Lundi, Marc Dalpé et Jean-Marc Milette ont déposé une poursuite de 6,2 M$ contre VMD pour congédiement abusif devant la Cour supérieure de Montréal. Cette requête s’ajoute à celle de Benoit Leclerc et Carol Jean, deux conseillers de Rivière-du-Loup qui réclament conjointement 2,8 M$, et celle de Daniel Bergeron, un conseiller de Sherbrooke, qui demande 1,08 M$.
Tout comme Marc Dalpé et Jean-Marc Milette, les trois estiment aussi être victimes d’un congédiement abusif. On ignore pour le moment si les quatre autres conseillers congédiés entameront également des poursuites.
En novembre 2011, VMD congédiait simultanément neuf conseillers, qui menaient leurs activités dans différents endroits au Québec. Le courtier les soupçonnait alors d’avoir effectué des activités de courtage à son insu dans des comptes off shore aux Bahamas. Plusieurs conseillers congédiés contestent ces allégations et prétendent que VMD aurait été au courant de leurs activités, d’après les différentes requêtes introductives d’instance.
Voici les informations qu’on peut lire dans les trois dossiers déposés devant la Cour supérieure.
Marc Dalpé et Jean-Marc Milette
Selon la requête déposée par Marc Dalpé et Jean-Marc Milette, ceux-ci auraient informé VMD de cinq ou six clients ayant des comptes à l’étranger et pour lesquels ils auraient touché une rémunération hors registre. En novembre 2011, VMD niait toutefois l’existence de ces discussions, d’après une déclaration sous serment de Sylvain Perreault, chef de la conformité au Mouvement Desjardins, dont faisait état Finance et Investissement en 2011.
Selon la requête des deux conseillers, VMD aurait tenté de renégocier leurs contrats de travail en août 2011. Les pourparlers à cette fin se seraient terminés dans une impasse. En novembre 2011, VMD les remerciait pour leurs implications concernant les quelques comptes à l’étranger.
« Le motif invoqué par VMD n’est en réalité qu’un prétexte pour mettre fin aux contrats des demandeurs sans préavis et tenter de s’accaparer leur clientèle », allèguent Marc Dalpé et Jean-Marc Milette, dans leur requête.
D’après ce document, Marc Dalpé et Jean-Marc Milette entendent démontrer devant la Cour que « VMD embauche régulièrement et garde à son emploi des conseillers trouvés coupables de manquements beaucoup plus graves ».
Selon la requête, le congédiement leur a causé la perte de clients, ce qui a entraîné des pertes financières. Pour les 10 premiers mois de 2011, les revenus d’emploi de Marc Dalpé et Jean-Marc Milette s’établissaient chacun à 250 000 $ par mois. Après leur congédiement, ils sont passés chez Richardson GMP où ils gagnent chacun 75 000 $ par mois.
Rappelons qu’en mars dernier, Marc Dalpé a reconnu avoir, entre novembre 2007 et octobre 2011, détenu des autorisations de transiger et exercé un pouvoir discrétionnaire sur les comptes de certains de ses clients hors des registres de son employeur selon une entente de règlement avec l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM). Quant à Jean-Marc Millette, celui-ci a contrevenu aux règles de l’OCRCVM en permettant à son associé, Marc Dalpé, de détenir de telles autorisations durant cette période.
Pour ces contraventions, les conseillers Marc Dalpé et Jean-Marc Milette ont écopé d’une amende de 15 000 $ chacun, en plus de devoir rembourser les honoraires de gestion respectifs de 75 000 $ et 52 500 $ qu’ils ont touché pour ces activités.
Carol Jean et Benoit Leclerc
Dans leur requête, Carol Jean et Benoit Leclerc soutiennent qu’ils n’ont pas déclaré leur implication concernant le compte d’un seul client par « omission involontaire ». De 2004 à 2009, ils ont touché chacun moins de 7000 $ en commission pour ce compte.
« Cette omission involontaire ne constitue pas un motif sérieux de congédiement. Il sera d’ailleurs démontré que par le passé que [Carol Jean et Benoit Leclerc] ont dénoncé à VMD des situations bien plus problématiques concernant la manière dont certains conseillers géraient l’actif de leurs clients et ces conseillers sont toujours à l’emploi de VMD », lit-on dans leur requête introductive. Dans sa défense, VMD nie ces allégations.
En congédiant Carol Jean et Benoit Leclerc, ceux-ci allèguent que « VMD a cherché à mettre la main sur [leur clientèle] et à les priver de leur gagne-pain sans compensation ». VMD nie cette assertion. Travaillant aujourd’hui auprès de la Financière Banque Nationale, ils ont dû regagner la confiance de leurs clients.
« Cette situation a causé de l’angoisse aux demandeurs, a diminué leur estime d’eux-mêmes et les a affectés sur le plan psychologique : plusieurs mois après leur congédiement, ils en ressentent encore les effets », lit-on dans la requête.
Pour les dix premiers mois de 2011, la rémunération de Carol Jean s’élevait à 220 000 $ et celle de Benoit Leclerc, à 278 000 $, alors que leur rémunération annuelle actuelle est évaluée à 100 000 $ chacun, selon la requête.
Dans sa défense, VMD souligne qu’elle était en droit de s’attendre aux plus hauts standards en matière d’éthique et que les omissions de Carol Jean et Benoit Leclerc justifiaient leur congédiement. « Compte tenu de leur expérience et des fonctions qu’ils occupaient, les demandeurs ne pouvaient ignorer qu’il était interdit de détenir des comptes externes non déclarés aux Bahamas ni d’y toucher des commissions non déclarées », lit-on dans la défense.
Daniel Bergeron
Dans sa requête, Daniel Bergeron estime aussi avoir été congédié de manière abusive. Il affirme ne jamais avoir transigé de compte offshore pour un client, le seul compte de la sorte étant le sien. Il a fait une demande pour fermer son compte en septembre 2011 et dit qu’il croyait qu’il n’avait pas l’obligation de déclarer ce compte à VMD.
« VMD savait que Bergeron possédait ce compte, l’a toléré et ne l’a jamais averti de quelques manières que ce soit qu’il devait se débarrasser de ce compte off shore initié par VMD selon la procédure établie par cette dernière », allègue la requête.
« VMD n’a pas appliqué les mêmes règles à tous ses conseillers en placement qui détenaient des comptes off shore, ainsi, plusieurs conseillers en placement qui détenaient des comptes off shore n’ont pas été congédiés », lit-on dans le document.
Selon la requête, VMD a congédié Daniel Bergeron afin de le « priver […] de son gagne-pain ». Après son congédiement, Daniel Bergeron a vécu sept mois de chômage devant vendre sa voiture pour financer ses dépenses.
« Au moment de son congédiement, Bergeron avait une conjointe avec qui il vivait en harmonie depuis 13 ans. L’inquiétude, le stress et l’insécurité financière ont eu comme conséquence la terminaison de cette relation », apprend-on dans la requête.
Desjardins réplique
En entrevue avec Finance et Investissement, André Chapleau, porte-parole de Desjardins n’a pas voulu commenter les différentes affirmations formulées dans ces requêtes, soulignant que « ce ne sont que des allégations ». Rappelant que ces dossiers sont actuellement en Cour, il a souligné laconiquement que VMD allait « se défendre vigoureusement ».
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