La Banque du Canada affirme que l’économie du pays se contractera au cours du premier trimestre de 2021, taxant une fois de plus les travailleurs les plus touchés, avant de s’engager sur la voie d’une reprise dont la vigueur dépendra du déploiement des vaccins.
Les travailleurs des secteurs à forte proximité physique porteront le fardeau d’une nouvelle série de confinements « de façon disproportionnée », ce qui, selon la banque centrale, amplifiera les répercussions « très inégales » de la pandémie sur le marché du travail.
Dans son discours préliminaire à une conférence de presse en fin de matinée, le gouverneur de la banque centrale, Tiff Macklem, a averti que le recul du premier trimestre pourrait être plus important que prévu si les restrictions devaient être renforcées ou étendues.
En conséquence, la banque a annoncé qu’elle maintenait son taux d’intérêt directeur à 0,25 %, évoquant la faiblesse à court terme et la « reprise prolongée » dans son explication.
Mais les difficultés à court terme devraient céder leur place à de meilleures perspectives à moyen terme, les vaccins étant déployés plus tôt que ce qu’avait prévu la banque centrale.
Néanmoins, la banque avertit dans la mise à jour de ses perspectives économiques qu’une récupération complète de la pandémie de COVID-19 prendra un certain temps.
La Banque du Canada ne voit pas non plus l’inflation revenir à son objectif de 2,0 % avant 2023, soit un an plus tard que prévu.
« Nous avons des raisons évidentes d’être plus optimistes en ce qui concerne l’évolution de l’économie à moyen terme. Mais nous n’y sommes pas encore », a affirmé Tiff Macklem dans le texte de son discours.
« L’augmentation des cas de COVID-19 pèse lourdement sur les perspectives économiques à court terme. Les mesures exceptionnelles de relance budgétaire et monétaire doivent donc se poursuivre. »
Le rapport sur la politique monétaire de la banque centrale, qui présente chaque trimestre ses attentes en matière de croissance économique et d’inflation, s’attend à ce que la COVID-19 ait entraîné une contraction de l’économie de 5,5 % l’année dernière.
Malgré une reprise au cours de l’été et de l’automne, qui a peut-être permis au pays d’éviter le pire scénario économique, la tendance de la reprise roulera dans un nid-de-poule au cours des trois premiers mois de 2021.
La banque prévoit un déclin du produit intérieur brut (PIB) réel de 2,9 % pour le premier trimestre, par rapport à la même période en 2020. Il devrait s’améliorer par la suite, si les restrictions mises en place pour lutter contre la pandémie commencent à s’assouplir en février.
La Banque du Canada calcule que la croissance économique devrait s’établir à 4,0 % pour l’ensemble de l’année, puis à 4,8 % l’an prochain, pour finalement être de 2,5 % en 2023.
En attendant, l’économie se retrouvera sur des montagnes russes. La banque a prévenu qu’une résurgence de la COVID-19 ou l’arrivée de nouvelles souches plus virulentes pourraient peser sur la reprise pendant un trimestre, avant qu’elle revienne en force au suivant.
La trajectoire de l’inflation pourrait être aussi imprévisible.
Les prix de l’essence, qui ont pesé sur l’indice des prix à la consommation cette année, seront d’ici mars « seront nettement supérieurs aux creux touchés un an plus tôt », selon le rapport de la banque, même si les prix oscillent autour de leur niveau actuel. Cela devrait considérablement faire grimper l’inflation, et peut-être même faire passer l’inflation d’ensemble à environ 2,0 % au deuxième trimestre.
Cependant, ce bond s’aplanira pendant le reste de l’année, la banque prévoyant une inflation de 1,6 % pour 2021. Ses perspectives de l’inflation pour les années suivantes visent 1,7 % en 2022 et 2,1 % en 2023.
Par ailleurs, Statistique Canada a indiqué mercredi que la cadence annuelle de l’inflation avait ralenti en décembre, l’indice des prix à la consommation ayant augmenté de 0,7% par rapport au même mois un an plus tôt.
L’agence fédérale a précisé que la moyenne des trois mesures canadiennes de l’inflation de base, qui sont considérées comme de meilleurs indicateurs des pressions sous-jacentes sur les prix et sont étroitement surveillées par la Banque du Canada, avait été de 1,57 % en décembre.
Tous les chiffres des perspectives de la banque supposent que la vaccination des populations se déroulera en grande partie comme les gouvernements l’ont annoncé et que l’immunité collective sera atteinte au Canada d’ici la fin de 2021, soit six mois plus tôt que la banque ne l’avait précédemment prévu.
Ce plus court échéancier pourrait signifier que les cicatrices seront moins nombreuses pour l’économie dans l’ensemble, notamment avec un moins grand nombre de faillites et de travailleurs sans emploi pendant de longues périodes, ce qui complique leur retour sur le marché du travail.
Le taux de chômage de longue durée, qui concerne ceux qui sont sans emploi depuis six mois ou plus, a atteint 2,4 % le mois dernier, ce qui, selon la banque centrale, est « très préoccupant », car ces travailleurs pourraient éventuellement abandonner complètement le marché du travail.
Les récentes restrictions nuiront aux travailleurs à bas salaire, dont les niveaux d’emploi n’étaient en décembre qu’à 80 % de ce qu’ils étaient avant la pandémie, ainsi qu’aux jeunes et aux femmes, qui sont plus susceptibles de travailler dans les secteurs plus durement touchés, comme ceux de l’hébergement et de la restauration.
Plus les restrictions resteront en place longtemps, plus il pourrait être difficile pour ces travailleurs de trouver un nouvel emploi, a prévenu la banque dans son rapport, puisque la majorité des travailleurs de l’hébergement et de la restauration qui ont été licenciés et ont trouvé un autre emploi se sont replacés dans le même secteur d’activité.