Homme d’affaires quittant ses fonctions avec des effets personnels dans une boîte. Concept de chômage, de licenciement et de crise économique.
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L’économie canadienne a enregistré en mars sa plus importante perte d’emplois depuis janvier 2022 en raison de l’incertitude liée aux droits de douane américains qui a commencé à se faire sentir.

Près de 33 000 emplois ont été perdus en mars, tandis que le taux de chômage a grimpé à 6,7 %, contre 6,6 % en février, a indiqué Statistique Canada vendredi.

Tu Nguyen, économiste chez RSM Canada, a mentionné que ce résultat donnait un aperçu de ce qui pourrait se passer alors que le conflit commercial avec les États-Unis s’intensifie et que le pays est confronté à la possibilité d’une récession.

« Nous avons constaté de nombreux licenciements dans le secteur commercial en mars et nous prévoyons qu’ils seront encore plus nombreux en avril et qu’une hausse du taux de chômage sera observée, a-t-elle expliqué lors d’une entrevue. Certaines usines de fabrication, notamment dans le secteur automobile, ont déjà licencié leurs employés. »

Les pertes d’emplois ont annulé une partie des gains réalisés à la fin de l’année dernière et en janvier.

Les États-Unis ont imposé le mois dernier des droits de douane sur les importations canadiennes non conformes à l’Accord Canada–États-Unis–Mexique, ainsi que sur les importations d’acier et d’aluminium. Les menaces tarifaires du président américain Donald Trump ont subi plusieurs révisions et retards, semant l’incertitude chez les entreprises.

Les États-Unis ont également annoncé le mois dernier des droits de douane sectoriels sur les importations automobiles, entrés en vigueur cette semaine, ainsi que des droits de douane de grande envergure sur d’autres pays, suscitant des inquiétudes quant à la possibilité d’une récession mondiale.

Pas près de s’arrêter

Selon Tu Nguyen, les pertes d’emplois au Canada continueront de s’accumuler si les droits de douane restent en vigueur, citant la décision de Stellantis d’interrompre le travail pendant deux semaines à son usine d’assemblage de Windsor, en Ontario, l’entreprise évaluant la situation comme un exemple de ce qui pourrait arriver.

« Le secteur automobile est tellement intégré en Amérique du Nord qu’une fois qu’on frappe un pays, on frappe tout le monde », a-t-elle souligné.

Claire Fan, économiste principale à la RBC, a mentionné que les données sur l’emploi de mars étaient légèrement inférieures aux prévisions de la banque, mais que la faiblesse pourrait encore se poursuivre.

« De plus, les risques pour la croissance américaine, liés aux droits de douane beaucoup plus élevés qui menacent d’être imposés sur les importations en provenance de la plupart des autres pays, pourraient également avoir un impact négatif sur le Canada », a-t-elle écrit.

Claire Fan a souligné que le Canada avait perdu environ 7000 emplois manufacturiers en mars.

« L’emploi dans le secteur sera surveillé de près dans les prochaines données sur l’emploi, afin de déceler tout signe d’impact des droits de douane sur les conditions de travail au Canada », a-t-elle déclaré.

D’après Tu Nguyen, la Banque du Canada se trouvait dans une situation difficile en raison de la persistance d’une certaine inflation sous-jacente.

« Mais, compte tenu de la faiblesse du rapport sur l’emploi de mars et de la prévision d’une récession en raison du taux tarifaire actuel, je pense que la Banque du Canada pourrait envisager d’abaisser son taux d’intérêt à 2,5 % », a-t-elle avancé.

Le taux de référence actuel est de 2,75 %, après sept baisses consécutives.

La prochaine décision de la Banque du Canada concernant les taux d’intérêt est prévue pour le 16 avril, date à laquelle elle publiera également son dernier rapport sur la politique monétaire, qui comprendra ses prévisions économiques actualisées.

Le recul de l’emploi à l’échelle nationale s’explique par la perte de 62 000 emplois à temps plein, compensée partiellement par une hausse de l’emploi à temps partiel.

L’Ontario et l’Alberta ont été les deux provinces les plus touchées par les pertes d’emplois, alors qu’il s’est perdu 28 000 postes en Ontario et 15 000 en Alberta.

Au Québec, le taux de chômage a connu une hausse de 0,4 point de pourcentage pour s’élever à 5,7 %.

Le secteur du commerce de gros et de détail a perdu 29 000 emplois en mars, ce qui annule en partie l’augmentation de 51 000 emplois enregistrée en février.

Le secteur de l’information, de la culture et des loisirs a perdu 20 000 emplois le mois dernier.

Parallèlement, le secteur des « autres services », qui comprend les services personnels et les services de réparation, a créé 12 000 emplois. Il s’est ajouté 4200 emplois dans les services publics.

Le nombre total d’heures travaillées a augmenté de 0,4 % en mars, après avoir reculé de 1,3 % en février.

Le salaire horaire moyen des employés a augmenté de 3,6 % sur une base annuelle en mars.