Or, on n’a pas besoin d’avoir un permis particulier pour offrir ces types de régimes collectifs, souligne Line Lippé, vice-présidente, ventes, régimes collectifs, chez Placements Mackenzie, à Montréal.
«Tout conseiller qui possède un permis de base de courtage en épargne collective ou un permis en rente collective en produits d’assurance est autorisé à offrir ses services pour implanter de tels régimes», dit-elle.
Il faut noter une nuance, reconnaît Line Lippé : plutôt que de REER ou de CELI collectifs, il est plus juste de parler d’un éventail de REER ou de CELI individuels, puisqu’il s’agit alors de vendre une série de REER ou de CELI à autant d’investisseurs individuels travaillant au sein de la même entreprise.
En effet, afin d’offrir des produits et des services-conseils relatifs aux régimes de rentes collectives, comme des REER collectifs, le représentant doit détenir un permis en régimes de rentes collectives, dans la discipline assurances collectives, souligne Sylvain Théberge, porte-parole de l’Autorité des marchés financiers (AMF).
Selon Line Lippé, peu de conseillers sont très actifs dans la vente de ces produits destinés à un groupe d’employés.
«Souvent, note-t-elle, ceux qui en ont comptent seulement un ou deux clients entrepreneurs à titre de clients individuels et ils offrent par extension les solutions collectives à leurs employés.»
Or, parmi les conseillers financiers, même les vieux routiers ont avantage à aborder rapidement le sujet du RVER et des options alternatives, soutient Gino Savard, président de Mica services financiers et de Mica Capital : «Ils risquent de se fragiliser auprès de leurs clients en négligeant de leur en parler.»
Toutefois, «c’est aux jeunes conseillers en voie de se constituer une clientèle que le RVER offre la plus belle occasion», insiste Line Lippé.
L’avantage du conseiller
Un conseiller qui aborde la question avec des entreprises aura l’occasion de leur offrir une alternative au RVER. Dans une même entreprise, il peut récolter d’un coup dix ou vingt clients, et même plus.
Une fois de telles ventes signées, «ce sont les ventes croisées qui sont intéressantes par la suite avec les produits d’assurance ou d’épargne-études et les REER, souligne Line Lippé. C’est là qu’il pourra y avoir plus de potentiel de vente pour les conseillers.»
Sans doute, les RVER qui seront offerts sur le marché proposeront-ils des frais de gestion très bas, de l’ordre de 1 à 1,5 % prévoient nos interlocuteurs. Il s’agit bien sûr de frais qu’une offre de REER peut difficilement concurrencer.
Par contre, le conseiller qui proposera des alternatives en épargne collective pourra mettre de l’avant quelques avantages notables, fait valoir Sylvain De Champlain, président de De Champlain Groupe Financier, à Montréal.
Premièrement, le représentant pourra enlever à l’employeur un poids administratif dont ce dernier, peut-on supposer, voudra volontiers se décharger. Ses lumières pourront être précieuses pour un employeur dont ce n’est certainement pas la spécialité, surtout dans le choix des produits d’investissement les plus appropriés pour les employés de l’entreprise.
Deuxièmement, il pourra offrir tant à l’employeur qu’à l’employé un service personnalisé. «Avec un RVER, on peut s’attendre à ce que les employés aient comme seul service une ligne 800 auprès de l’administrateur du régime», note Sylvain De Champlain.
Le conseiller disposera d’une brochette beaucoup plus étendue de fonds d’investissement que l’offre restreinte d’un RVER.
Faire vite
Les conseillers que de telles perspectives de vente intéressent ont tout avantage à agir rapidement. Car, à partir du moment où la loi entrera en vigueur, soit peut-être dès janvier 2014 [Lire le texte «RVER : Vers l’épargne universelle» en page 6], les employeurs auront seulement deux ans pour implanter un RVER d’après le projet de loi.
C’est dire que dès l’entrée en vigueur de la loi, le terrain sera rapidement envahi par les grandes institutions financières.
Plusieurs de celles-ci n’atten-dent que le signal pour sauter dans l’arène. «On sera là dès le départ et on a déjà des scénarios en place, c’est certain !» affirme Éric Filion, vice-président, développement et commercia-lisation, épargne-retraite collec-tive, chez Desjardins Assurances. D’autres groupes pourraient en dire autant sans hésiter, notamment Financière Sun Life et Industrielle Alliance.
Par ailleurs, le jour où le signal de départ sera donné, les services de marketing et de publicité des grands groupes risquent de noyer le marché d’informations partielles ou fausses, juge Sylvain De Champlain.
Les entreprises pourraient «avoir l’impression qu’elles sont obligées de souscrire à un RVER, qu’aucune autre avenue que le RVER ne leur est accessible», craint-il.
De plus, une fois mises en branle, les grandes institutions se démèneront pour occuper toute la place. «Elles procéderont en se servant du RVER comme loss leader, puis s’empresseront de vendre des assurances diverses ou d’autres produits», prédit Sylvain De Champlain.
C’est donc l’occasion ou jamais d’offrir des alternatives au RVER. Sinon, soumet Line Lippé, «on assistera à la mise en place du RVER mur à mur».