En entrevue, Annamaria Testani, vice-présidente, Ventes nationales chez Banque Nationale Investissements (BNI), nous explique la stratégie de l’institution financière montréalaise, qui vient de lancer ses quatre premiers fonds négociés en Bourse (FNB).
Des quatre, trois fonds sont actifs: un FNB de revenu d’actifs réels mondiaux (NREA), un d’actions privilégiées (NPRF) et un de stratégies alternatives liquides (NALT). Le seul FNB indiciel suit un indice créé par la Banque Nationale, composé d’entreprises familiales canadiennes (NFAM). Ces produits s’ajoutent au 52 G$ d’actifs sous gestion de BNI dans les fonds communs de placement (FCP).
«Dans les cinq à dix dernières années, tout le monde s’est lancé dans les FNB passifs et on a assisté à un effondrement des frais, explique Mme Testani en entrevue. Pourquoi les gens paieraient-ils simplement pour suivre l’indice ? Nous nous sommes demandé où nous pouvions apporter de la valeur ajoutée.»
BNI est arrivé à la conclusion qu’il y avait un appétit pour les FNB gérés activement et les indices de niche, comme celui sur les entreprises familiales canadiennes. «Pendant les dix dernières années, vous auriez acheté à peu près n’importe quoi et ça aurait augmenté dans le contexte de marché boursier, admet-elle. Je ne suis pas sûr qu’il y a beaucoup d’experts aussi optimistes pour les dix prochaines années. Dans ce contexte, on pense que c’est la gestion active qui va bien faire.»
Le concept de l’architecture ouverte
La pierre angulaire dans la stratégie de BNI est le concept de «l’architecture ouverte». L’idée est que leurs fonds communs et FNB ne sont pas gérés par des gestionnaires de portefeuille employés par la Banque Nationale, mais plutôt par des gestionnaires de firmes externes.
L’avantage de l’architecture ouverte est de permettre à la BNI de choisir les meilleures firmes pour chaque classe d’actif ou stratégie, selon Mme Testiani. Elle permet aussi de changer le gestionnaire d’un fonds sans changer son mandat, si les décisions de la firme ne correspondent plus aux critères de sélections de BNI. «On ne veut pas être limité aux gestionnaires que nous sommes en mesure d’embaucher à Montréal. Avec l’architecture ouverte, on peut choisir n’importe quel gestionnaire dans le monde, si on le trouve bon.»
Cette stratégie s’est déployée après la vente de Gestion de portefeuille NatCan, une ancienne division de la Banque Nationale, à Fiera en 2012. Depuis, la Nationale a confié la gestion de ses fonds à d’autres firmes. Aujourd’hui, la montréalaise Fiera a des mandats de gestions pour le compte de BNI, tout comme Goldman Sachs et J.P. Morgan, notamment.
FNB : un début d’année actif pour les banques
Le lancement de BNI survient lors d’un début d’année particulièrement actif pour les grandes banques canadiennes dans l’univers des FNB. La Banque RBC a annoncé un partenariat avec BlackRock pour offrir leur FNB sous la marque RBC iShares. La Banque CIBC, pour sa part, a lancé ses cinq premiers FNB avec des styles actifs et bêta stratégiques.
Il faut dire que les FNB accaparent une part de plus en plus importante des fonds d’investissement. En 2018, ils ont accaparé pour près de 99,5% des ventes de fonds d’investissement au Canada, soit 20,5 G$ sur 20,6 G$, selon l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC). Les ventes de fonds commun n’ont été que de 109 M$. L’actif sous gestion des fonds communs demeure tout de même encore supérieur à 1,58 billion de dollars, comparativement à 156,7 milliards pour les FNB, toujours selon l’IFIC.
Un lancement tardif ?
BNI, pour sa part, est devenu le 35e fournisseur de FNB au Canada. L’institution n’a pas fait une entrée tardive dans ce segment pour autant, défend Mme Testani. Elle affirme que la Nationale est active depuis longtemps dans l’industrie du FNB à titre de mainteneur de marché. Elle ajoute qu’en offrant ses premiers FNB en 2019, BNI peut développer une offre de produit plus en phase avec le contexte actuel que si elle s’était lancé dans les FNB passifs des grands indices boursiers.
Mme Testani relativise la différence entre les fonds communs et les FNB qui se limite principalement à une différence «d’enveloppe légale». Malgré l’engouement pour les FNB, elle pense que les fonds communs gardent leur pertinence dans l’univers du placement. «Les FNB requièrent de gérer activement son portefeuille, commente-t-elle. Ce n’est pas tout le monde qui peut ou veut faire ça. Il ne faut pas oublier que les fonds communs ont été conçus pour simplifier l’épargne. Avec seulement 25$, il est possible de faire une cotisation. Avec les fonds communs, tu délègues les tâches comme le rééquilibrage, ce qui convient à certains épargnants.»