Un client ayant des actifs importants dans son compte d’épargne libre d’impôt (CELI) devrait envisager de payer les frais de gestion liés à ce compte à l’extérieur du CELI plutôt qu’à même les actifs dans ce compte. Le faire durant de nombreuses années peut devenir payant et décembre semble un mois tout indiquer pour la faire.
C’est ce qu’explique Dany Provost, directeur planification financière et optimisation fiscale, chez SFL Expertise, à Québec. Il se base ainsi sur une position administrative de l’Agence de revenu du Canada (ARC) qu’il a découverte récemment grâce à une formation du Centre québécois de formation en fiscalité (CQFF).
Ainsi, l’ARC « ne considère pas les frais de gestion qu’un titulaire paie pour un CELI en fiducie comme une cotisation au CELI », selon sa position administrative. De plus, l’autorité fiscale « ne considèrera pas le paiement d’un conseiller en valeurs, les transferts ou autres frais pour un CELI en fiducie comme une distribution (retrait) d’un CELI en fiducie ».
Afin de conserver davantage d’argent dans son CELI, un client peut donc payer lui-même les frais de gestion liés à ce compte, plutôt que ces frais soient prélevés en amputant les actifs du CELI, d’après l’interprétation de cette règle que fait Dany Provost.
Un client peut même s’entendre avec sa société de courtage afin que les frais annuels liés à ce compte soient payés une fois par an, en décembre. Ainsi, s’il n’a pas de liquidités dans un compte non enregistré afin de payer les frais de gestion, ce client pourrait retirer le montant pour ces frais de son CELI de manière à retrouver la possibilité de cotiser ce montant dès janvier de l’année suivante, d’après le fiscaliste.
« C’est une très bonne observation faite par le CQFF », indique Dany Provost. Cette stratégie est généralement pertinente pour des clients qui ont déjà des actifs importants dans leur CELI et qui sont susceptibles de maximiser chaque année leurs droits de cotisation au CELI.
« C’est un peu comme ramasser de l’argent par terre. C’est intéressant, mais il ne faut pas virer fou avec ça. Il n’y a pas beaucoup de côtés négatifs, excepté celui d’effectuer tout le suivi administratif qui y est lié. Certains clients pourraient par exemple trouver que c’est trop compliqué », nuance Dany Provost.
Voici un cas de figure d’un client qui avait plus de 18 ans en 2009. Celui-ci a eu, de 2009 à 2020, des droits de cotisation cumulatifs de 69 500 $ et s’en est prévalu chaque année. Supposons qu’avec les rendements, la valeur de son CELI en décembre 2020 s’établit à 80 000 $. Ce client a un conseiller qui lui facture des honoraires de gestion annuels dans son CELI qui sont l’équivalent de 1 % de son actif sous gestion, soit de 800 $.
Dans le but de simplifier notre exemple, établissons à 800 $ l’avantage annuel initial que ce client peut aller chercher en appliquant cette stratégie et qu’il la met en pratique pendant 25 ans. Toutes ces années, il n’effectue aucun retrait de son CELI et a les liquidités par ailleurs pour payer les frais de gestion. En faisant l’hypothèse d’une augmentation réaliste de la limite du CELI, il aurait quelque 15 500 $ de plus dans son CELI à la fin de cette période, note Dany Provost.
Avec des hypothèses réalistes, et en ne comparant qu’avec des revenus d’intérêts, l’impact annuel sera de l’ordre de 253 $ par année dans 10 ans, et de 1934 $ par an après 25 ans, selon ses calculs.
« Mais l’économie d’impôt sera moins élevée si le rendement provient de gain en capital et que la comparaison se fait avec un fonds commun constitué en société », nuance Dany Provost.
« C’est intéressant, mais les économies d’impôt, dans le grand ordre des choses, sont souvent marginales sachant que la grande partie des sommes restent libre d’impôt. Il y a toujours un compromis à faire entre la complexité et l’administration de cela et ce que l’on peut économiser en impôt », ajoute-t-il.
Pour des clients fortunés qui ne videront jamais leur CELI jusqu’à leur mort, « ça peut cependant représenter une bonne différence. Ça a beau être, au début, un montant négligeable par année, la différence d’accumulation peut grimper à plusieurs dizaines de milliers de dollars sur de longues périodes », convient Dany Provost, qui juge que cette stratégie mérite d’être connue.
Par ailleurs, les frais de gestion pour un compte CELI ne sont pas déductibles pour le client. Par contre, si c’était l’employeur qui mettait en place un CELI collectif et qu’il en assumait les frais de gestion, ceux-ci seraient déductibles alors que l’employé serait frappé d’un avantage imposable.