Nous avons demandé à nos panélistes :
Stephen Arpin, vice-président à Beutel, Goodman & Cie. Gestionnaire axé sur la valeur, M. Arpin est le gestionnaire principal du Fonds à petite capitalisation Beutel Goodman .
Ted Whitehead, directeur général et gestionnaire de portefeuille principal à Gestion d’actifs Manuvie. Gestionnaire axé sur la valeur, M. Whitehead utilise à la fois l’analyse quantitative et l’analyse fondamentale. Ses responsabilités comprennent la gestion du Fonds d’occasions canadiennes Manuvie et du Fonds d’occasions de croissance Manuvie .
Martin Ferguson, directeur et gestionnaire de portefeuille auprès de la société de Calgary Mawer Investment Management. Ses mandats comprennent le Fonds nouveau du Canada Mawer , fermé aux nouveaux investisseurs, et du Fonds d’entreprise BMO Guardian . Sa discipline est d’acheter des sociétés créatrices de richesses au rabais par rapport à leur valeur intrinsèque.
La discussion a été animée par la chroniqueuse de Morningstar Sonita Horvitch.
Question : Les actions canadiennes à petite capitalisation se sont sous-classées par rapport à leurs homologues à grande capitalisation en 2012. C’est la deuxième année consécutive de sous-classement. En 2012, l’Indice mixte (pondéré) des actions à faible capitalisation BMO, indice de référence pour l’univers des petites capitalisations canadiennes, a eu un rendement total de 2,5 % contre 7,2 % pour l’Indice composé S&P/TSX. Pourquoi?
Ted Whitehead : L’afflux de capitaux à la fois institutionnels et des particuliers continue de favoriser les actions de haute qualité versant des dividendes. Dans l’arène des petites capitalisations, le marché a puni les actions de ressources naturelles qui en sont aux stades de l’exploration et du développement. L’Indice à faible capitalisation BMO a une lourde pondération dans les matériaux et dans l’énergie. Les matériaux ont subi une perte de 8,8 % en 2012, et le rendement total pour l’énergie a été de -11,5 %.
Stephen Arpin : Il y a eu une fuite vers la qualité des investisseurs des fonds à petite capitalisation en 2012. Les actions qui ne versaient pas de dividendes ont été pénalisées, mais il faut examiner de plus près le rendement des actions versant des dividendes, et toutes ne se sont pas bien comportées. Nous avons trié les actions de l’Indice mixte (pondéré) des actions à faible capitalisation BMO, et nous avons vu que le marché faisait la différence entre les sociétés où les dividendes étaient perçus comme durables et celles où ils ne l’étaient pas.
Les sociétés à dividendes avec des ratios de paiement de moins de 70 % ont spectaculairement surclassé l’univers des petites capitalisations canadiennes, avec une augmentation moyenne des cours de 11,2 %. Pour celles qui avaient des ratios de paiement de plus de 70 %, l’augmentation moyenne des cours a été de 2,6 %. Enfin, les actions de sociétés qui ne versaient pas de dividendes ont chuté de 9,2 % en moyenne.
Martin Ferguson : La fuite vers la qualité sera l’un des thèmes de placement sous-jacents pour 2013, mais cela va diminuer alors que l’année s’écoulera. Les investisseurs demeureront craintifs à cause de notre économie à faible croissance et les risques qui s’y nichent. Toutefois, nous commençons à voir un certain enthousiasme pour les actions de croissance. Les investisseurs ont renforcé leurs portefeuilles par des obligations et des actions de premier ordre à haut rendement. Maintenant, ils réalisent que dans une économie à faible croissance on a besoin d’un peu de croissance en portefeuille pour y mettre un peu de piquant. D’ici la deuxième moitié de 2013, cet enthousiasme pour la croissance commencera à éclipser la fuite vers la qualité comme un des thèmes sous-jacents.
SA : Beaucoup des refuges sûrs du marché boursier canadien sont chers, comme l’immobilier et les services publics. Il n’y a pas beaucoup de sociétés de services publics dans l’univers des petites capitalisations. Mais quand on regarde une compagnie comme AltaGas ALA , elle se négocie à un ratio valeur d’entreprise/BAIIDA (bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) qui en est à un sommet par rapport à sa fourchette historique de valeur transactionnelle.
En tant que gestionnaires axés sur la valeur, il nous est plus difficile de trouver de nouvelles idées. Nous avons un seuil de rendements élevé. Notre objectif est d’identifier des actions qui nous donnent 100 % sur trois ou quatre ans. À la sortie de la crise financière mondiale, il y a eu beaucoup d’occasions dans les petites capitalisations, mais moins maintenant. Dans le cas des sociétés de ressources naturelles à petite capitalisation, alors que l’énergie et les matériaux ont généralement eu de mauvais résultats en 2012, le besoin se fait sentir d’examiner les rendements des différents sous-groupes au sein de ces secteurs.
Q : À part l’énergie et les matériaux, comment les secteurs se sont-ils comportés en 2012?
TW : Effectivement. Bien que le secteur des actions de matériaux à petite capitalisation ait connu un rendement total négatif en 2012, les actions du papier et des produits forestiers se sont exceptionnellement bien comportés, grâce à l’amélioration de l’économie américaine. En revanche, les actions aurifères ont eu de mauvais résultats et celles des minéraux ont été encore plus décevantes.
