Le budget fédéral déposé jeudi comprend une hausse d’impôt plus faible que prévu pour les institutions financières, mais les grands patrons des banques affirment néanmoins qu’une augmentation du taux d’imposition nuira à la compétitivité du Canada sur la scène mondiale.
Le gouvernement a annoncé une hausse d’impôt de 1,5 point de pourcentage pour les banques et les assureurs sur les bénéfices au-dessus du seuil des 100 millions de dollars (M$). Même si la hausse était prévue, les banques canadiennes se préparaient à une éventuelle hausse de 3,0 points de pourcentage sur les bénéfices supérieurs à 1 G$.
Le budget comprend également un impôt ponctuel de 15 % sur le revenu imposable de plus de 1 G$ pour la dernière année d’imposition, une mesure que le gouvernement a présentée comme un « dividende temporaire pour la relance du Canada ».
Ensemble, ces mesures devraient rapporter à l’État 6,1 G$ sur cinq ans. L’augmentation du taux d’imposition de 1,5 point de pourcentage devrait rapporter 445 M$ sur une base continue.
Lors d’une entrevue, le chef de la direction de la Banque CIBC, Victor Dodig, a fait valoir qu’une hausse d’impôts pour les entreprises comme la sienne enverrait un mauvais signal au reste du monde en ce qui a trait à l’investissement au Canada. Il a ajouté qu’il était un défenseur d’une politique fiscale concurrentielle qui alimente les investissements au pays, mais pas d’une politique ciblant des industries spécifiques.
« Lorsque l’on s’attaque à des industries particulières, les investisseurs étrangers peuvent parfois se détourner de ces marchés parce qu’ils y voient un type de taxe politique et nous devons en tenir compte, a-t-il expliqué. Il y a une meilleure façon de le faire. »
Dans leur plateforme électorale de 2021, les libéraux ont promis d’augmenter le taux d’imposition des sociétés pour les banques et les assureurs dont les profits dépassent 1 G$.
Le parti avait estimé qu’une telle mesure, destinée aux entreprises qui ont réalisé des bénéfices records pendant la pandémie, rapporterait environ 1,2 G$ par an.
Le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui a récemment conclu une entente avec les libéraux pour les appuyer jusqu’en 2025, avait exhorté les libéraux à aller de l’avant avec des mesures fiscales équitables comme une taxe bancaire.
Le chef de la direction de la Banque Scotia, Brian Porter, qui était absent de l’assemblée annuelle des actionnaires de sa banque cette semaine parce qu’il a contracté la COVID-19, a critiqué la proposition de taxe dans ses remarques préparées, la qualifiant de « réaction instinctive qui envoie le mauvais message à la communauté mondiale des investisseurs ».
Dans une entrevue en table ronde après l’assemblée annuelle de la Banque Royale, jeudi, le chef de la direction Dave McKay a affirmé que les investisseurs mondiaux voulaient de la stabilité et de la prévisibilité.
« Lorsque vous mettez cette prévisibilité en question, c’est à ce moment-là que les flux de capitaux peuvent changer », a-t-il souligné.
Assemblée annuelle de la CIBC
Le grand patron de la CIBC, qui participait jeudi à l’assemblée annuelle de ses actionnaires, s’est également exprimé sur l’état de l’économie, faisant valoir qu’il est trop tôt pour annoncer une récession, même si un mouvement récent sur le marché obligataire américain a suscité des inquiétudes quant à une éventuelle contraction économique.
Il a ajouté que le Canada pourrait continuer à connaître une bonne croissance économique en 2022, même s’il croit qu’elle sera plus modérée que celle des années précédentes.
Le Canada doit « être réaliste quant à la voie à suivre » alors que les taux d’intérêt augmentent et que les dettes nationales augmentent, a poursuivi Victor Dodig lors de l’assemblée annuelle de la CIBC, jeudi.
« Notre point de vue veut qu’investir dans la croissance économique soit la meilleure voie à suivre pour tous, a-t-il affirmé dans le texte de ses remarques. Nous devons choisir notre voie, et rapidement. Nous devons réagir maintenant comme nous l’avons fait lorsque la pandémie s’est installée, avec urgence, détermination et en nous concentrant sur des solutions durables à long terme. »
Par ailleurs, Victor Dodig a été interrogé sur sa rémunération au cours de l’assemblée annuelle.
Victor Dodig a reçu 11,7 M$ en 2021. En plus de son salaire de 1 M$, il a reçu une prime en espèces de 2,1 M$, 6,8 M$ en unités d’actions en fonction du rendement et 1,7 M$ en options de souscription d’actions.