
Bien que les journées de 12 heures et la frénésie des cotisations de dernière minute à la fin de la saison des REER, typiques d’il y a 20 ans, appartiennent désormais au passé, une chose reste inchangée.
« Les gens détestent vraiment payer des impôts, souligne Nathan Clarke, associé et conseiller chez MCO Wealth, basé à Richmond Hill, en Ontario. Habituellement, les gens trouvent l’argent nécessaire pour cotiser à leur REER ou, bien souvent, ils augmentent leurs cotisations à leur REER de travail. »
Bien que la technologie, les nouvelles options de compte enregistré et les efforts des conseillers pour inciter les clients à cotiser régulièrement à leur REER aient rendu la saison des REER moins mouvementée, Nathan Clarke et d’autres conseillers, que la rédaction d’Avisor.ca a approchés, ont déclaré que la saison de cette année a été comparable à celle des dernières années.
La technologie permettant les réunions virtuelles et l’accès aux comptes adoptée pendant la pandémie de COVID-19 a permis de gérer plus efficacement un volume de travail important, observe Nathan Clarke.
La pandémie « a forcé beaucoup d’institutions financières, dont la technologie était très ancienne, à la mettre à jour […] à un niveau raisonnable », explique-t-il.
« La saison des REER est celle où nous effectuons le plus de transactions parmi toutes les périodes de deux mois de l’année. »
Gabriel LeClerc, conseiller chez Edward Jones à Arnprior, en Ontario, estime que c’est toujours la période de l’année où les clients sont les plus engagés parce que la date limite de cotisation au REER du 1er mars (cette année, le 3 mars) est « imprimée » dans leur esprit.
« J’entends constamment d’autres conseillers dire que la saison des REER n’est plus ce qu’elle était ». Mais Gabriel LeClerc, qui a plus de 25 ans d’expérience dans le secteur des services financiers, affirme qu’en considérant l’ensemble des réunions, des cotisations supplémentaires et des autres communications, il a constaté un engagement avec les clients en croissance de 50 % cette année. Il ajoute que cette période est le moment idéal pour vérifier si les clients sont sur la bonne voie pour atteindre leurs objectifs, pour examiner si leurs objectifs ou leur tolérance au risque ont changé, et pour mettre à jour leurs plans financiers.
Dave Hamilton, planificateur financier agréé chez IG Wealth Management à Sicamous, en Colombie-Britannique, affirme que cette année a été plus chargée que les deux précédentes.
« Je pense que cela est dû au fait que de plus en plus de clients font un effort conscient pour gagner plus dans un contexte où l’inflation continue de faire croître le coût de la vie, analyse-t-il. Les marchés ayant été néanmoins solides, davantage de clients ont investi avec confiance pour leur avenir. »
Les préoccupations liées au coût de la vie ont toutefois incité certains clients à adopter des activités annexes, observe Dave Hamilton, de sorte qu’ils utilisent le REER pour réduire les impôts prélevés sur des revenus qui s’avèrent plus élevés que prévu.
Josh Hosein, planificateur de patrimoine senior chez Baun & Pate Investment Group, Wellington-Altus Private Wealth à Calgary, indique que son cabinet enregistre à peu près le même volume d’affaires cette année que les précédentes. Toutefois, il signale qu’un plus grand nombre de personnes ont pris l’habitude de verser des cotisations régulières, de sorte qu’il est moins nécessaire de verser de grosses sommes forfaitaires en début d’année, comme c’était souvent le cas auparavant. Au lieu de cela, les conseillers de Baun & Pate aident leurs clients à déterminer s’ils peuvent effectuer un « versement complémentaire » pour ramener le solde d’impôt à payer à près de zéro pour l’année.
L’importance des cotisations régulières, qui permettent de tirer parti de l’étalement du coût de l’argent, n’a cependant pas été comprise par tout le monde. Dave Hamilton estime que moins d’un tiers des clients de son cabinet qui sont engagés dans une planification de leur retraite ont souscrit à des cotisations automatisées ou planifiées.
« Il est important de noter que nombre de ces clients sont des membres de la famille de nos clients les plus importants et qu’ils ne sont peut-être pas aussi engagés que nous le souhaiterions, rapporte Dave Hamilton dans un courriel. Toutefois, parmi nos clients préretraités engagés, plus de 70 % ont souscrit à des cotisations automatisées ou planifiées. »
Parfois, c’est simplement parce qu’il existe de meilleures alternatives, comme le CELI, pour les clients dont le revenu se situe dans les tranches inférieures, ou parce que les objectifs qui ne concernent pas la retraite sont plus importants pour ces clients.
