Dans un communiqué, Mandeville expliquait que ses représentants pourraient prochainement négocier directement sur sa plateforme Dataphile, de Broadbridge. Les transactions seront exécutées par l’intermédiaire de sa filiale Mandeville Private Client, membre de l’OCRCVM, grâce à un partenariat avec Fidelity Clearing, qui se chargera du règlement des opérations et de la garde de valeurs.

Nos recherches sur ce sujet nous ont menés sur la piste d’un groupe qui développait un projet visant à permettre aux représentants de courtiers en épargne collective d’offrir des FNB. Qui se trouve à la tête de cette démarche ? L’Association canadienne des fonds négociés en Bourse (ACFNB).

Pour l’instant, deux obstacles se dressent face au projet de l’ACFNB. L’aspect technologique, pour lequel une solution serait imminente. Et de façon plus importante, la détermination de la position des différents régulateurs canadiens.

Je vous invite à lire le texte de Marie-Claude Frenette en une de ce journal. Dans «Fonds négociés en Bourse : bientôt offerts par des distributeurs de fonds communs ?» l’exemple de Mandeville illustre bien la complexité de la réglementation de ce projet.

«Dans le cas de Mandeville, plusieurs acteurs sont impliqués, note Erin Seed, avocate chez Borden Ladner Gervais. Fidelity Clearing est réglementée exclusivement par l’OCRCVM, tandis que Mandeville et ses représentants le sont par l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM) et la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO). La question politique ici est : « Qui acceptera qu’une autre juridiction prenne le dessus sur ces transactions ? »» Les discussions, à peine amorcées, risquent d’être assez longues…

Est-ce pertinent ?

Cependant, la question la plus importante, à mon avis, est «ce projet aura-t-il un impact positif sur l’industrie ?»

Aux représentants en épargne collective, cela apporterait une autre gamme de produits à leur offre globale. Ce sera à eux de juger si les FNB sont utiles ou non pour leurs clients.

Quant aux clients, je crois qu’on supprime une sorte de paradoxe. Aujourd’hui, tout le monde a accès facilement aux FNB par l’intermédiaire des comptes de courtage à escompte. Bref, le client qui s’y intéresse vraiment peut en négocier en quelques clics, mais sans conseils. N’est-il pas préférable qu’il intègre les FNB sous la supervision de son conseiller ? Poser la question, c’est y répondre, à mon avis.

Pour les cabinets, selon les modalités du projet, cela pourrait toutefois devenir un casse-tête. Imaginons qu’un cabinet et ses représentants, actuellement surveillés à la fois par l’Autorité des marchés financiers et la Chambre de la Sécurité financière, devraient ajouter une troisième entité, soit l’OCRCVM. Bref, il faudra éviter d’alourdir encore le fardeau administratif.

Les sociétés de fonds, elles, se retrouveraient avec un produit concurrent mieux distribué. Du moins, en principe.

En effet, même si les 23 000 représentants en épargne collective avaient accès du jour au lendemain aux FNB, combien d’entre eux les utiliseraient vraiment ? Car à l’exception de ceux qui ont une pratique à honoraires, la structure de rémunération de la grande majorité des conseillers n’est pas adaptée à celle des FNB, dont la plupart n’offrent pas de commissions. De plus, dans un avenir rapproché, la distinction entre la gestion active et la gestion passive fera en sorte que ces deux types de fonds devraient continuer d’évoluer en complémentarité.

Il ne faut pas en douter, s’il se réalise, ce projet augmentera le taux d’adoption des FNB par les conseillers au pays.

Peter Intraligi voit ce projet d’un bon oeil. Le président et chef de l’exploitation d’Invesco Canada, qui offre à la fois des fonds communs et des FNB, croit que les conseillers pourront rapidement s’adapter à cette nouvelle gamme de produits et juger de leur pertinence ou non pour leurs clients.

«Nous ne ferions pas la promotion de l’utilisation de FNB auprès des représentants en épargne collective si nous ne pensions pas que les conseillers sont à la hauteur, dit-il en entrevue à notre journaliste Léonie Laflamme-Savoie. Nous avons des programmes de formation dans tout le pays.»

Peu importe où cela nous mènera, il sera intéressant de suivre l’évolution de ce projet. Les discussions pourraient façonner l’avenir de l’industrie, et qui sait, peut-être ramener à l’ordre du jour l’idée de fusionner les titres de conseiller en placement et de représentant en épargne collective.