La question de l’impôt se pose au moment de la retraite pour les clients Canadiens qui ont accumulé au cours de leur vie de l’épargne dans des régimes de retraite américains.
Claudia Caron-Boutin et Irina Marinescu, respectivement associée et directrice principale du cabinet CFLA, ont présenté quelques stratégies pour réduire l’impact fiscal de ces régimes, lors du congrès de l’Association de planification financière et fiscale (APFF) tenu en octobre à Montréal.
Trois principaux fonds de pension américains sont visés, soit ceux les plus couramment détenus par des Canadiens, l’Individual Retirement Account (IRA), qui ressemble au REER, le 401(k), s’apparentant au régime de pension agréé (RPA), et le Roth IRA, similaire au compte d’épargne libre d’impôt (CELI).
Les règles d’imposition diffèrent pour ces trois régimes. Dans l’IRA, les revenus s’accumulent libres d’impôt et les contributions sont déductibles à condition de ne pas dépasser certains seuils de revenus.
Pour le 401(k), financé à la fois par l’employeur et par l’employé, les cotisations sont effectuées à partir du salaire avant impôt. Les contributions sont déductibles et les distributions imposables.
Les contributions effectuées dans le Roth IRA ne sont pas déductibles du revenu. Les retraits ne sont pas imposables lorsqu’ils sont effectués après l’âge de 59 ans et demi (et cinq ans après l’année d’imposition où la cotisation initiale a été versée).
Les paiements reçus d’un IRA et d’un 401(k) sont imposables aux États-Unis. De plus, une pénalité de 10 % s’applique si le retrait est effectué avant l’âge de 59 ans et demi.
Chez les non -résidents américains, les retraits font l’objet d’une retenue à la source de 30 %. Dans le cadre de la convention fiscale avec les États-Unis, les résidents canadiens bénéficient d’un taux d’imposition réduit de 15 %. Il n’est pas nécessaire de produire une déclaration de revenus aux États-Unis si la retenue de 15 % a déjà été appliquée, souligne la comptable professionnelle agréée.
Un choix fiscal à faire rapidement
Dans le cas du Roth Ira, le bénéficiaire doit faire un choix fiscal afin de bénéficier du report de l’imposition du revenu accumulé ainsi que de l’exonération d’impôt lors des retraits.
Ce choix doit avoir lieu au plus tard à la date d’échéance de production de la déclaration de revenus pour la première année de la résidence fiscale au Canada. Il n’est pas nécessaire de refaire ce choix pour les années suivantes.
Aucune cotisation ne doit être effectuée dans ce compte tant que le client est résident du Canada. Sinon, les revenus accumulés par la suite ne peuvent plus bénéficier du report d’imposition et les retraits qui dépassent le solde du compte à ce moment deviennent imposables
« Si on dépasse le délai de la première année, le report est cependant en pratique toujours accepté par l’Agence de revenu du Canada, selon nos observations », signale Irina Marinescu.
Transfert d’un IRA ou d’un 401(k) à un REER
Les Canadiens qui choisissent de rapatrier le solde de leur régime de retraite américain peuvent effectuer une contribution spéciale dans leur REER. Ils ont accès à une déduction d’impôt pour le montant du retrait transféré et n’ont pas besoin d’avoir des droits de cotisation non utilisés dans leur REER.
La stratégie consiste à effectuer un retrait du régime de retraite américain puis à verser le montant du retrait dans le REER. La distribution doit avoir lieu au courant de l’année ou dans les 50 jours suivant la fin de l’année, et elle n’affecte pas le maximum déductible au titre des REER du contribuable.
Il est également possible d’utiliser le crédit d’impôt pour revenu étranger afin de rendre le transfert neutre sur le plan de l’impôt. « Il y a un sweet-spot » à trouver », indique Claudia Caron-Boutin.
Le transfert doit se faire sur une année, précise la fiscaliste, car il n’est pas permis d’étaler des retraits périodiques du 401(k) sur plusieurs années.
Dans le cas du IRA, la déduction est permise si c’est le client ou son conjoint qui a contribué. « Cette mesure vise à exclure une personne qui hériterait d’un IRA et qui voudrait le transférer dans son REER », explique l’experte. De plus, le contribuable doit être âgé de 71 ans au maximum à la fin de l’année du transfert.
Le roulement d’un régime étranger
Une autre option consiste à effectuer un roulement du 401(k) dans l’IRA, puis de l’IRA dans le REER si le client a continué à cotiser dans le 401(k) alors qu’il était résident canadien.
« L’ARC n’accepte pas le roulement pour tous les régimes. Il faut bien examiner les critères pour chacun d’entre eux », indique la spécialiste.
Elle souligne que cette option ne s’applique pas, par exemple, au 403(b), un régime répandu dans le secteur universitaire et dans celui de la santé aux États-Unis.
Le roulement est également autorisé pour certains régimes d’autres pays, comme l’Australie, Hong-Kong, les Philippines, la Suisse et le Royaume-Uni.
« Ces stratégies sont intéressantes pour les résidents canadiens qui souhaitent consolider leurs actifs au Canada ou qui veulent réduire les impacts sur les droits successoraux », indique Claudia Caron-Boutin.
Les sommes héritées d’un régime IRA ou 401(K) sont en effet imposables au Canada. Le montant payé, incluant la plus-value, est aussi imposable aux États-Unis dans les mains de l’individu.
Il est possible de transférer en franchise d’impôt le solde du régime au conjoint survivant ou à un autre bénéficiaire, sous certaines restrictions. Le survivant peut par exemple se désigner comme le propriétaire du régime ou le rouler dans son propre IRA.
Il peut être également plus avantageux de faire des retraits du régime sur plusieurs années plutôt que d’effectuer un retrait en une seule fois.
Il faut retenir que les règles entourant le transfert d’un régime de retraite américain au REER d’un contribuable canadien sont complexes et qu’une bonne planification est primordiale afin d’éviter de payer des impôts des deux côtés de la frontière.