Le gouvernement fédéral prévoit faire passer le taux d’inclusion des gains en capital de la moitié aux deux tiers sur les gains en capital de plus de 250 000 $ réalisés annuellement par les particuliers et sur tous les gains en capital réalisés par les sociétés et les fiducies.
Le nouveau taux majoré entrera en vigueur le 25 juin 2024 a annoncé le gouvernement dans le cadre de son budget fédéral 2024.
Le taux d’inclusion des gains en capital jusqu’à 250 000 $ réalisés annuellement par les particuliers demeurera à 50 %.
« En augmentant le taux d’inclusion des gains en capital, nous nous attaquons à l’un des éléments les plus régressifs du système fiscal canadien », a déclaré le gouvernement dans le document budgétaire. Le taux d’inclusion actuel de 50 % sur les gains en capital profite de manière disproportionnée aux riches, qui tirent relativement plus de revenus des gains en capital que la classe moyenne, estime le gouvernement.
Le gouvernement a également proposé de relever le montant de l’exonération cumulative des gains en capital (ECGC) à 1,25 million de dollars (M$) de gains en capital. L’ECGC était de 1 016 836 dollars pour 2024 et était indexé à l’inflation.
La hausse de l’ECGC à 1,25 M$ s’appliquerait à compter du 25 juin 2024. L’indexation reprendrait en 2026.
Le gouvernement a aussi proposé un nouvel incitatif pour les entrepreneurs canadiens, qui réduirait le taux d’imposition des gains en capital sur la disposition d’actions admissibles d’une société exploitant une petite entreprise par un particulier admissible.
L’augmentation du taux d’inclusion des gains en capital proposée par le gouvernement amènera les investisseurs, dans les semaines à venir, « à se demander s’ils veulent accélérer le paiement de leurs impôts afin de payer moins d’impôts maintenant qu’ils n’en paieront peut-être dans plusieurs années », réagit Brian Ernewein, conseiller principal chez KPMG à Ottawa.
Jamie Golombek, directeur gestionnaire, Planification fiscale et successorale chez Gestion privée CIBC, à Toronto, a déclaré que l’augmentation proposée du taux d’inclusion des gains en capital s’appliquerait à un nombre relativement restreint de personnes : celles qui réalisent plus de 250 000 dollars de gains en capital au cours d’une année.
« Mais pour les investisseurs qui réalisent régulièrement des gains en capital dans un portefeuille, c’est maintenant l’occasion d’envisager d’en réaliser beaucoup avant le 25 juin pour profiter du taux d’inclusion garanti de 50 % sur certaines parties d’un portefeuille qui concordent du point de vue de la répartition des actifs », analyse Jamie Golombek. Les personnes qui, par exemple, vendent une résidence secondaire pour laquelle l’exemption pour résidence principale n’est pas disponible, ou une entreprise, sous réserve de la disponibilité de l’ECGC, peuvent se retrouver autour du seuil de 250 000 dollars.
« Cela donne également aux investisseurs une nouvelle occasion de se demander si, chaque année à partir de maintenant, ils veulent ou non réaliser 250 000 dollars de gains en capital dans le but de bénéficier du taux de 50 % plutôt que du taux de deux tiers », indique Jamie Golombek.
Selon Brian Ernewein, les investisseurs qui détiennent des investissements dans une société devront se demander s’il est encore judicieux de le faire. « [Il] y aurait un coût supplémentaire, même sur les premiers 250 000 dollars de gains réalisés par la société », par rapport aux gains réalisés à titre personnel.
Ces investisseurs devront se demander s’il existe un moyen de sortir ces investissements de la société sans payer un gros montant d’impôt, estime Jamie Golombek. « C’est la discussion qu’ils devront avoir avec leur comptable et leur conseiller fiscal pour déterminer le coût de la liquidation de la société et si elle a encore un sens. »
L’augmentation proposée du taux d’inclusion des gains en capital générerait 19,4 milliards de dollars (G$) de recettes fiscales sur cinq ans, la part du lion – 6,9 G$ – étant perçue dès la première année d’imposition, selon les estimations du gouvernement.
Selon Brian Ernewein, Ottawa s’attend probablement à ce que les investisseurs procèdent à des ventes d’actifs avant le 25 juin afin de comptabiliser les gains en capital au taux d’inclusion actuel de 50 %. « C’est la raison pour laquelle on constate une augmentation significative des recettes en 2024-25 », explique-t-il.
Cependant, au cours des deuxième et troisième années, la mesure proposée ne rapporterait que 3,5 G$ et 375 M$, respectivement. « Après avoir vendu, les premiers [investisseurs] ne vendront pas plus tard », calcule Brian Ernewein.
Au cours des quatrième et cinquième années, la mesure rapportera environ 3,7 G$ et 5,1 G$, respectivement, à mesure que les effets de la mesure proposée seront entièrement absorbés et que les recettes reviendront à un niveau stable, selon un fonctionnaire du ministère des Finances.
Le seuil de 250 000 $ s’appliquerait effectivement aux gains en capital réalisés par une personne physique, soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire d’une société de personnes ou d’une fiducie, nettes de toute perte en capital de l’année en cours ou d’autres années appliquées pour réduire les gains en capital de l’année en cours.
Le seuil s’appliquerait également après déduction des gains en capital pour lesquels l’ECGC, l’exemption proposée pour les fiducies de propriété des employés ou l’incitatif proposé pour les entrepreneurs canadiens sont demandés.
Règles transitoires pour tenir compte des deux taux de gains en capital
Pour les années d’imposition commençant avant le 25 juin et se terminant le 25 juin ou après, deux taux d’inclusion différents s’appliqueraient. Par conséquent, des règles transitoires seraient nécessaires pour identifier séparément les gains et pertes en capital réalisés avant la date d’entrée en vigueur (période 1) et ceux réalisés à la date d’entrée en vigueur ou après (période 2).
Le seuil annuel de 250 000 $ pour les particuliers serait entièrement disponible en 2024 – c’est-à-dire qu’il ne serait pas calculé au prorata – et s’appliquerait aux gains en capital nets réalisés au cours de la période 2.
« Pour 2024, les règles de transition vont rendre les choses assez compliquées pour tous les comptables qui ont été assez frustrés par les règles de déclaration des fiducies, les règles sous-utilisées de la taxe d’habitation, etc. Cela va compliquer sérieusement la période de déclaration des revenus de 2024, où il y a en fait deux périodes – vous devez suivre les gains avant et après une certaine date. »
Les bénéficiaires de la déduction pour les options d’achat d’actions accordées aux salariés se verraient accorder une déduction d’un tiers de l’avantage imposable afin de refléter le nouveau taux d’inclusion des gains en capital, mais auraient droit à une déduction de la moitié de l’avantage imposable jusqu’à une limite combinée de 250 000 $ pour les options d’achat d’actions accordées aux salariés et pour les gains en capital.
Les pertes en capital nettes des années précédentes continueraient à être déductibles des gains en capital imposables de l’année en cours en ajustant leur valeur pour refléter le taux d’inclusion des gains en capital compensés. Cela signifie qu’une perte en capital réalisée avant le changement de taux compenserait entièrement un gain en capital équivalent réalisé après le changement de taux.
Le gouvernement a indiqué que d’autres modifications seraient apportées à la législation pour refléter le nouveau taux d’inclusion, et que des détails supplémentaires seraient publiés dans les mois à venir.