SA : Des huit secteurs restants, sept se sont bien comportés. Les valeurs industrielles, les biens de consommation discrétionnaire et les services financiers, qui ont des pondérations conséquentes dans l’Indice des actions à faible capitalisation BMO, ont produit un rendement total d’un peu moins de 20 %. Les actions à petite capitalisation ne relevant pas des marchandises ont donc eu en général de bons résultats. Seules les actions des soins de la santé, qui représentent une petite pondération dans l’indice, ont eu un rendement total modeste. Essentiellement, elles n’ont pas des flux de trésorerie positifs et ne versent pas de dividendes.
Q : Qu’en est-il de l’évaluation des actions à petite capitalisation par rapport à leurs homologues à grande capitalisation?
MF : Afin de comparer l’Indice composé S&P/TSX avec l’Indice des actions à faible capitalisation BMO, nous ne pouvons considérer que les sociétés aux bénéfices positifs. Dans l’univers des petites capitalisations, il y tellement de sociétés qui ne sont pas dans ce cas! Actuellement, notre recherche montre que les actions à grande et à petite capitalisation génèrent des rendements comparables de leurs capitaux propres, et pourtant les actions à petite capitalisation se négocient au rabais, à la fois du point de vue de leur ratio cours/bénéfices et de leur ratio cours/valeur comptable. Il y a là une différence frappante.
Q : Les actions à petite capitalisation vont-elles surclasser les actions à grande capitalisation en 2013?
MF : Vous pouvez me mettre dans le camp des optimistes. Du point de vue de l’évaluation, les actions à petite capitalisation partent avec un avantage. Et puis il y a la possibilité pour l’investisseur d’une fuite vers la croissance, qui serait une bonne chose pour les petites capitalisations. Nous sommes aussi dans la phase de relance qui suit une crise économique. Les petites capitalisations ont tendance à bien se comporter au début d’une reprise économique. Nous n’en sommes plus aux premiers stades, mais s’il y a une poussée de croissance, ce sera bon pour les actions à petite capitalisation. Au sein de l’univers à petite capitalisation, il y a beaucoup de sociétés qui ont des rendements en dividendes élevés et des flux de trésorerie disponible robustes. On ne manque pas d’idées de qualité. Jusqu’à présent, en 2013, nous avons ajouté deux noms au portefeuille, après en avoir ajouté 10 en 2012.
TW : Beaucoup de sociétés à plus petite capitalisation se lancent actuellement dans les dividendes. De plus, beaucoup de sociétés de l’Indice des actions à faible capitalisation BMO étaient anciennement des fiducies de revenu, qui ont poursuivi leur politique de versement de dividendes.
MF : Le rendement en dividendes de l’Indice mixte (pondéré) des actions à faible capitalisation BMO était de 2,56 % à la fin de l’année. En 2012, 28 des 57 sociétés en portefeuille à la fin de l’année avaient soit initié, soit accru leur dividende, et plusieurs l’avaient accru plus d’une fois. Cela montre que les sociétés sont compétentes dans la production de flux de trésorerie. Elles étaient également conscientes de la quête de rendements en dividendes à laquelle se livraient les investisseurs en 2012. Cette approche permettrait de mettre cela au premier plan de leurs préoccupations si elles avaient besoin de capitaux.
TW : Cette amélioration de l’environnement économique donne aux sociétés à petite capitalisation un accès aux capitaux. Les producteurs de marchandises dépendront de la croissance économique en Chine et dans d’autres marchés émergents en 2013. De plus, les producteurs énergétiques qui ont des actifs dans l’Ouest canadien auront besoin de voir un rétrécissement de l’énorme différence du prix du pétrole par rapport à d’autres juridictions. Il faut une amélioration de l’infrastructure pour y arriver. Nous pensons que cela se produira pendant la deuxième moitié de 2013. À notre avis, il y a de bonnes chances que l’énergie affiche de meilleurs résultats cette année et nous voyons des occasions dans ce secteur. Nous sommes généralement optimistes sur les petites capitalisations. J’ai 47 % d’investis dans les actions à petite capitalisation du Fonds d’occasions de croissance Manuvie. Mon mandat en requiert au moins 40 %, et nous nous situons généralement vers les 50 %.
Q : Steve a dit qu’il était plus difficile, pour un gestionnaire axé sur la valeur, de trouver des occasions parmi les sociétés canadiennes à petite capitalisation. Ted, et pour vous, qui êtes axé sur la croissance?
TW : Nous étoffons généralement les noms que nous détenons déjà au Canada. À la différence de ceux de Martin et Steve, mon mandat me permet d’avoir un contenu étranger. J’ai beaucoup accru ma pondération d’actions américaines, qui représente actuellement plus de 20 % du portefeuille, contre 5 % ou 6 % l’année dernière. L’économie américaine va sans doute surclasser l’économie canadienne en 2013. D’ici la fin de l’année, nous verront probablement une croissance de 2,5 % du PIB américain. Nous pensons aussi que le dollar américain va surclasser le dollar canadien.
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