Certains propriétaires trouvent intéressante l’idée de conserver leur prêt hypothécaire dans leur REER, d’autant plus que les taux d’intérêt restent relativement élevés.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une stratégie couramment utilisée, un « prêt hypothécaire avec lien de dépendance » permet à une personne de se prêter de l’argent à elle-même (ou à un membre de sa famille) à partir de son REER pour financer un prêt hypothécaire sur une maison. Le propriétaire effectue des versements hypothécaires mensuels au REER, qui obtient un taux de rendement garanti — l’intérêt sur l’hypothèque.
Toutefois, les clients intéressés par une telle stratégie doivent tenir compte des frais importants généralement associés à la mise en place d’un prêt hypothécaire avec lien de dépendance, ainsi que du risque de surexposition à un seul actif, prévient Jason Heath, directeur général d’Objective Financial Partners à Markham, en Ontario.
« Si la majeure partie de la valeur nette d’une personne est constituée de la valeur nette de sa maison et d’un prêt hypothécaire pour le reste de la valeur de la maison, elle n’est pas exposée aux actions, aux obligations et à d’autres catégories d’actifs », rappelle Jason Heath.
Il peut être difficile de trouver une institution financière disposée à mettre en place ce type d’arrangement. « Ce n’est pas aussi simple que de transférer son hypothèque dans son REER », commente l’expert.
En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, les régimes enregistrés peuvent détenir un titre de créance garanti par une hypothèque sur un bien immobilier canadien si l’hypothèque est administrée par un prêteur agréé en vertu de la Loi nationale sur l’habitation et assurée par la Société canadienne d’hypothèques et de logement ou par un assureur privé.
Le taux d’intérêt appliqué à l’hypothèque et les conditions de celle-ci doivent refléter les pratiques commerciales normales. En règle générale, le taux d’une hypothèque avec lien de dépendance est le taux affiché, sans escompte, précise Jason Heath.
L’hypothèque doit être gérée par la banque de la même manière qu’une hypothèque sur un bien appartenant à un étranger. Le non-respect de cette règle peut entraîner des conséquences fiscales défavorables.
« Il faudra procéder à une évaluation et obtenir l’autorisation de contracter l’hypothèque, même si vous vous prêtez l’argent à vous-même », précise Jason Heath.
C’est pourquoi les hypothèques avec lien de dépendance ne sont pas un moyen « d’emprunter de l’argent que vous ne pourriez pas obtenir autrement auprès d’une banque », souligne Jason Heath.
En plus des frais habituels liés à l’obtention d’un prêt hypothécaire, l’emprunteur devrait probablement payer à la banque des frais administratifs annuels pour la gestion du prêt hypothécaire avec lien de dépendance et une prime d’assurance hypothécaire à l’assureur.
Selon un rapport de la CIBC sur les REER publié en 2023, la prime d’assurance hypothécaire sur un prêt hypothécaire avec lien de dépendance varierait de 0,6 % à 4,0 % du montant du prêt hypothécaire.
À noter que les versements hypothécaires au REER ne constituent pas de nouvelles cotisations au régime. Les intérêts versés à un REER ne seraient donc pas déductibles de l’impôt.
Les clients désireux de mettre en œuvre une telle stratégie devraient disposer d’un REER suffisamment important pour que l’effort et les dépenses en valent la peine, estime Jason Heath. « Vous ne le feriez jamais avec une hypothèque de 50 000 dollars. »
Selon lui, les gens peuvent être attirés par cette stratégie parce qu’ils aiment l’idée de détenir dans leur REER un placement dont le taux de rendement est supérieur à celui qu’ils pourraient obtenir avec d’autres placements présentant le même niveau de risque.
Cependant, l’emprunteur paie probablement un taux d’intérêt plus élevé sur son prêt hypothécaire que celui qu’il aurait pu négocier autrement.
Jason Heath n’est pas un adepte de cette stratégie. « Je préférerais payer un taux d’intérêt inférieur au taux affiché sur mon prêt hypothécaire, et j’espère obtenir un taux de rendement élevé sur mon REER de toute façon », explique-t-il.
Toutefois, une hypothèque avec lien de dépendance pourrait convenir à une personne qui allait de toute façon investir son REER dans des CPG.
« Si une personne devait être incitée à le faire, ce serait quelqu’un avec une tolérance au risque conservatrice [et] avec un REER relativement important, de sorte que, espérons-le, il a d’autres choses dans son REER que son hypothèque, [ainsi que] quelqu’un d’assez chanceux pour trouver un fiduciaire ou un dépositaire qui mettra cela en place [en son nom] », résume Jason Heath.
L’expert soupçonne la plupart des banques d’avoir renoncé à offrir des prêts hypothécaires avec lien de dépendance parce que ce n’était probablement pas rentable. Offrir à un client un prêt hypothécaire traditionnel et lui fournir des produits et des services de conseil pour l’aider à gérer les actifs de son REER est probablement plus lucratif que de servir de dépositaire pour un prêt hypothécaire avec lien de dépendance pour ce même client, suggère Jason Heath.
Je ne serais pas surpris si [la plupart] des banques et des sociétés de fiducie disaient : « cela n’en vaut pas la peine », conclut Jason Heath.