Alors que la Banque du Canada (BdC) s’apprête à annoncer sa décision sur les taux d’intérêt le 24 juillet, plusieurs experts anticipent une nouvelle baisse du taux directeur.
Elle ferait suite à une première réduction en juin alors que la banque centrale a ramené son taux de référence à 4,75 %, en baisse d’un quart de point de pourcentage.
Selon les analystes de la Banque Nationale (BN), tout indique que le gouverneur Tiff Macklem annoncera une réduction similaire lors de la réunion de mercredi.
Ils fondent leur prévision sur l’analyse des récentes données économiques. « Les inquiétudes soulevées par une récente poussée de l’inflation de base devraient être apaisées par un ralentissement régulier du marché du travail », ont affirmé les économistes de la BN dans une récente étude économique.
En effet, en juin, le taux de chômage au Canada s’est établi à 6,4 %, en hausse de 1,3 point de pourcentage depuis avril 2023. Selon la BN, il devrait atteindre « environ 7 % d’ici la fin de l’année, quelle que soit la trajectoire de la politique à court terme. »
Quant à l’Indice des prix à la consommation (IPC), après une remontée à 2,9 % en mai, il a reculé à 2,7 % en juin au pays, selon Statistique Canada.
Desjardins « mise » aussi sur une baisse de taux directeur, en raison du ralentissement de l’activité économique, ce qui devrait maintenir des pressions désinflationnistes. « Comme elle n’est pas pleinement anticipée par les marchés, cela pourrait s’accompagner d’une légère dépréciation du dollar canadien », soulignent toutefois Jimmy Jean, économiste en chef et stratège, et Hendrix Vachon, économiste principal, dans une récente publication.
Ils prévoient que le taux de change entre le dollar canadien et le dollar américain connaisse des fluctuations, avec une prévision de 1,38 $ CAN pour 1 $ US à la fin de l’été, suivie d’une possible appréciation graduelle du dollar canadien en fonction de l’évolution de la politique monétaire américaine.
Les économistes de Desjardins doutent que la Réserve fédérale (Fed) procède à une baisse du taux directeur en septembre. Récemment, devant une commission sénatoriale, son président Jerome Powell avait laissé entendre qu’une réduction était de plus en plus proche. « Nous croyons [que la Fed] préférera attendre que les élections [présidentielles] de novembre aient eu lieu et que les signes de diminution de l’inflation soient plus convaincants », ont-ils affirmé.
Impact sur les taux hypothécaires
Philippe Simard, directeur hypothécaire au Québec chez Ratehub.ca, estime, lui aussi, que les derniers rapports économiques, notamment l’IPC, renforcent les attentes d’une nouvelle baisse d’un quart de point le 24 juillet. Dans l’éventualité où la Fed déciderait d’abaisser ses taux dès septembre, cela donnerait à la BdC plus de latitude pour réduire son taux directeur, soutient-il.
L’impact de la première baisse de taux sur les marchés du logement a été minime jusqu’à présent même si certains prêteurs ont abaissé leurs taux hypothécaires fixes, constate Philippe Simard. Il estime qu’une nouvelle baisse pourrait stimuler le marché.
« Les dernières données nationales sur l’immobilier indiquent une augmentation à court terme des ventes en juin. Toutefois, la plupart des acheteurs attendent manifestement que les taux baissent encore avant de revenir sur le marché. Cela a incité l’Association canadienne de l’immobilier [ACI] à revoir ses prévisions pour cette année et l’année prochaine, afin de tenir compte du ralentissement de la demande des acheteurs. »
Au début de juillet, l’ACI prévoyait en effet que seulement 472 395 propriétés devraient changer de main en 2024 à l’échelle nationale, en hausse de 6,1 % par rapport à 2023, soit loin de sa prévision d’avril alors qu’elle anticipait un gain de 10,5 %.
Pour les propriétaires, une baisse de 25 points de base du taux directeur pourrait se traduire par une économie significative sur leurs paiements hypothécaires mensuels.
Ratehub.ca donne l’exemple d’un propriétaire ayant un prêt hypothécaire à un taux variable de 5,70 % sur un montant de 486 285 $. Si la BdC annonce une baisse en juillet, son taux hypothécaire passerait à 5,45 %. Cela réduirait son paiement mensuel de 3 025 $ à 2 954 $, soit une économie de 71 $ par mois ou 852 $ par an.
Les propriétaires qui doivent renouveler prochainement leur hypothèque peuvent peut-être se dire qu’il est temps de choisir un taux variable étant donné le recul probable du taux directeur.
« Il est important de tenir compte de sa tolérance personnelle au risque et de sa situation financière. Si la Banque du Canada nous a appris quelque chose au cours des dernières années, c’est que rien n’est assuré lorsqu’il s’agit de l’orientation des taux », met en garde Philippe Simard.