Plus de la moitié (56 %) des Américains sont convaincus que les États-Unis traversent une récession économique, selon un récent sondage mené par l’institut Harris pour le compte du journal britannique The Guardian réalisé auprès de 2119 adultes américains du 10 au 12 mai 2024. Or, la situation réelle est toute autre.

Près de 58 % des personnes interrogées dans le cadre de cette étude croient que l’économie américaine se dégrade à cause de la mauvaise gestion de l’administration de Joe Biden, rapporte Courrier International.

Pourtant, les États-Unis ne subissent pas une vraie récession. Ils sont plutôt le théâtre d’une déprime générale, selon le chroniqueur du New York Times Paul Krugman, qui y voit plutôt une « vibecession », un terme qui fait référence à une déconnexion entre l’économie d’un pays et la perception négative qu’en a le grand public.

Biais de perception

Les Américains semblent avoir chaussé une paire de lunettes aux verres déformants pour considérer l’économie de leur pays, car celui-ci affiche plutôt une solide croissance depuis la pandémie.

La croissance annualisée s’est élevée à 1,6 % au premier trimestre de 2024 aux États-Unis après deux trimestres de forte croissance en 2023. Il faut remonter à la première moitié de l’année 2022 pour trouver un trimestre négatif chez l’oncle Sam. Depuis, l’économie américaine est en croissance, malgré l’inflation et la hausse des taux d’intérêt.

Par ailleurs, près de la moitié des répondants au sondage (49 %) croient que le chômage a atteint son plus haut niveau aux États-Unis depuis ces cinquante dernières années, alors qu’il se situe sous les 4 %, soit quasiment son niveau le plus bas en cinq décennies.

Le même pourcentage de sondés pensent que le S&P 500, l’indice des 500 grandes entreprises américaines, est en baisse, alors qu’il a progressé de 24 % en 2023 et monte de 12 % depuis le début de l’année.

Ce biais de perception des Américains à l’égard de leur économie est d’autant plus surprenant que d’autres sondages montrent que la plupart des électeurs ont une vision positive de leur propre situation financière et de l’état de l’économie dans leur région, souligne Paul Krugman. Selon lui, cette perception reflète un décalage entre la réalité et de « mauvaises ondes » à l’échelle nationale.

Un nuage gris sur les élections présidentielles

Cette vague de pessimisme, surtout présente chez les électeurs républicains, selon le sondage, pourrait peser sur les prochaines élections présidentielles américaines, alors que l’actuel président, Joe Biden, est tenu responsable de cette supposée récession.

Cette perception morose des Américains reflète également les conséquences de la hausse des prix et des taux d’intérêt sur le moral des consommateurs au cours des deux dernières années, qui a réduit le pouvoir d’achat de millions de ménages des États-Unis.

Selon Bloomberg, le revenu disponible des ménages a augmenté de 2,9 % sous la présidence de Joe Biden, alors qu’il avait augmenté de 12,4 % sous celle de Donald Trump. Cependant, en comparaison, la croissance du PIB a été de 11,1 % sous la présidence Biden, comparativement à 7,4 % sous Trump, selon une compilation de Radio-Canada.

Au Canada aussi, une majorité de citoyens estiment que la hausse du coût de la vie continue d’avoir des effets négatifs sur le portefeuille des ménages. Selon un sondage Léger, réalisé entre le 17 et le 19 mai auprès de 1519 Canadiens de 18 ans et plus, les consommateurs pensent que l’inflation s’aggrave à l’épicerie par rapport à il y a un an ou deux, alors que l’augmentation des prix a considérablement ralenti depuis un an, que l’inflation revient vers sa cible de 2 % et que la Banque du Canada a annoncé une baisse de son taux directeur au début du mois.