Statistique Canada a indiqué mercredi que des taux hypothécaires plus élevés contribuaient à alimenter les dernières données sur la forte inflation. Mais des taux plus élevés ne sont-ils pas censés faire ralentir l’inflation?
Les coûts hypothécaires ont augmenté parce que les hausses de taux d’intérêt rendent les prêts hypothécaires plus chers, et ils sont l’un des rares éléments des données d’inflation directement liés aux taux d’intérêt, a expliqué David Macdonald, économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives.
Dans l’environnement actuel où les taux d’intérêt augmentent à un rythme rapide, David Macdonald a noté qu’en théorie, les autres composantes, telles que les prix des maisons, devraient baisser plus rapidement que les taux hypothécaires n’augmentent.
Mais ça ne se fait pas, a-t-il ajouté. Au lieu de cela, ils s’équilibrent simplement, les coûts d’intérêt hypothécaires ayant augmenté de 11,4 % par rapport à l’année dernière, tandis que l’indice des prix des maisons a diminué de 11,1 % par rapport à l’année dernière.
Cependant, les hausses de taux d’intérêt ne concernent pas uniquement les prix des hypothèques et des logements. David Macdonald a rappelé que l’attente à long terme est que des taux hypothécaires plus élevés font en sorte que les gens dépensent moins pour d’autres choses, ce qui fait diminuer l’inflation globale. Ça ne s’est cependant pas encore produit.
Alors, quelles parties de l’inflation sont réellement affectées par les hausses de taux?
Bien que la hausse des taux affecte directement certaines choses, elle a également des répercussions sur d’autres éléments, par exemple, les dépenses pour des articles coûteux comme les véhicules automobiles.
Cependant, plus une certaine catégorie est liée à des effets extérieurs ou internationaux, tels que des conditions météorologiques extrêmes ou des troubles géopolitiques, moins elles sont susceptibles de voir leur prix baisser à cause des hausses de taux d’intérêt. David Macdonald a souligné que les prix des aliments et de l’essence, qui avaient augmenté en octobre de 10,1 % et de 17,8 % par rapport à l’année dernière, en sont d’excellents exemples.
Les salaires augmentent aussi, mais pas aussi vite que l’inflation. Alors pourquoi certaines personnes pensent-elles que des salaires plus élevés pourraient aggraver l’inflation, alors que les salaires ont du mal à suivre?
Étant donné que les salaires n’augmentent pas aussi rapidement que l’inflation, David Macdonald ne croit pas qu’il soit juste de dire que les salaires sont le moteur de l’inflation cette fois-ci.
« Les travailleurs subissent de véritables réductions de salaire chaque mois », a-t-il indiqué.
Cela ne signifie pas que la croissance des salaires ne peut pas être un facteur d’inflation, mais David Macdonald a estimé qu’il n’y avait aucune preuve que les salaires sont le facteur à l’origine de l’inflation persistante dans le cycle actuel.
La Banque du Canada continuera-t-elle d’augmenter les taux d’intérêt?
La Banque du Canada a déjà clairement indiqué son intention d’augmenter encore les taux, bien qu’il y ait eu un certain optimisme quant au fait que les hausses ne seront pas aussi importantes que celles observées plus tôt cette année.
Mais David Macdonald a noté que, puisque l’inflation se révèle persistante, la banque centrale est de plus en plus susceptible d’augmenter ses taux de plus d’un quart de point de pourcentage lors de sa prochaine décision.
L’économiste en chef de la Banque CIBC, Avery Shenfeld, a indiqué mercredi, dans une note à ses clients, qu’il s’attendait à voir une hausse d’un demi-point de la part de la banque centrale lors de son annonce sur les taux d’intérêt de décembre.
L’inflation est de 6,9 % depuis deux mois consécutifs, à peine en baisse par rapport aux sommets précédents. Doit-on s’inquiéter de sa pérennité?
Il ne s’agit pas de savoir si l’inflation ralentira, mais plutôt à quel moment, et à quelle vitesse, a estimé David Macdonald.
« Il est tout à fait possible de contrôler l’inflation, a-t-il déclaré, mais il est de plus en plus probable que le mécanisme de contrôle sera une récession. »
Chaque mois où la forte inflation persiste, un atterrissage en douceur devient de moins en moins probable, a ajouté David Macdonald.
« Plus nous restons longtemps sur ce plateau, plus une récession devient probable. »
Lorsque l’inflation ralentira enfin à un rythme plus normal, les prix redescendront-ils également?
L’inflation est par définition une croissance des prix, donc même si le taux d’inflation ralentit, disons à 3 %, cela ne signifie pas que les prix globaux chuteront. Au contraire, ils augmenteront plus lentement, a expliqué David Macdonald. Il pense qu’il est peu probable que le Canada entre dans une période prolongée de déflation ou de baisse réelle des prix, ce qui pourrait également déclencher une récession.
Bien sûr, les prix de certaines choses peuvent baisser et vont probablement baisser, comme les prix de l’essence ou les prix du logement, a-t-il poursuivi. Mais des prix plus élevés et soutenus dans d’autres catégories, comme l’alimentation, compenseront probablement pour maintenir la croissance des prix en territoire positif.
« Le fait est que, généralement, ces prix ne baisseront plus. »