong Kong, vont presque certainement faire partie du paysage de façon permanente.

Selon lui, les résultats pourraient être bien meilleurs que prévu, mais ils pourraient aussi être bien pires. Il estime donc que c’est un mauvais moment pour acheter.