Le taux de chômage au Canada a reculé à un creux record le mois dernier, alors que davantage de personnes se sont précipitées sur un marché du travail en pleine effervescence, et des économistes estiment qu’il pourrait reculer encore davantage.
Le taux de chômage canadien s’est établi à 5,3 % en mars, par rapport à 5,5 % le mois précédent, alors que l’économie a créé 72 500 emplois, a indiqué vendredi Statistique Canada.
Le taux de chômage de mars était le plus bas parmi les données comparables remontant jusqu’à 1976, a précisé l’agence fédérale. Le record précédent, un taux de chômage de 5,4 %, avait été enregistré en mai 2019. Il s’agissait en outre d’un revirement par rapport aux premières semaines de la pandémie, en mai 2020, lorsque le taux de chômage atteint un sommet record de 13,4 %.
À l’échelle provinciale, Statistique Canada a noté que les gains se concentraient surtout en Ontario et au Québec.
Au Québec, où 27 100 emplois ont été créés, le taux de chômage s’est établi à 4,1 % le mois dernier, en baisse de 0,4 point par rapport à celui de février. Tout comme le taux de chômage fédéral, le taux québécois était le plus faible jamais enregistré par la province.
En Ontario, 35 000 emplois ont été créés en mars et le taux de chômage a reculé à 5,3 %, par rapport à 5,5 % au mois précédent, ce qui le place à un niveau semblable à celui de février 2020.
Au Nouveau-Brunswick, le taux de chômage a reculé de 7,9 % à 7,7 % de février à mars, alors qu’il s’est légèrement replié de 6,6 % à 6,5 % en Nouvelle-Écosse et de 9,0 % à 8,1 % à l’Île-du-Prince-Édouard.
Encore de l’espace pour diminuer
L’économiste Andrew Grantham, de la Banque CIBC, a estimé que le taux de chômage canadien pouvait encore reculer un peu, étant donné que certaines régions du pays, comme les provinces productrices de pétrole, ne connaissaient pas le plein emploi avant que la pandémie ne frappe.
« Il est possible que le taux de chômage baisse encore un peu », a-t-il avancé.
« Cela signifie qu’il y a un peu de place pour que la croissance de l’emploi continue de dépasser la croissance démographique, mais pas dans la même mesure que récemment. »
La baisse du taux de chômage le mois dernier était attribuable à des gains dans divers secteurs. Environ 24 500 femmes de plus de 55 ans ont trouvé du travail et 35 300 hommes d’âge moyen, entre 25 et 54 ans, ont trouvé un emploi, principalement à temps partiel.
Le resserrement du marché du travail a également entraîné une hausse du salaire horaire moyen, qui montrait une progression de 3,4 % d’une année à l’autre en mars, contre 3,1 % en février. Mais ce taux de croissance était inférieur au rythme annuel de l’inflation en février.
L’économiste Tu Nguyen, de RSM Canada, a souligné que les salaires pourraient augmenter avec l’inflation, qui est en voie d’atteindre son plus haut niveau depuis le début des années 1980, ce qui pourrait également ramener certains retraités sur le marché du travail.
« Sur un revenu fixe, ils ont du mal à joindre les deux bouts (…) et il y a beaucoup d’emplois disponibles en ce moment », a-t-elle expliqué.
Des obstacles pour les femmes
Un nombre croissant de femmes plus âgées sont entrées sur le marché du travail depuis janvier, mais le manque d’occasions de formation professionnelle les empêche d’être plus nombreuses. Cela rend ce groupe différent des femmes plus jeunes, plutôt confrontées à des obstacles en matière de garde d’enfants, a souligné l’économiste Carrie Freestone, de la Banque Royale.
« Ce sont aussi les groupes de femmes qui étaient les plus vulnérables au coronavirus et (…) elles ne veulent pas nécessairement retourner à des emplois où les contacts physiques sont plus courants, mais cherchent tout de même un emploi », a-t-elle ajouté.
« Dans cette situation, les femmes matures sont plus susceptibles d’avoir besoin de ces compétences supplémentaires et de leur reconversion, en particulier de nos jours, compte tenu des avancées technologiques de nombreux postes. »
Malgré les gains pour les travailleurs âgés, le taux d’emploi des plus de 55 ans était de 1,2 point de pourcentage inférieur en mars à celui de février 2020.
Katherine Scott, chercheuse principale au Centre canadien de politiques alternatives, a souligné que ce résultat pourrait être attribuable à plusieurs facteurs. Elle a notamment évoqué le vieillissement de la population et les femmes âgées qui prennent leur retraite, parfois pour s’occuper de membres de la famille, ou qui occupent des emplois à faible salaire qui ne se sont pas encore complètement rétablis.
« C’est un vrai défi parce qu’il s’agit d’un groupe économiquement vulnérable, qui peut avoir, ou pas, un long historique d’emploi, et qui peut avoir, ou pas, un revenu de pension privée », a expliqué Katherine Scott.
« Ainsi, le fait de quitter le marché du travail entre le milieu et la fin de la cinquantaine peut paver la voie à des années de retraite très difficiles sur le plan économique. »
Avec plus de 900 000 postes vacants en janvier, qui sont les chiffres les plus récents disponibles de Statistique Canada, le rapport sur la population active note qu’un autre bassin potentiel de travailleurs est celui des personnes âgées de 55 ans et plus. Dans l’ensemble, les gains d’emplois pour ce groupe se sont élevés à 39 300 en mars.
Le taux de chômage se serait établi à 7,2 % si les calculs de Statistique Canada avaient tenu compte des personnes qui voulaient un emploi, mais n’en cherchaient pas, retombant ainsi pour la première fois à ses niveaux d’avant la pandémie.
Depuis qu’il a atteint un sommet de 1,5 million en avril 2020 au début de la pandémie de COVID-19, le nombre de personnes souhaitant travailler, mais ne recherchant pas activement un emploi, a plongé à 377 000. La taille de ce groupe et sa proportion par rapport à la population active le mois dernier étaient ainsi similaires à celles du mois de mars des trois années précédant la pandémie.
Selon Statistique Canada, les raisons pour lesquelles ces personnes ne cherchaient pas de travail variaient.
Un peu plus du quart ne suivaient pas le marché en raison d’une maladie ou d’un handicap. Un autre cinquième faisait partie d’un groupe de personnes qui attendaient un rappel ou la réponse d’un employeur, ou qui étaient découragées de chercher parce qu’elles croyaient qu’il n’y avait rien de disponible. Près d’un autre cinquième ont indiqué que leurs responsabilités personnelles et familiales expliquaient l’interruption de leur recherche d’emploi.