Tiff Macklem - Creative Commons

La Banque du Canada a abaissé son taux directeur pour la septième fois consécutive mercredi, le portant à 2,75 %.

Bien que cette série de baisses de taux ait allégé la pression sur les consommateurs après leurs hausses par la banque centrale pour lutter contre l’inflation, l’intensification du conflit commercial avec les États-Unis a assombri l’économie et les consommateurs.

Voici ce que nous avons appris sur l’économie, l’inflation et plus encore de la décision de la banque centrale et de sa conférence de presse de mercredi.

Incertitude économique

Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a souligné que, bien que l’économie ait terminé l’année 2024 en bonne posture, les annonces tarifaires en constante évolution du président américain Donald Trump ébranlent la confiance des entreprises et des consommateurs.

L’incertitude incite les ménages à réduire leurs dépenses et les entreprises à revoir leurs projets d’embauche et d’investissement, a-t-il déclaré lors de la conférence de presse après l’annonce de la décision sur les taux.

Carolyn Rogers, première vice-gouverneure, a noté que les perspectives étaient claires.

« En cas de guerre commerciale, nous nous attendons à une baisse de la demande, a-t-elle expliqué aux journalistes. Les Canadiens prévoient de moins dépenser et s’inquiètent de la sécurité de leur emploi. »

Et si l’inflation oscille autour de l’objectif de 2 % de la banque centrale, la guerre commerciale pourrait changer la donne. Tiff Macklem a indiqué que les dommages économiques causés par les droits de douane pourraient être importants, selon leur durée et leur ampleur.

« On s’attend à ce que le conflit commercial avec les États-Unis pèse sur l’activité économique et qu’il fasse monter les prix et l’inflation », a-t-il ajouté.

Inquiétudes sur le marché du travail

Tiff Macklem a indiqué que le marché du travail canadien s’était renforcé tout au long de l’année, mais avait stagné en février.

Les préoccupations concernant la sécurité de l’emploi augmentent, en particulier chez les travailleurs des secteurs fortement tributaires des exportations vers les États-Unis, comme les secteurs manufacturier, minier et pétrolier et gazier.

« Je pense que c’est probablement ce qui influence les décisions en matière de dépenses et d’épargne », a commenté Mme Rogers.

Pression sur le huard

La politique de taux d’intérêt de la Banque du Canada a divergé régulièrement de celle de la Réserve fédérale américaine (Fed), l’économie américaine ayant mieux résisté aux taux d’intérêt élevés.

Un écart plus important entre les taux des deux banques centrales tend à peser sur le dollar canadien, qui, comme l’a rappelé Tiff Macklem, subit déjà une pression importante en raison des menaces tarifaires. Un huard plus faible peut devenir inflationniste, car il rend les importations canadiennes plus chères.

Les prévisions les plus récentes de la Fed concernant les taux prévoyaient deux baisses en 2025, mais les attentes du marché se rapprochaient plutôt d’une seule baisse pour l’année.

Cependant, certaines données économiques américaines ont récemment surpris par leur baisse, et ces dernières semaines, dans un contexte d’incertitude entourant la politique tarifaire de M. Trump, les attentes en matière de réduction des taux ont augmenté pour l’année.

Trajectoire des taux

Le taux directeur de la Banque du Canada se situe actuellement à 2,75 %, soit près de la moitié du sommet de 5 % atteint lorsque la banque centrale l’a relevé pour lutter contre l’inflation.

Mercredi, Tiff Macklem a déclaré que la banque centrale « va aborder avec prudence tout changement futur du taux directeur », en tenant compte à la fois du frein à la croissance économique et des pressions à la hausse sur les prix liées au conflit commercial.

Il a toutefois averti que la Banque du Canada dispose de peu d’outils pour compenser les dommages.

« La politique monétaire ne peut pas neutraliser les effets d’une guerre commerciale », a indiqué Tiff Macklem.

« L’activité économique va s’affaiblir. Les prix vont augmenter, l’inflation va augmenter. Nous ne pouvons rien y changer. Ce que nous pouvons faire, c’est nous assurer que toute hausse de l’inflation soit temporaire. »

Douglas Porter, économiste en chef de la Banque de Montréal, a précisé que la banque s’attend à trois autres baisses lors des trois prochaines réunions, portant le taux directeur à 2 %.

« Notre hypothèse principale est que le Canada sera confronté à d’importants droits de douane pendant une période prolongée et que les effets de la guerre commerciale sur la croissance finiront par l’emporter sur l’impact inflationniste à la hausse, ce qui maintiendra la Banque en mode relâchement », a-t-il écrit dans une note.

Interrogé mercredi sur la possibilité que le conseil de direction de la Banque du Canada envisage une baisse de taux de plus d’un quart de point, Tiff Macklem a répondu : « Nous n’avons pas sérieusement envisagé une baisse de 50 points de base. »

« Nous ne voulions pas anticiper et nous allons évaluer ces choses attentivement », a-t-il ajouté.

Dans un contexte d’incertitude, Tiff Macklem a affirmé que la banque ne pouvait pas fournir d’indications prospectives concernant ses taux d’intérêt.

« Nous ferons tout notre possible pour aider l’économie à s’adapter à la douloureuse adaptation à la hausse des droits de douane américains », a-t-il conclu.

« Mais nos possibilités sont limitées par la nécessité de maîtriser l’inflation. »