« L’ISR comportait souvent une approche bien tranchée qui, par-dessus tout, éliminait tout ce qui était mauvais. Elle était souvent associée à certaines filières du placement éthique, et, par exemple, il pouvait être de mise d’en éliminer le jeu ou l’alcool », dit Jeremy Richardson, gestionnaire de portefeuille principal, précédemment comptable agréé qui est entré à RBC GMA en 2014.
« Mais en tant qu’équipe, nous avons toujours pensé que posséder d’excellentes entreprises dépassait ce cadre-là. Notre approche a toujours été de penser et d’agir comme des propriétaires d’entreprises, et d’accepter les responsabilités liées à la propriété. Il ne s’agissait pas de louer les certificats d’actions », ajoute-t-il.
Pour utiliser une analogie simple, les propriétaires de logements prennent soin de leur maison et de leur quartier parce qu’ils sont soucieux de faire augmenter la valeur des résidences.
« Si vous louez une maison, tout ce qui vous intéresse est de récupérer votre dépôt. Quand on parle d’investir, il y a des gens qui ne pensent qu’à louer leurs certificats d’actions et qui ne pensent pas comme des propriétaires, souligne Jeremy Richardson. Ils ne sont pas enclins à penser à l’investissement ESG, ou à la manière dont les choix de la gestion vont affecter leur entreprise à long terme, parce qu’à long terme ils ne seront plus là. Mais ceux qui pensent comme des propriétaires ont ces choses-là à cœur. »
Les principes de l’ESG s’appliquent à une gamme de huit produits RBC, notamment le plus récent : le Fonds spécifique d’actions mondiales RBC, lancé en avril 2014.
Intégrer l’ESG dans le processus veut dire regarder au-delà du bilan d’une société et examiner des sources non traditionnelles de risque qui sont souvent difficiles à identifier.
« Nous savons que ces choses-là existent et devons comprendre, en tant que propriétaires d’entreprises commerciales, que quand les sociétés font ce qu’il faut (et ça peut leur coûter de l’argent à court terme), ce placement peut conduire à un actif éventuel », explique Jeremy Richardson, chef de la recherche sur les produits de consommation mondiaux, qui travaille aux côtés de Habib Subjalli, chef des actions mondiales.
Par exemple, Google est en train de mettre au point des voitures soi-disant sans chauffeur, ce qui pourrait être considéré comme un projet utopique onéreux.
« Quiconque n’est intéressé que par la maximisation des profits à court terme ne ferait jamais ce genre de chose, en l’absence d’avantage visible et immédiat. Mais Google essaie de maximiser sa valeur à long terme », précise Jeremy Richardson.
Inversement, quand les sociétés font des économies de bouts de chandelle pour maximiser le court terme, cela pourrait compromettre ses perspectives à long terme. « On risque alors de créer un passif éventuel. »
Par exemple, Jeremy Richardson dit qu’il reste à l’écart des producteurs des soi-disant boissons énergétiques qui attirent les adolescents.
« J’ai trois enfants, et j’aurais un problème s’ils buvaient des boissons à grande teneur en caféine parce qu’elles ont un effet physiologique, souligne-t-il. Les données financières ont l’air fantastique parce que les producteurs affichent une excellente croissance des ventes et d’excellentes marges. Mais du point de vue de l’ESG, la catégorie est en train de créer un passif éventuel. »
À un moment ou à un autre, avance Jeremy Richardson, ces produits peuvent créer un malaise dans la collectivité, qui exigera alors un âge limite pour leur consommation. Et cela peut avoir comme effet de réduire la croissance des ventes des firmes concernées.
« C’est là que le passif éventuel accumulé par la firme sera réalisé. Si vous êtes actionnaire, ça peut vous créer de mauvaises surprises. »
Toutefois, l’ESG n’est qu’une partie du processus, puisque les sociétés doivent réunir quatre attributs essentiels, regroupés sous l’étiquette de dynamique concurrentielle, avant de faire partie du fonds. Ces quatre attributs sont les suivants : un modèle commercial qui confère à une société un avantage durable par rapport à ses concurrentes, la capacité de traduire cela en parts de marché, un modèle commercial exposé aux marchés en croissance, et une gestion qui prend les bonnes décisions stratégiques et fonctionne d’une manière responsable et durable dans l’observation des normes de l’ESG.
« Les sociétés doivent réunir les quatre critères, dit Jeremy Richardson. L’évaluation ne suffit pas. »
Un avoir représentatif dans une liste relativement courte de 37 actions est Toyota Motor, le plus grand fabricant automobile mondial.
« Nous admirons cette société parce qu’elle est capable de se protéger des changements intervenant au sein de l’industrie, confie Jeremy Richardson. Toyota se distingue de ses pairs par la création d’une spécialisation dans la technologie des modèles hybrides. La Prius est désormais le véhicule hybride par excellence. »
Bien que la Prius ait commencé comme un produit déficitaire, sa rentabilité est désormais comparable à celle d’autres modèles de la famille Toyota.
« S’appuyant sur ce succès, la société a mis au point d’autres technologies qui protègeront ses affaires si les véhicules hybrides ne représentent qu’un tremplin vers d’autres technologies. Si la tendance favorise les véhicules électriques, Toyota possède également cette technologie-là. En tant qu’investisseur, je suis convaincu que Toyota est en train d’investir dans de nouveaux systèmes de propulsion, et qu’elle a donc un avenir durable », indique Jeremy Richardson.
Pour sa part, il esquive la notion que l’ESG peut conduire à une performance supérieure, avançant que la sensibilité aux facteurs ESG n’est qu’un outil utile. Trop souvent, ajoute-t-il, des informations précieuses échappent aux investisseurs passifs qui s’en remettent à l’analyse quantitative. « Ils ne pensent pas comme des propriétaires et ne voient pas l’actif — ou le passif — éventuel. L’occasion qui s’offre à nous autres propriétaires et investisseurs actifs est d’être sensible à ces questions parce qu’à moyen et long termes elles peuvent avoir un impact sur la création de valeur pour les actionnaires. »
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