Plusieurs regroupements et réseaux de gens d’affaires ont commenté par voie de communiqué l’Énoncé économique présenté par la ministre des Finances du Canada, l’honorable Chrystia Freeland. Voici un bref survol.
Un retour à l’équilibre budgétaire ignoré
Dans son communiqué, la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain (CCMM) salue d’abord les mesures ciblées qui aideront à résorber la crise du logement, estimant que « le défi sera de s’entendre avec les provinces et de s’assurer que les gouvernements locaux aient la capacité d’autoriser rapidement le démarrage des projets d’habitation », déclare Michel Leblanc, président et chef de la direction de la CCCM.
La CCMM déplore toutefois que « les énoncés budgétaires récents omettent systématiquement toute trajectoire d’un retour éventuel à l’équilibre budgétaire ».
« Nous réitérons que le secteur privé sera d’autant plus rassuré d’investir s’il sait que le retour à l’équilibre des finances publiques du pays ne passera pas par une hausse future des taxes et des impôts », ajoute Michel Leblanc.
Un soutien aux entrepreneurs négligé
En écho à la CCMM, la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) se réjouit également des mesures annoncées en matière d’habitation.
Cela dit, la FCCQ rappelle que la problématique concernant l’accès au logis, notamment dans les régions québécoises, va au-delà des liquidités, arguant que le parcours du combattant, autant pour ceux qui cherchent à construire des logements que pour ceux qui cherchent à en occuper un, doit impérativement cesser.
« Non seulement le promoteur se heurte à une multitude d’autorisations, à des démarches administratives qui amènent des délais supplémentaires, mais aussi à des matériaux plus dispendieux et un manque de main-d’œuvre. En ce sens, les mesures gouvernementales permettant d’accroître l’accès à des travailleurs de la construction sont les bienvenues », affirme Charles Milliard, président-directeur général de la FCCQ.
En ce qui a trait aux plateformes numériques d’hébergement touristique, la FCCQ incite le gouvernement fédéral à la prudence, faisant valoir que « [l]lorsqu’il y a un cadre réglementaire équitable pour l’ensemble des acteurs touristiques, ces plateformes apportent une plus-value en termes d’offre touristique et des retombées régionales ».
Ainsi, « la FCCQ plaide davantage pour la construction massive et soutenue de logements, ainsi que la conversion de vocation lorsque possible, pour nous permettre à long terme de régler ce problème qui est ressenti largement dans l’ensemble des régions du Québec ».
À l’instar de la CCMM, la FCCQ se désole aussi que le gouvernement n’ait pas de véritable plan de retour à l’équilibre budgétaire, les prévisions d’années déficitaires s’étant accentuées avec cet énoncé économique.
« […] à pareille date l’année dernière, rappelle la FCCQ dans son communiqué, les prévisions pour 2027-2028 étaient des surplus budgétaires, pour passer au printemps dernier à un solde budgétaire négatif de 14 G$ pour cette même année et à présent, 12 mois plus tard, un déficit de 23,8 G$ ».
Finalement, étant donné le contexte économique difficile et le niveau d’endettement de plusieurs entreprises, la FCCQ juge que le gouvernement fédéral devrait reporter la date limite de remboursement des prêts au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC) au minimum jusqu’en janvier 2025.
Pas de mesure pour aider les PME
Dans le même ordre d’idée, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) se dit « profondément déçue de constater que l’Énoncé économique de l’automne 2023 du gouvernement fédéral ne prévoit aucune mesure pour aider les PME à faire face à leurs défis actuels », notamment en ce qui a trait à la date limite de remboursement du CUEC.
« C’est très décevant puisque 2 PME sur 3 n’ont pas l’argent pour rembourser le prêt du CUEC et la dette pandémique s’élève à 126 000 $ en moyenne. Les PME qui n’arriveront pas à rembourser la totalité du prêt d’ici le 18 janvier 2024 pourraient donc voir leur dette augmenter de 50 %, ce qui peut mettre à risque un quart de million d’entreprises », prévient Jasmin Guénette, vice-président des Affaires nationales à la FCEI.
Quant à la réduction du fardeau fiscal, la FCEI déplore le fait qu’Ottawa n’ait présenté aucune mesure.
« Avec la hausse des taux de cotisation à l’Assurance-emploi et au Régime de pensions du Canada prévue le 1er janvier et la hausse déjà prévue de la taxe carbone et de la taxe d’accise sur l’alcool le 1er avril, le gouvernement ne fait qu’augmenter les coûts d’exploitation des PME et réduit également le pouvoir d’achat des Canadiens », dénonce Jasmin Guénette.
Comme la CCMM et la FCCQ, la FCEI est déçue que le gouvernement n’ait pas présenté d’échéancier clair pour le retour à l’équilibre budgétaire.
Finalement, parmi les quelques points positifs, la FCEI accueille favorablement les mesures annoncées concernant la modernisation du cadre en matière de concurrence, de mobilité interprovinciale de la main-d’œuvre et celles sur les fiducies collectives des employés.
Un avant-goût du budget 2024
L’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) se réjouit elle aussi des efforts déployés par le gouvernement fédéral pour accélérer la construction de logements et favoriser une meilleure abordabilité, ajoutant qu’ils « doivent être une prémisse pour le budget 2024 ».
« Il faut poursuivre le travail pour que chaque personne, sans exception, ait un toit en fonction de ses capacités et de ses besoins », souligne Paul Cardinal, directeur du Service économique à l’APCHQ.
Pour l’APCHQ, l’allocation de 15 G$ dédiée à la SCHL pour offrir un financement avantageux aux entreprises de construction de logements locatifs, l’éligibilité à une exemption de la TPS sur les nouveaux logements locatifs pour les coopératives d’habitation ainsi que l’instauration de la charte hypothécaire canadienne permettant entre autres de prolonger temporairement la période d’amortissement pour les détenteurs d’hypothèque à risque constituent des mesures particulièrement intéressantes.
Enfin, l’APCHQ soutient la création du projet de loi visant à mettre sur pied un ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Communautés pour améliorer la situation en matière de logement.
Un énoncé qui n’a rien d’encourageant
Pour le Conseil patronat du Québec (CPQ), cet énoncé économique, qui témoigne de la fragilité des finances publiques, « n’a rien d’encourageant pour les prochaines années ».
« Nous sommes préoccupés de voir le coût de la dette augmenter de façon fulgurante et limiter la marge de manœuvre du gouvernement. Alors que l’avenir est incertain, ces choix budgétaires empêchent de soutenir notre économie tel qu’attendu en période de ralentissement. Le CPQ avait averti le gouvernement sur l’impact de la mise en place de programmes coûteux et demandé un horizon pour le retour à l’équilibre », déclare Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ.
Malgré tout, le CPQ salue les investissements majeurs prévus pour la construction de logements, « même si cela prendra davantage de collaboration entre les ordres de gouvernement pour arriver à inverser la tendance ».
Par ailleurs, au lieu « d’ajouter de la réglementation, le gouvernement devrait mettre en place des mesures pour les aider comme le report, d’une année, du remboursement des prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes pour les PME », fait valoir Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche et économiste en chef du CPQ.