Comme le soulignait l’organisme de réglementation dans un document de consultation daté du 18 août, «il importe que le secteur canadien fasse cette transition en même temps que les marchés américains, faute de quoi les marchés des capitaux du Canada se trouveraient en mauvaise posture, compte tenu de l’interdépendance de nos marchés».
Afin de faciliter cette transition, les ACVM souhaitent donc recueillir l’avis des acteurs de l’industrie quant à la gestion d’une possible hausse des défauts de règlement. On veut savoir quelles améliorations opérationnelles devraient être apportées. Parmi les titres assujettis à la règle figurent les actions, les obligations de sociétés, les fonds communs, les fonds distincts et les fonds négociés en Bourse.
L’abrègement du cycle de règlement de trois à deux jours est déjà chose faite dans une majorité de marchés en Europe. L’Australie et la Nouvelle-Zélande ont emboîté le pas au printemps 2016. Dans d’autres marchés comme celui de l’Asie-Pacifique, le cycle est de deux jours, parfois même un jour.
«Une telle harmonisation va diminuer la complexité des opérations et les coûts des firmes qui ont d’importantes activités transfrontalières. Le Canada ne peut pas se permettre de faire bande à part», souligne Jack Rando, directeur général de l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM).
«En Europe, il est déjà question d’un cycle de règlement T+1. On peut présumer qu’un jour ce sera aussi le cas chez nous», observe Sylvain Brisebois, premier vice-président et directeur régional, Est-du-Canada, chez BMO Nesbitt Burns.
«On effectue tellement de transactions avec les marchés américains que le fait d’adopter le même cycle qu’eux simplifiera les choses. On pourra ainsi vendre des actions de Bell Canada et acheter celles de Disney durant la même journée. Il n’y aura pas de délai entre les règlements des deux transactions», illustre-t-il.
En réduisant le délai entre la date de la transaction et son règlement, on diminue notamment le risque de contrepartie, c’est-à-dire le risque que la contrepartie ne fasse défaut avant le règlement. Le risque de marché peut également être atténué, puisqu’on raccourcit la période durant laquelle la valeur marchande du sous-jacent peut bouger, ce qui nécessite, dans le cas de mouvements importants, des appels de marge.
Selon Jack Rando, les pays qui ont effectué la transition vers un cycle de règlement plus court ont démontré une plus grande efficacité de leurs marchés, et même une réduction des défauts de règlement et des risques qui y sont associés. «Ceci dit, les acteurs du marché devront prendre les dispositions nécessaires afin d’assurer une transition en douceur», ajoute-t-il.
Ainsi, certaines firmes devront faire une mise à niveau de leurs systèmes informatiques. «Certaines pratiques vont changer, notamment en ce qui concerne le traitement des transactions, l’administration des actifs et la documentation. Cette transition augmentera notamment la pression exercée sur les firmes afin d’affirmer (ou de confirmer) les transactions le plus rapidement possible, préférablement le jour même où celle-ci a lieu», observe Jack Rando.
Plusieurs phases de tests sont également prévues, notamment durant les premiers trimestres de 2017. «Dans notre cas, la période de tests à l’interne est déjà commencée, les investissements nécessaires à la mise en oeuvre de ces changements sont faits. Des essais plus officiels seront également effectués entre les mois de mars et août 2017. Pour le conseiller, le système transactionnel tiendra tout simplement compte de ce nouveau délai», explique Sylvain Brisebois.
«Dans la grande majorité des cas, lorsqu’un client effectue un achat, l’argent est déjà dans son compte. Lorsqu’il a besoin de liquidités rapidement, les transactions se régleront une journée plus tôt et cela lui permettra d’avoir son argent plus vite», confirme Sylvain Brisebois.
«Les conseillers devront éduquer leurs clients sur ces nouvelles pratiques de l’industrie afin qu’ils comprennent comment cela les touchera», remarque Jack Rando.
En fin d’année, les firmes rappelleront à leurs conseillers les dates limites pour vendre des titres lorsque leurs clients souhaitent cristalliser des pertes en capital latentes. «Des communications internes ont déjà été envoyées aux conseillers, et selon les différents congés au Canada et aux États-Unis, on indiquera les dernières dates possibles de transactions qui tiendront aussi compte de ce nouveau délai de règlement», dit Sylvain Brisebois.
«Lorsque nous avons fait la transition d’un cycle de T+5 à T+3 en 1995, tout s’est bien passé. L’industrie était prête, et cela n’a rien changé pour les conseillers et leurs clients. Ce sera la même chose cette fois-ci. Quelques semaines après l’adoption de ce nouveau délai, on n’en entendra plus parler», croit-il.