« Bon nombre de nos clients privilégient les comptes d’épargne libre d’impôt plutôt que les REER, à moins qu’ils ne soient dans une situation de revenu élevé, dit-il. En outre, bon nombre de nos clients en préretraite bénéficient d’un programme de cotisation de la part de leur employeur, ce qui les incite souvent à opter pour un CELI ou éventuellement à cotiser au REER de leur conjoint, puisqu’ils cotisent déjà suffisamment dans le cadre du régime de leur employeur. »
Autres types de comptes
« L’une des grandes différences — et cela s’explique en partie par la planification que nous faisons pour nos clients — est qu’il n’est pas nécessaire de tout mettre dans un REER », explique Josh Hosein.
Pour les jeunes clients qui planifient d’acheter leur première maison, il est plus logique de se tourner vers un CELIAPP avant un REER, car ils conservent ainsi leur droit de cotisation pour cette année, bien et l’argent fructifie néanmoins à l’abri de l’impôt, explique-t-il.
Avant l’introduction du CELIAPP en 2023, la plupart des jeunes clients qui achetaient leur première maison transféraient de l’argent de leur REER au régime d’accession à la propriété (RAP). Cet argent devait toutefois être éventuellement remboursé dans le REER.
Selon Josh Hosein, de nombreux clients de Baun & Pate ont adopté les CELIAPP. Les jeunes investisseurs y versent leur propre argent, et les parents ainsi que les grands-parents peuvent aussi effectuer des dons, que le détenteur du CELIAPP pourra alors verser à titre de cotisation. Le détenteur du CELIAPP est en effet la seule personne autorisée à y cotiser, contrairement à ce que l’on observe avec le REER, alors qu’il est possible de cotiser au REER de son conjoint.
« Nous constatons donc que presque tous les clients ouvrent un CELIAPP lorsque leurs enfants atteignent l’âge de 18 ans. Pour les jeunes investisseurs, c’est la priorité numéro un. »
Cette tendance s’inscrit dans la foulée de l’évolution de la mentalité voulant qu’il faille nécessairement cotiser au maximum à son REER chaque année.
Un sondage Edward Jones publié en février a révélé que seulement 15 % des Canadiens interrogés prévoyaient de cotiser le montant maximal à leur REER, soit une baisse de six points de pourcentage par rapport à l’année précédente.
L’enquête a également révélé que seulement 39 % des Canadiens prévoyaient de cotiser à un REER cette année, soit une baisse de 10 points par rapport à 2024. Les répondants ont indiqué que l’insuffisance des revenus, le coût élevé de la vie et le remboursement des dettes constituaient les principaux obstacles à l’investissement.
Incertitude économique
En ce qui concerne les préoccupations des clients au sujet des répercussions potentielles sur l’économie et les placements des plans du président américain Donald Trump d’instaurer des tarifs douaniers sur les importations en provenance du Canada et d’à peu près partout ailleurs, les conseillers signalent que les clients comprennent largement que la clé du succès est de rester investi à long terme.
« Je ne suis pas surpris que nos clients continuent d’investir, car nous leur fournissons une formation approfondie sur les marchés, déclare Dave Hamilton. Nous insistons sur le fait que les marchés sont très fiables à long terme, malgré les événements survenus dans le monde au cours des cent dernières années. Nous expliquons également à nos clients que les marchés sont imprévisibles et peu fiables à court terme, avec des obstacles tels que les tarifs douaniers, les guerres ou d’autres événements qui affectent les performances à court terme. »
Étant donné que MCO se concentre en grande partie sur la planification financière à long terme, il est utile de montrer aux clients que même dans un scénario où les marchés chutent de 10 ou 20 %, ils seront toujours en mesure de prendre leur retraite, explique Nathan Clarke.
Pour les clients qui ont besoin de liquidités, MCO prévoit l’équivalent d’une ou deux années de besoins de retraite, ou de liquidités, dans une sorte d’obligation à court terme ou de position de trésorerie.
« Ainsi, même si le marché chutait de 20 %, ils ne retireraient pas le montant qui a chuté », calcule Nathan Clarke.
Bien que Josh Hosein ait déclaré qu’il y a eu davantage d’appels à la rescousse, en particulier dans les moments de plus grande volatilité des marchés, personne ne panique pour l’instant.
« Dans l’ensemble, nous tenons bon, constate-t-il. La plupart du temps, une fois que nous avons expliqué la situation et notre raisonnement, les clients sont d’accord. Personne n’est venu nous voir pour nous demander de liquider des actifs ou quoi que ce soit de ce genre. »