Le programme de la Sécurité de la vieillesse comporte un volet appelé le supplément de revenu garanti (SRG). Celui-ci vise particulièrement à aider les aînés à très bas revenu afin de leur permettre de combler les besoins de base. Un genre d’aide sociale, un filet de sécurité pour tous les Canadiens.
Pour y avoir droit, il faut recevoir en premier lieu la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), donc avoir au moins 65 ans. La PSV, pour le dernier trimestre de 2021, est d’une valeur de 635,26 $. Les prestataires ayant un revenu individuel net surpassant 79 845 $ peuvent toutefois voir leur montant être réduit, puis disparaitre si ce revenu net atteint 129 757 $. Le seuil passera à 81 761 $ en 2022.
La prestation de SRG, pour un individu célibataire, est composée de deux portions qui peuvent disparaître beaucoup plus rapidement :
- Une prestation de base de 801,86 $ par mois (9 622 $ par année) récupérée à raison de 50 % des revenus déclarés. Ainsi, une fois à 19 248 $, cette composante devient nulle.
- Une prestation complémentaire de 146,96 $ par mois (1 764 $ par année), récupérée à raison de 25 % des revenus déclarés excédant 2 000 $. Ainsi, à 9 056 $, cette composante devient nulle.
Les montants du SRG diffèrent pour les couples et tiennent en compte le revenu familial. La PSV est imposable, mais pas le SRG.
En ce qui concerne les revenus déclarés pour le SRG il ne faut pas considérer le revenu de la PSV. De plus, une exception concerne spécifiquement le revenu d’emploi ou de travail autonome. Le premier 5 000 $ est exempté, puis pour le 10 000 $ suivant, l’exemption est de 50 %.
Lorsque ces personnes admissibles ont vu leur revenu d’emploi cesser lors de la période de COVID-19, ils ont pu avoir recours aux prestations de PCU/PCRE. Ces dernières ne rencontraient pas la définition de revenu d’emploi ou de travail autonome. Ces revenus de 2020 n’étant pas exemptés, en conséquence, le SRG de juillet 2021 a été diminué.
L’Union des consommateurs revendiquait le 12 octobre dernier une révision d’urgence de la situation. Luc Godbout, directeur de la chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques (CFFP), expliquait bien cette iniquité lors d’un entretien àRDI en août dernier.
Voici l’exemple d’une personne ayant un revenu d’emploi de 10 000 $ par année et une RRQ de 5 000 $. Dans la situation « A », l’exemption est alors de 7 500 $. Ainsi, la prestation de base est réduite de 3 750 $ (50 % de 7 500$). La base recalculée produit un montant annuel de 5 872 $. Pour le complément, l’exemption est de 9 500 $, car il y a 2 000 $ de plus. Le revenu non exempté est alors de 5 500 $, créant une récupération de 1 375 $, soit 25 %. Le complément est ainsi établi à 389 $. L’addition des deux composantes donne une valeur de 6 261 $.
Pour la situation « B », le revenu de 10 000 $ est remplacé par un salaire de 2 000 $ et des prestations d’urgences de 8 000 $. Dans ce cas, la réduction de la prestation de base est de 50 % sur la valeur de 13 000 $ (soit la RRQ et les PCU/PCRE), donc 6 500 $, pour un montant payable de 3 122 $. En ce qui concerne le complément, puisque le revenu considéré est de 11 000 $ (13 000 $ moins 2 000 $), le complément devient nul. L’écart est ainsi de 3 139 $, soit 6 261 $ moins 3 122 $. Cela correspond à une perte sèche de 60 $ chaque semaine, ce qui est énorme dans un budget de personnes à faible revenu.
Ces personnes avaient alors la possibilité de se prévaloir d’un mode de calcul basé sur le revenu prévu pour l’année en cours, plutôt que sur celui de l’année précédente. Ce genre de processus requiert toutefois de remplir le formulaire ISP-3041. Il s’agit d’un formulaire habituellement utilisé lors d’une baisse soudaine de revenus et qu’il n’est pas courant de remplir.
De même, effectuer une demande spéciale sur la base du revenu prévu n’est pas sans danger. Si le revenu réel excède finalement le revenu estimé, le bénéficiaire peut devoir être amené à rembourser les prestations de SRG reçues… ce qui ajoute d’autres complications.
Dans sa mise à jour budgétaire déposée le 14 décembre, le gouvernement propose donc de verser jusqu’à 742,4 millions de dollars pour effectuer des paiements ponctuels qui atténueront les difficultés financières des bénéficiaires du SRG. Il semble toutefois que les ajustements pourraient n’arriver qu’au printemps 2022. Les bénéficiaires devront donc prendre le mal en patience.
Aussi, la mécanique visant le calcul de l’ajustement ponctuel qui aura lieu n’est pas encore connue. On peut néanmoins souligner l’ouverture du Ministre des Finances face aux multiples revendications survenues depuis l’été 2021.
Daniel Laverdière est directeur principal, Centre d’expertise, Banque Nationale, Gestion privée 1859.