Nombre de tendances stimulent la demande pour les fonds négociés en Bourse (FNB), dont l’innovation du secteur, la demande des divers types d’investisseurs et les anticipations des changements à la politique monétaire des banques centrales du monde. Et ces tendances devraient continuer de donner de l’élan à ce type de fonds durant un bon moment.
C’est ce dont ont discuté les panélistes du webinaire Les FNBs en 2024 : évolution de l’industrie, diffusé par le Cercle finance du Québec, le 20 juin dernier. En voici les faits saillants.
Effet de la politique monétaire
La direction des taux d’intérêt et la courbe des rendements obligataire influencent les ventes et les rachats de FNB. Par exemple, certains conseillers et investisseurs utilisent des FNB afin de s’exposer de manière tactique à des segments de la courbe des taux, qui est encore actuellement inversée.
Pour les cinq premiers mois de 2024, par exemple, les FNB de titres à revenu fixe considérés comme ayant une durée « ultra courte » affichent des créations nettes de 699 millions de dollars (M$) et les FNB de titres à revenu fixe à longue duration, des créations nettes de 971 M$, selon Banque Nationale Marchés financiers. Après la catégorie des FNB obligataire de marché total, qui affiche des créations nettes de 3,7 G$ durant cette période, ces deux types de FNB ont été parmi les plus populaires dans les créations nettes, reflétant une volonté par les investisseurs de s’exposer à la fois aux parties courte et longue de la courbe des rendements obligataires.
« On voit les participants du marché qui veulent maintenant prolonger leur durée du côté des titres obligataire avec les baisses du taux qui ont commencé par la Banque du Canada », a indiqué Erika Toth, directrice générale, ventes aux institutions et conseillers, FNB BMO, chez BMO Gestion mondiale d’actifs.
Par ailleurs, la catégorie des FNB de comptes d’épargne à intérêt élevé (CEIE) a connu des rachats nets de 31 M$ de janvier à mai 2024, alors que cette catégorie avait pourtant été très populaire ces dernières années.
Selon Erika Toth, ces rachats s’expliquent en partie par les changements réglementaires qui touchent l’actif sous-jacent de ces fonds et en ont réduit un peu leur rendement. Ils découlent également de la volonté de déployer du capital dans le marché des actions et de privilégier les fonds obligataires à très court terme, qui offrent « non seulement une amélioration du rendement, mais aussi un petit prolongement de la durée et une efficacité fiscale accrue par rapport aux produits CEIE », a-t-elle dit.
« Nous avons observé des clients remplacer leurs FNB de CEIE avec des FNB d’obligations à ultra court terme, avec une durée autour de 0,2 ou 0,3 ans, et qui sont généralement un panier d’obligations à escompte, donnant un important avantage fiscal. Ces produits prennent avantage du fait que la courbe des taux est inversée et les taux de distribution sont plus attrayants avec les produits de court terme », a-t-elle ajouté en marge du webinaire.
Les clients qui anticipent une baisse rapide des taux d’intérêt ajoutent de divers FNB à revenu fixe avec une durée allant de 3 ans à 17 ans en fonction de leur point de vue, a-t-elle précisé : « L’un des avantages importants des FNB à revenu fixe est qu’ils vous permettent de cibler facilement la durée ou la qualité de crédit que vous souhaitez, et l’on peut modifier son portefeuille de manière rapide et efficace grâce à leur liquidité. »
« Il n’y a pas un consensus clair actuellement au niveau de la stratégie qui est favorisée par les conseillers pour la durée d’un portefeuille en revenu fixe. La courbe des taux d’intérêt à commencer à baisser ce qui favorise les obligations de plus longue durée, mais la courbe est toujours inversée donc les taux sur le court terme demeurent plus attrayants que les taux long terme. Nous voyons encore des flux d’argent entrer dans les produits de revenus fixes à court terme incluant les FNB de marché monétaire », a indiqué Jean-François Girard, directeur, Développement et gestion des fonds d’investissement, chez Desjardins Société de placement, en marge du webinaire.
Les investisseurs ont privilégié d’investir dans les FNB d’actions américaines non couvertes en fonction du risque de change, a par ailleurs noté Marie-Chantal Lauzon, première vice-présidente au développement des affaires – Global X ETFs. Cette préférence est possiblement le reflet d’un différentiel de taux de rendement entre les titres à revenu fixe américains et canadiens, ce qui favorise le dollar américain, a noté Laurent Boukobza, vice-président et stratège FNBs pour l’Est du Canada chez Placements Mackenzie.
