L’optimisme des investisseurs est « questionnable », estime l’économiste en chef du Mouvement Desjardins, Jimmy Jean, qui émet des réserves sur le rebond boursier du début de l’année.
« L’idée, c’est que les investisseurs anticipent des hausses de bénéfice à partir de maintenant, explique l’économiste en entrevue en marge d’une conférence web sur ses prévisions financières. C’est comme si le recul qu’on a vu en 2022 était terminé alors que, d’après nous, le pire est encore devant nous. »
Les analystes anticipent en moyenne une augmentation de 10 % des bénéfices des grandes sociétés américaines inscrites au S&P 500. Or, la majorité des économistes anticipent, pour leur part, que la hausse des taux d’intérêt provoquera une récession en 2023. « En moyenne, lorsqu’on regarde les précédents cycles depuis les années 1950, les bénéfices se contractent de 19 % en moyenne durant une récession », souligne Jimmy Jean.
Depuis le début de l’année, le S&P 500, à New York, a rebondi de près de 7 %. Le S&P/TSX de la Bourse de Toronto a avancé de plus de 6 % sur la même période.
Les investisseurs qui espèrent que la récession amènera une baisse rapide des taux d’intérêt pourraient également être déçus, croit Jimmy Jean. « Les risques que les taux d’intérêt soient amenés plus haut ou qu’ils restent élevés pour plus longtemps, et bien, ce n’est pas très porteur pour les valorisations boursières. »
Jimmy Jean est toutefois moins pessimiste pour la Bourse de Toronto, car les actions canadiennes sont « plus abordables » que les actions américaines.
Selon la firme Yardeni, le S&P 500 s’échange à près de 18,2 fois les prévisions de bénéfice pour les 12 prochains mois. En comparaison, ce multiple est de 12,5 fois pour les actions canadiennes. Pour l’indice Monde MSCI, l’évaluation est de 15,5 fois.
Jimmy Jean souligne, en entrevue, que le prix du pétrole se maintient, malgré les craintes d’une récession. La transition énergétique amène aussi une forte demande pour les métaux. Ce contexte structurel « sourit » à la Bourse canadienne, selon lui.
S’il juge qu’il est trop tôt pour crier victoire pour les actions, l’économiste est plus optimiste pour les obligations. « Cette année, si c’est une année où il y a une pause dans les hausses de taux et éventuellement à la fin d’année une baisse des taux d’intérêt, et bien, les marchés prennent cela en compte à l’avance. »
La valeur d’une obligation est inversement corrélée aux taux d’intérêt. Lorsque les taux diminuent, la valeur des obligations augmente. « Ça ne sera pas faramineux en ce sens que les taux ne reviendront pas à zéro, mais on a quand même une meilleure performance qu’en 2022 si on a raison qu’il y aura une récession et une aversion pour le risque. »
Le rebond boursier a également « surpris » l’économiste en chef de la Banque Nationale, Stéfane Marion. « Bien qu’une récession puisse encore être évitée, nous demeurons prudents à propos d’une augmentation de notre proportion d’actions après la récente flambée boursière record », commente l’économiste dans une note, lundi.