Les jeunes investisseurs souhaitent entendre parler d’investissement durable. Les conseillers doivent être à l’écoute et avoir des réponses, soutient Sylvain de Champlain, dont la firme a lancé cinq portefeuilles ESG en 2020, en pleine crise de la pandémie.
« L’effet Greta (Thunberg) a allumé l’attention de la planète sur les enjeux environnementaux, en particulier chez les jeunes. Ils affichent une sensibilité sociale plus grande et sont plus conscients des risques climatiques. Cette sensibilité accrue se retrouve également chez les femmes », observe le fondateur de De Champlain Groupe Financier.
Les conseillers doivent donc prendre les devants pour aborder la question des investissements ESG avec cette clientèle, estime le dirigeant. Ils doivent se mettre à l’écoute de ses messages et de ses convictions.
« Les représentants de la génération Z veulent investir dans des entreprises auxquelles ils croient et qui reflètent leurs valeurs sociétales. Les conseillers doivent être des catalyseurs de ces préoccupations », souligne le conseiller.
Trois lettres qui comptent
Des trois lettres qui composent l’acronyme ESG, la première, relative à l’environnement, est celle qui prime auprès des jeunes, observe Sylvain de Champlain. Les secteurs de l’énergie, du recyclage et de l’assainissement des eaux figurent en tête de leurs favoris.
« Ils veulent s’assurer qu’il n’y ait pas d’énergie fossile ni d’armes à feu dans leurs portefeuilles. Ce sont les deux éléments qui ressortent le plus. »
Les lettres S et G, relatives à l’aspect social et à la gouvernance des entreprises, seront amenées à prendre plus de place dans les décisions d’investissement de cette clientèle au cours des prochaines années, croit le conseiller.
« Les entreprises qui veulent attirer les jeunes investisseurs devront démontrer davantage qu’elles jouent un rôle positif dans la société, qu’elles traitent convenablement leurs employés et qu’elles prennent soin de la communauté. »
La nouvelle clientèle veut investir selon ses valeurs, mais elle n’est pas prête à faire des compromis sur le rendement. Si les fonds verts conçus il y a une dizaine d’années pouvaient laisser les clients sur leur faim au niveau de la performance, ce n’est plus le cas aujourd’hui, signale Sylvain de Champlain.
« Au 31 décembre 2021, nos modèles ESG ont battu les portefeuilles traditionnels d’environ 0,5%. Au 31 mars 2022, malgré la hausse vertigineuse du prix du pétrole et le repli des fonds ESG, la performance, sur 3 ans, est à peu près égale entre nos modèles traditionnels et nos modèles ESG », indique le dirigeant.
La firme a graduellement commencé à introduire des fonds ESG, répondant à des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. « Plusieurs nouveaux investisseurs (surtout les jeunes), sont 100% ESG. Également, à l’intérieur de nos portefeuilles traditionnels, nous intégrons progressivement des fonds ESG depuis quelques années. »
Actuellement, près de 20 % de l’actif sous gestion de la firme sont investis dans des fonds responsables sur un total de près de 245 M$. L’objectif de Sylvain de Champlain est d’accroitre cette proportion au cours des prochaines années, notamment en faisant travailler des gestionnaires ESG dans les portefeuilles traditionnels. Il estime qu’un « très fort pourcentage » des portefeuilles d’investissement suivront les critères ESG d’ici 5 à 7 ans.
Un rôle d’éducation
Les jeunes veulent avoir un impact sur la société avec leur argent. Une des stratégies consiste donc à travailler avec des gestionnaires qui peuvent influencer les actionnaires à fixer des cibles aux entreprises présentes dans les portefeuilles. Si les cibles fixées ne sont pas atteintes, les titres peuvent être retirés, ce qui revient à sanctionner les sociétés prises en défaut.
Il faut avoir l’œil pour repérer les bons critères, dit Sylvain de Champlain. « La règlementation n’est pas encore très robuste en matière de définition des critères ESG. Certaines firmes prétendent proposer des fonds ESG, mais quand on regarde les titres dans le détail, on constate qu’ils ne sont pas aussi verts qu’annoncé. »
Dans ce contexte, le conseiller a un rôle important d’éducation à jouer auprès des nouveaux investisseurs pour les aider à investir selon leurs valeurs, sans sacrifier le rendement et la performance, et sans se laisser distraire par les sirènes du marché.
Au 30 avril 2021, l’indice MSCI Focus ESG, un sous-indice de l’indice MSCI Canada, affichait un rendement annuel moyen, sur cinq ans, de 6,64 %, contre 6,20 % pour l’indice MSCI Canada.
Source : Desjardins