Par ailleurs, la courbe des rendements obligataires américaine fait que certains investisseurs canadiens favorisent l’achat de FNB américains, a noté Jean-François Girard.
Ces investisseurs canadiens doivent toutefois faire attention aux impacts fiscaux indésirables découlant de la détention de FNB américains, dont l’obligation de remplir le feuillet fiscal T1135 Bilan de vérification du revenu étranger. Selon ce formulaire, un résident fiscal canadien doit remplir ce formulaire s’il détient un bien étranger déterminé dont le coût total est supérieur à 100 000 $, les FNB américains étant considérés comme de tels biens.
Jeunes et FNB
D’après les études et sondages faits par le Mouvement Desjardins, les clients les plus jeunes sont particulièrement intéressés par les FNB, selon Jean-François Girard : « Les jeunes vont prendre une place de plus en plus grande en termes de clientèle. Et ils sont énormément attirés par les FNB. Par ailleurs, les jeunes sont intéressés par l’investissement responsable. Ça reste une thématique qui est très forte et qui résonne très bien chez les jeunes. »
Cette clientèle est possiblement attirée par les FNB parce que les fonds indiciels du marché américain ont souvent une part élevée de leur actif dans les sept titres du secteur technologique qui ont connu récemment une forte croissance, lesquels sont désignés comme Magnificient 7. « Les FNB indiciels du marché américain bénéficient aussi de la concentration de ce qu’on appelle les Magnificient 7, qui ont énormément bien fait. Ça ne peut pas perdurer par contre », a-t-il estimé.
Entre autres pour cette raison, ce type de clients auront besoin d’éducation sur ces outils de placement afin de bien les comprendre.
Utile pour les conseillers
Les conseillers en placement devraient continuer d’accroître leur utilisation des FNB au fil des ans, prévoit Erika Toth, directrice, FNB, pour l’Est du Canada, chez BMO Gestion mondiale d’actifs. « De plus en plus, ils vont utiliser des FNB pour remplacer les titres individuels. »
Selon Valeurs mobilières TD, les conseillers en placement emploient des FNB de titres à revenu fixe pour constituer leurs portefeuilles. Ce type de conseillers devraient continuer d’utiliser des FNB indiciels, mais aussi des FNB basés sur des règles, des FNB factoriels et des FNB gérés activement, selon Erika Toth.
Par ailleurs, un segment de représentants en épargne collective peut désormais utiliser certains FNB qui se négocient en série F par l’intermédiaire de FundServ, d’après elle.
« L’actif sous gestion en fonds communs composés de FNB est de 48 G$, d’après Investors Economics », a-t-elle ajouté.
Parmi le segment des investisseurs autonomes, sont populaires les FNB de vente d’options d’achats couvertes et les FNB d’allocation d’actifs, lesquels comprennent une part à la fois de FNB d’actions et de FNB obligataire et qui sont rééquilibrés en fonction de la pondération cible. Chez les investisseurs institutionnels, les FNB axés sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) devraient continuer d’être populaires.
Secteur innovant
Le secteur des fonds négociés en Bourse au Canada est particulièrement innovant et il est fort probable que cette inclinaison soit un autre vecteur de croissance. Selon Marie-Chantal Lauzon, bien que les FNB indiciels soient très populaires et utilisés, les FNB non indiciels ont connu une forte croissance ces dernières années, stimulés entre autres par les FNB factoriels.
Les FNB utilisant des stratégies d’options, comme les FNB à résultats structurés ou les FNB de vente d’options d’achats couvertes seront aussi un vecteur de croissance selon Erika Toth.
Les stratégies de gestion active ou factorielle à faible coût seront possiblement un autre facteur de croissance, selon Jean-François Girard. Même si l’innovation stimulera la demande de FNB, ce marché reste relativement concentré.
« En tout, 70 % des flux depuis le début de l’année sont concentrés dans les 20 plus gros FNB au Canada, a souligné Jean-François Girard. Il y a énormément de développement de produits, mais ça reste quand même (un marché) assez concentré. »
Finance et Investissement était partenaire de diffusion de l’événement. Le Cercle finance Québec n’a pas eu de droit de regard sur la couverture de l’événement.