Il semble en effet que l’état de l’économie canadienne permettra une première hausse de taux, probablement au mois d’octobre, selon Stéfane Marion et Paul-André Pinsonnault, économistes à la Financière Banque Nationale.
On se souviendra qu’en 2015 la BdC avait coupé son taux directeur de moitié, celui-ci passant de 1,00% à 0,50%. Elle réagissait alors à la chute du prix du pétrole qui, en tombant sous la barre des 30$US, à l’époque menaçait ce secteur névralgique de l’économie canadienne. Pour la banque centrale, il s’agissait de s’assurer que les autres secteurs de l’économie pourraient plus facilement s’ajuster à cette nouvelle situation.
«Deux ans et demi plus tard, le temps est venu de retirer cette police d’assurance de 0,50% et de ramener le taux directeur à 1%», disent les économistes de la Financière.
Bien sûr, le prix du pétrole s’est redressé et fluctue maintenant entre 45$ et 50$US. Mais il y a plus. «Les chiffres de l’emploi pour le mois de mai ont surpris par leur vigueur alors que les emplois à temps plein bondissaient», disent-ils. En effet, 196000 emplois à temps plein dans le groupe d’âge de 24 à 54 ans ont été créés au cours des 7 derniers mois, soit la meilleure performance des 20 dernières années, estiment-ils.
La BdC pourrait effectuer une première hausse de taux dès le mois de juillet, disent certains, mais à la Financière on croit plutôt que les décideurs de la banque centrale seront patients et attendront plutôt jusqu’en octobre.
Chez Desjardins, on devance également le moment d’une première hausse de taux.
L’équipe d’économistes de Desjardins, qui ne croyait pas que la banque centrale bougerait avant 2018, voit maintenant une hausse en octobre également, tout en excluant pas la possibilité d’une hausse dès juillet.
«Étant donné une meilleure tenue du secteur pétrolier, on peut se permettre de retirer la détente monétaire qui visait à contrecarrer les effets nocifs de la chute su prix du pétrole», dit également l’économiste en chef François Dupuis. De plus, la forte croissance de l’économie canadienne au cours des derniers trimestres a eu comme effet de faire diminuer grandement les capacités excédentaires, ajoute-t-il.
Toutefois, la hausse des taux d’intérêt sera très graduelle, croit M. Dupuis. «Après une première hausse probablement en octobre, la seconde surviendra seulement six mois plus tard», dit-il.
Si les économistes semblent pour la plupart d’avis qu’il est inévitable que les taux d’intérêt au Canada montent bientôt, certains gestionnaires de portefeuilles sont un peu plus sceptiques.
C’est le cas de Guy Liébart, président de Gestion Sodagep, qui croit qu’il est trop tôt pour conclure que la vigueur de l’économie canadienne nécessite une hausse de taux. Ce sont les chiffres du deuxième et du troisième trimestre qui le confirmeront. «Il y a bien le secteur de l’énergie qui a pris du mieux, mais le commerce extérieur a de la difficulté, surtout que le dollar canadien reprend du tonus», dit-il.
Le gestionnaire rappelle également que les ménages canadiens sont très endettés. Augmenter les taux d’intérêt dans un tel contexte, c’est un pensez-y bien, selon lui.
Reste que les autorités monétaires canadiennes ont la délicate tâche de freiner les ardeurs des acheteurs immobiliers dans certaines régions du pays, notamment à Toronto et à Vancouver. Laisser flotter l’idée d’un resserrement des conditions de crédit pourrait contribuer à calmer le jeu.