Même si l’arrivée possible de trois vaccins contre la COVID-19 nourrit l’espoir d’une reprise économique, les grandes banques canadiennes devraient continuer de jouer la carte de la prudence lorsqu’elles dévoileront leurs résultats financiers cette semaine, disent des experts.
« On voit le cours des actions réagir aux améliorations potentielles de l’économie qui sont fort prometteuses », reconnaît James Shanahan, analyste principal de recherche sur les actions pour les services financiers nord-américains de la firme Edward Jones.
« Le fait que le vaccin puisse arriver dans six mois ou être largement disponible dans neuf mois ne fait pas grand-chose pour aider les banques aux prises avec des prêts en souffrance ou les emprunteurs en difficulté. »
Bien que Pfizer, Moderna et AstraZeneca aient vanté jusqu’à présent des vaccins dont les taux d’efficacité seraient supérieurs à 90% dans les essais, James Shanahan pense que les banques ne s’empresseront pas d’intégrer ces points positifs dans leurs perspectives. Selon lui, l’accent sera plutôt mis sur la résilience à long terme lorsqu’elles dévoileront leurs résultats du quatrième trimestre.
Le trimestre marque la fin d’une année rocambolesque que personne n’avait prévu, il y a 12 mois. Lorsque la pandémie du COVID-19 a commencé, les institutions financières ont dû déchirer leurs plans et commencer à se préparer pour les mauvais jours à venir. Leurs clients perdaient leurs emplois, certains devant même déclarer faillite. Les six principales banques canadiennes ont mis de côté des sommes record, au moins 16,5 milliards de dollars (G$), pour couvrir les défauts de paiement.
James Shanahan dit que cette tendance commencera à s’atténuer. « En raison de l’importante constitution de réserves, les grandes banques n’auront pas besoin de prévoir des pertes de revenus importantes à moins qu’il n’y ait un grand changement économique dans l’environnement matériel », explique-t-il.
Deux analystes de la CIBC, Paul Holden et Kevin Lai, ont fait des prédictions semblables dans une note aux investisseurs. Ils estiment que les provisions pour pertes sur créances, l’argent que les banques mettent de côté pour couvrir les créances douteuses, diminueront de 20 % d’un trimestre à l’autre.
Le Groupe Banque TD, la Banque de Montréal (BMO) et la Banque Scotia connaîtront probablement la plus forte baisse des provisions en raison des montants qu’ils ont mis de côté au trimestre précédent, disent MM. Holden et Lai.
La TD a mis de côté 2,19 G$, la Banque Scotia 2,18 G$ et la BMO 1,05 G$ au troisième trimestre.
Les analystes de la CIBC prévoient une baisse du bénéfice par action ajusté de 2% en moyenne par rapport au trimestre précédent, bien qu’ils estiment que la Banque Scotia et la TD connaîtront une augmentation en raison de la modification des provisions pour pertes sur prêts.
Soulignant la difficulté de noter la performance des institutions financières dans son ensemble, deux analystes de Barclays John Aiken, Joseph Ng et Aria Samarzadeh, prévoient une chute des bénéfices de 21 $ pour l’ensemble des banques canadiennes par rapport à l’année précédente. Ils avancent qu’elles adopteront diverses approches au sujet de leurs dépenses.
Tous deux s’attendent à une forte reprise en 2021, mais maintiennent que la croissance des bénéfices sera « assez modeste » en 2022 à cause des conditions difficiles.
Certains secteurs, comme le tourisme, la vente au détail et le divertissement, ne seront plus jamais les mêmes. Même si les restrictions gouvernementales devaient être entièrement levées, certaines personnes pourraient encore hésiter à revenir à la vie pré-pandémie, soutiennent les analystes. « Avec la plus forte baisse économique depuis la Grande Dépression, nous soutenons que la voie de la reprise reste incertaine et prendra du temps. »