Finance et Investissement (FI) : Votre responsabilité était-elle plus lourde en raison du fait que vous étiez la première titulaire du poste de présidente de l’ACCAP-Québec?
Lyne Duhaime (LD) : Nous avons créé un bureau Québec avec une présidente. Donc, bien sûr, cela amenait des attentes particulières de la part de mes membres. C’est ce qui m’a attiréeà relever ce défi. Je trace un bilan extrêmement positif de cette première année. Les associations comme la mienne représentent un secteur d’activité, mais je ne peux pas dire que j’ai fait augmenter les ventes de 40 %. Nous avons un rôle d’influence. Lors de mon arrivée en poste, nous avons adopté un plan stratégique. Mon objectif premier visait à obtenir une reconnaissance de l’ACCAP et de mon industrie comme un acteur incontournable de l’économie québécoise ainsi qu’un partenaire solide du gouvernement du Québec et de la population.
FI: Quels sont les enjeux de l’industrie qui vous préoccupent, et comment axerez-vous votre action à cet égard?
LD: La question du médicament et l’écart important entre le prix payé à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) par rapport à celui payé à une assurance privée est un enjeu prioritaire; nous allons continuer à travailler très fort sur ce dossier. Nous avons une particularité au Québec : les honoraires des pharmaciens ne sont pas encadrés. Nous aimerions aussi avoir accès aux négociations entre le gouvernement et les sociétés pharmaceutiques, car le coût du médicament comprend l’honoraire du pharmacien, qui est plus élevé avec une assurance privée qu’avec la RAMQ.
Un autre enjeu important a trait à la taxe compensatoire. Le Québec est la province canadienne où les produits d’assurance sont les plus taxés. Une taxe temporaire sur tous les produits d’assurance a été instaurée il y a quelques années. Nous demandons au gouvernement qu’elle ne soit pas renouvelée à la prochaine échéance en mars 2017 afin de garder notre compétitivité au Québec par rapport au reste du Canada.
FI : Dans vos priorités stratégiques 2016-2017, vous souhaitez, « promouvoir un ensemble intégré de solutions ciblées » pour mieux préparer les Canadiens à leur retraite. Concrètement, quelles sont ces solutions?
LD : Les régimes de retraite ont connu un changement majeur au cours des 20 dernières années. La plupart des employeurs offraient des régimes à prestations déterminées, qui garantissaient une rente à la retraite. La très grande majorité des employeurs n’offrent plus ce genre de régime, à tout le moins aux nouveaux employés.
Donc, ils mettent sur pied d’autres mécanismes de retraite pour lesquels ils n’ont pas à assumer de risque. Les assureurs sont un partenaire important des REER collectifs, des CELI, des régimes de participation différée aux bénéfices (RPDB) et des Régimes volontaires d’épargne-retraite (RVER). Nous devenons la porte d’entrée pour les nouveaux régimes de retraite et pour la nouvelle façon d’épargner. L’objectif fondamental dans une société comme la nôtre, c’est de s’assurer que nos personnes âgées ne vivent pas dans la pauvreté à la retraite.
FI: Des données de l’ACCAP indiquent que « l’utilisation de la technologie pour la vente de produits est émergente dans le secteur de l’investissement. En 2014, ce marché représentait des primes de 79 M$ en vente par Internet, soit moins de 1 % des primes totales en assurance vie ». Il reste encore beaucoup à faire pour maximiser la vente par Internet?
LD : En effet. Pour le moment, le consommateur ne peut acheter entièrement en ligne que très peu de produits sans devoir parler à un conseiller. Il faut changer l’encadrement législatif et réglementaire. Je pense que ce sont les jeunes qui veulent faire les choses différemment, et ils sont à nos portes. Nous devons agir pour bien les accueillir.
FI : Votre volonté d’actualisation de la Loi sur les assurances figure dans vos priorités stratégiques. Où le bât blesse-t-il pour que vous réclamiez cette actualisation?
LD : Nous demandons l’interdiction du commerce de la vente de polices d’assurance vie à des fins spéculatives, qu’on appelle en anglais Life Settlement. Il s’agit d’organisations qui se spécialisent dans l’achat de polices d’assurance vie. Les détenteurs qui veulent empocher leur valeur de rachat la vendent à ces entreprises qui misent sur l’espérance de la vie de la personne, en souhaitant qu’elle meure le plus rapidement possible. Cette pratique est en voie d’être interdite partout au Canada. Nous considérons qu’elle devrait être interdite au Québec, car elle peut mener à des situations abusives à l’égard des consommateurs.