Communément appelés concours de vente, les différents programmes de reconnaissance s’adressent aux meilleurs vendeurs d’un produit d’assurance de personnes ou qui ont un volume d’affaires supérieur auprès d’un assureur en particulier.
La Great-West et Canada-Vie ont lancé la vague de changements à la mi-mars en annonçant à leurs réseaux de conseillers que les conférences de reconnaissance qui auront lieu à Rome en 2017 et à Londres en mai 2016 seront les dernières du genre.
« Nous avons récemment procédé à un examen de notre approche concernant les conférences d’incitation en fonction du volume des ventes, afin de nous assurer qu’à titre de conseiller, vous continuez d’apporter de la valeur, d’être pertinent et de ne pas soulever de conflit d’intérêts apparent dans vos affaires avec les clients », écrit Nick Pszeniczny, vice-président exécutif, distribution et Marketing, Individuelle, Great-West, London Life et Canada-Vie, dans une note envoyée aux conseillers.
Les deux assureurs se donnent un an pour élaborer un plan stratégique visant à proposer des événements axés sur le perfectionnement d’un plus grand nombre de conseillers, plutôt que d’offrir des voyages motivation sur la base du volume de ventes.
BMO Assurance et Manuvie suivront la même tendance, et proposeront de nouvelles approches et pratiques pour les programmes de récompenses et de reconnaissances des conseillers.
« Notre programme [de voyage-motivation] est en vigueur du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017. D’après les recommandations du rapport et les réactions à ce jour, nous estimons qu’il s’agira de notre dernier programme structuré selon les paramètres actuels », a soutenu Daniel Walsh, vice-président, développement des affaires chez BMO Assurance dans un courriel.
Fini les congrès tous frais payés
Les firmes suivent ainsi les recommandations du rapport « La distribution d’assurance au Canada » publié par l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP) le 29 janvier dernier.
Le rapport mentionne que « les incitatifs sous forme de congrès pourraient contribuer à la perception de conflit d’intérêts ». Le document recommande aux assureurs et aux cabinets de distribution de produits d’assurance d’adapter leur pratique pour chasser la perception de conflits d’intérêts associée à ce genre de concours de vente.
« À l’échelle nationale, les assureurs ont décidé d’entamer une démarche afin de dissiper la fausse perception de conflits d’intérêts », soutient Lyne Duhaime, présidente pour le Québec de l’ACCAP.
Pour y parvenir, l’association recommande aux assureurs qui conçoivent des produits et les distribuent par l’intermédiaire de réseaux indépendants d’offrir « uniquement des voyages axés dans une mesure raisonnable sur l’éducation pour lesquels les conseillers devraient payer leurs propres frais de déplacement et d’hébergement », peut-on lire dans le rapport.
Cela empêcherait la mauvaise perception du conseiller, dont on pourrait croire qu’il ne place le produit pour le compte d’un assureur en particulier que pour avoir droit à un voyage, selon ce document.
Pour les assureurs qui ont un réseau de conseillers exclusif ou « captif » et les cabinets de distribution qui opèrent par l’intermédiaire de canaux indépendants et distribuent les produits de divers assureurs, l’ACCAP suggère aux assureurs d’offrir des voyages éducatifs avec l’option de payer les dépenses des conseillers.
Dès lors, fini les congrès tous frais payés dans un cadre attrayant pour récompenser les meilleurs vendeurs.
Aux dires de Lyne Duhaime, cette position reflète l’opinion de l’industrie et ainsi « on peut s’attendre à ce que l’adoption de cette nouvelle orientation reflète la volonté de l’industrie ».
Bientôt un cadre
Actuellement, chaque assureur est responsable de ses propres pratiques, et rien n’oblige les compagnies à suivre les recommandations de l’ACCAP.
« Tant que ça ne sera pas [interdit], certains assureurs s’en serviront [des concours de vente] pour se donner un avantage concurrentiel », affirme Gino Savard, président de MICA services financiers.
L’ACCAP laisse d’ailleurs aux autorités de réglementation le soin de choisir l’encadrement qui lui conviendra pour les moyens d’incitation sous forme de voyage nouveau genre.
Ce n’est pas d’hier que l’Autorité des marchés financiers dénonce les congrès récompenses. En 2013, elle soulignait qu’« un incitatif orienté uniquement vers la vente de produits spécifiques peut nuire au traitement équitable des consommateurs. »
En juillet 2015, dans sa présentation des résultats de l’autoévaluation des pratiques commerciales des assureurs, l’AMF soutenait que « les concours de vente ciblant un produit donné peuvent stimuler les ventes d’un produit au détriment du besoin réel des consommateurs ».
Le régulateur, qui souhaite que « les incitatifs ne nuisent pas au traitement équitable des consommateurs », a depuis a entamé des travaux concernant la gestion des moyens d’incitation.
À la vue des récents développements sur le sujet, l’AMF est d’avis « que ces annonces sont un bon début en matière de gestion des incitatifs favorisant le traitement équitable du consommateur et entend poursuivre le dialogue avec l’industrie », écrit le régulateur dans un courriel à Finance et Investissement.