Tours de banque modernes à Francfort en fin d’après-midi, capturées en grand angle.
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Les dirigeants des plus grandes banques canadiennes voient enfin les risques liés au renouvellement des prêts hypothécaires s’atténuer, mais les inquiétudes concernant les tarifs douaniers et l’incertitude politique prennent le dessus.

« Je pense que les tarifs peuvent faire beaucoup de dégâts », a déclaré mardi le chef de la direction de RBC, Dave McKay, lors d’une conférence des dirigeants de banques organisée par RBC Marchés des capitaux.

« Il est décevant d’entendre la rhétorique s’intensifier, alors que nous pensions qu’elle s’atténuait dans une certaine mesure », a-t-il ajouté.

Ces inquiétudes surviennent alors que le nouveau président américain Donald Trump a menacé d’imposer un tarif de 25 % sur les importations canadiennes et mexicaines en raison de ce qu’il dit être des préoccupations concernant la sécurité des frontières.

Dave McKay a affirmé que la question n’était pas seulement de savoir si les États-Unis imposeraient des tarifs, mais s’ils seraient larges ou ciblés, ainsi que la durée pendant laquelle ils pourraient rester en place.

« Cela suscite des inquiétudes chez tout le monde quant au fait que cela causera des dommages économiques, et nous ne sommes pas sûrs des objectifs qu’il essaie d’atteindre », a-t-il déclaré. La banque se prépare à divers scénarios, a indiqué Dave McKay.

L’incertitude politique au Canada

Le chef de la direction de la CIBC, Victor Dodig, a affirmé qu’il était également préoccupé par les risques, mais qu’il espérait que les dommages que les tarifs douaniers causeraient aux deux pays deviendraient évidents.

« Je suis sûr que les esprits sensés prévaudront en ce qui a trait à l’examen de la nature intégrée de notre économie et de la façon dont nous pouvons faire avancer les choses au profit des consommateurs et des entreprises américains et canadiens », a-t-il soutenu.

Il a affirmé que, quel que soit le résultat, la banque s’en sortira comme elle l’a fait pendant la pandémie, en contrôlant ce qu’elle peut – et le Canada devrait faire de même avec des mesures comme un accord de libre-échange interne.

« Commençons par régler les problèmes chez nous », a-t-il fait valoir.

Il ne sera toutefois pas facile de progresser à l’échelle du pays, le premier ministre Justin Trudeau ayant annoncé lundi qu’il avait demandé la prorogation du Parlement jusqu’au 24 mars et qu’il se retirerait après une course à la direction du Parti libéral.

L’incertitude quant à savoir qui dirigera les libéraux et ce qui se passera avec les élections de cette année affectera probablement les investissements au Canada, a déclaré le chef de la direction de la BMO, Darryl White.

« Que font les gens lorsqu’ils sont incertains? Ils attendent. Cette attente, qui est une conséquence naturelle de l’incertitude, commence à se faire sentir un peu au Canada », a-t-il indiqué.

Cela contraste avec les États-Unis, où il y avait eu plus d’incertitude il y a un an concernant le gouvernement, les taux d’intérêt et la politique réglementaire.

« Vous pouvez dire ce que vous voulez sur le résultat, mais la plupart de cette incertitude a été levée, a noté Darryl White. Mettez de côté le drame, il y a clairement un programme de croissance auquel les gens adhèrent. »

Le « grand renouvellement » des prêts hypothécaires

L’incertitude sur le front politique contraste avec le marché hypothécaire canadien, qui est le principal sujet de préoccupation des banques depuis quelques années.

Les inquiétudes liées aux prêts hypothécaires s’atténuent depuis que la Banque du Canada a commencé à abaisser son taux d’intérêt directeur l’année dernière jusqu’à un taux désormais de 3,25 %. De nouvelles baisses de taux sont attendues dans les mois à venir.

Les emprunteurs ont bien géré le « grand renouvellement » des prêts hypothécaires, l’expression utilisée par les analystes pour décrire l’ajustement des emprunteurs à des taux beaucoup plus élevés que ceux auxquels ils avaient souscrit au début de la pandémie. Malgré les taux plus élevés, les niveaux de défaillance restent inférieurs à ceux d’avant la pandémie.

Environ 60 % des clients de la RBC devraient renouveler à des taux plus bas, a noté Dave McKay.

« Lorsque nous examinons les chocs globaux liés aux paiements, ils se sont considérablement décompressés », a-t-il soutenu.

De nombreux Canadiens sont toujours aux prises avec des paiements plus élevés, qui ont également pesé sur l’économie, mais cela ne fait que renforcer l’opinion selon laquelle la Banque du Canada continuera de réduire de manière prononcée les taux à court terme, a-t-il noté.

Le chef de l’exploitation de la TD, Raymond Chun, qui devrait prendre les fonctions de chef de la direction en avril, a déclaré que la banque avait déjà constaté une reprise de l’activité à la fin de l’année dernière.

« Nous avons certainement constaté une reprise notable au quatrième trimestre des ventes et des volumes hypothécaires au sein de la TD et dans l’ensemble du secteur, et ce, avant même que l’effet complet des deux baisses de 50 points de base ne se soit vraiment fait sentir », a-t-il fait valoir.

Raymond Chun a noté qu’environ un tiers des prêts hypothécaires qui doivent être renouvelés au cours des deux prochaines années seront probablement à des taux inférieurs.

« Du point de vue de la gestion du risque de crédit, vous avez probablement déjà vu le haut de la fourchette », a-t-il indiqué.