Effectivement, ces atouts ont pu contribuer à la croissance rapide ces dix dernières années des fonds distincts, qui sont passés de 41 G$ d’actifs à 94,8 G$, soit un taux de croissance composée de 8,7 % selon la firme-conseil torontoise Investor Economics et son service de conseil pour l’assurance (d’après les données d’août 2013). Ils ont devancé les fonds communs à long terme, qui se sont développés à un taux composé de 8,1 % sur cette même période.

« Les fonds distincts sont un peu plus onéreux que les fonds communs, mais on paie pour des éléments supplémentaires, comme la protection contre les créanciers, dit Steve Parker, vice-président adjoint des produits de placement garantis, ventes aux particuliers pour la Financière Manuvie à Toronto. Tout est une question de valeur. »

La Manuvie propose une panoplie de fonds distincts moyennant un supplément habituel de 25 points de base (pdb) par rapport au ratio des frais de gestion (RFG) du fonds commun sous-jacent, le faisant passer de 2,50 %, par exemple, à 2,75 %. « En échange de cette majoration, vous avez accès aux éléments d’un contrat d’assurance-vie, dit Steve Parker. Cela comprend deux garanties : une prestation à l’échéance et une prestation de décès. »

En cas de décès de l’investisseur, on garantit à ses bénéficiaires qu’ils recevront 75 % de tous les montants versés, bien qu’il puisse y avoir une réduction en proportion des retraits effectués. Dans l’industrie, on appelle cela 75/75, ou bien une garantie de 75 % à l’échéance, et une garantie de prestation de décès de 75 %. Cette garantie peut toutefois atteindre 100 % avec un RFG plus élevé.

Ces frais additionnels en valent-ils la peine ? Cela dépend entièrement de votre situation financière et personnelle, et de votre capacité à faire face au risque boursier. « Les professionnels et les propriétaires de petites entreprises sont généralement des gens qui recherchent la protection contre les créanciers, dit Steve Parker. Quand il s’agit des garanties, tout le monde est différent. Certaines personnes accordent beaucoup d’importance aux prestations de décès. Elles aiment savoir qu’en cas de mort prématurée leurs bénéficiaires ont la garantie de recevoir 75 %, voire même 100 % des montants versés. »

Comme Steve Parker, Peter Wouters, directeur en fiscalité et planification financière auprès de la société de Kingston Empire Vie, dit que la protection contre les créanciers est un élément clé. Cela ne s’applique cependant pas seulement aux propriétaires d’entreprise, et peut aussi être utile pour quelqu’un qui s’est porté garant d’un prêt.

Admettons qu’un client a plus de 55 ans et qu’il est cosignataire d’un prêt pour l’entreprise de son fils. Si son entreprise fait faillite, il ou elle n’ayant pas d’actifs, les créanciers le poursuivront parce qu’il a cosigné le billet, dit Peter Wouters. « Cependant, ils ne pourront pas le poursuivre s’il a un fonds distinct pour lequel il a désigné un bénéficiaire. »

L’attrait de la protection à la baisse est encore plus répandu chez de nombreux investisseurs, ajoute Peter Wouters, en particulier ceux qui approchent de la retraite ou craignent un autre krach boursier comme celui de 2008-09. « Ce n’est pas fonction de l’âge », dit Peter Wouters, qui croit que des investisseurs plus jeunes mais moins tolérants au risque peuvent être attirés par les fonds distincts.

« Ils peuvent prendre une garantie allant jusqu’à 100 %, et le pire qui puisse leur arriver est donc de rentrer dans leurs frais, dit Peter Wouters. Il y a ce filet de sécurité qui protège le client en cas de baisse. Un fonds distinct sert d’amortisseur, chose qu’un fonds commun ne lui procurera pas. Et puis il y a toujours un potentiel de gains à la hausse, comme avec un fonds commun. »

Les investisseurs plus âgés devraient-ils passer des fonds communs à des fonds distincts pour protéger leurs investissements? « Ce n’est pas soit l’un, soit l’autre. Il s’agirait plutôt d’une combinaison des deux, dit Peter Wouters. Les marchés nous ont montré, surtout en 2008-09, que l’affectation des actifs à elle seule ne protège pas suffisamment en période baissière. Presque tout a chuté. Il faut donc conjuguer la répartition des actifs à une attribution ou une diversification par produits différents. »

En fonction du stade où vous êtes rendu dans la vie, cette combinaison peut être de 50/50, voire 80/20, dit Peter Wouters. « La question est de déterminer le pourcentage des pondérations pour chaque produit, non pas s’il faut tout miser sur l’un ou sur l’autre. L’affectation par produit est particulièrement importante quand le client est plus âgé, entre cinq et 10 ans de la retraite. »

Les fonds distincts ont évolués au fil des ans avec l’ajout d’options supplémentaires, comme des garanties relatives aux distributions ou au revenu. Toutefois leurs coûts ont également augmenté en proportion. Un exemple de cela est le programme RetraitePlus Manuvie, un nouveau produit combinant une assurance-vie et un flux de revenu garanti à vie.

Lancé en fin octobre, RetraitePlus est conçu pour les personnes qui sont entre cinq et 15 ans de la retraite. « Ce régime a une phase d’accumulation avec l’option de percevoir un revenu dans l’avenir », dit M. Parker, qui considère ce dernier point semblable à une rente viagère.

Moyennant un coût supplémentaire de 50 points de base par rapport à un fonds communs, vous avez les avantages d’un contrat d’assurance et l’option d’un revenu à vie, dit Steve Parker. « Une autre caractéristique est de pouvoir profiter d’une hausse éventuelle des taux d’intérêt », dit Steve Parker, ajoutant que cet élément se base sur une formule traduite par des crédits quand elle s’applique à la valeur marchande du fonds sous-jacent pendant sa phase d’accumulation.

« Ce modèle partage les risques. C’est un produit qui fonctionne pour certains clients, mais il y a aussi le risque d’une baisse des taux d’intérêt », dit Steve Parker, soulignant que les clients doivent accepter le désagrément potentiel d’une chute des taux.

Néanmoins, il incombe aux investisseurs d’évaluer si la protection conférée par les fonds distincts vaut le supplément à payer. L’option de protection contre les créanciers, par exemple, n’est utile que pour un segment démographique étroit, dit Dan Hallett, vice-président et directeur de Highview Financial Group à Oakville en Ontario.

« À moins d’être chef d’entreprise et d’avoir beaucoup d’argent non enregistré, il est peu probable que la protection contre les créanciers soit très utile, dit Dan Hallett. Même en étant dans une situation financière précaire et en transférant de l’argent à des fonds distincts, la protection conférée est vraiment discutable. Il faut qu’il y ait une valeur importante dans cette option [pour la justifier]. »

Pour ce qui est d’éviter les frais d’homologation, Dan Hallett souligne qu’en ayant un compte enregistré, comme un REER ou un fonds enregistré de revenu retraite (FERR), on peut nommer un bénéficiaire. « Dans tous ces cas de figure, cet argent peut contourner les frais de succession et d’homologation, dit Dan Hallett. Ainsi, payer 0,5 % de plus par an pour éviter des frais d’homologation uniques de 0,5 % n’est pas vraiment logique. Les frais d’homologation ne représentent pas tant que ça par rapport au coût additionnel qui devra être payé pour le dispositif offert par un fonds distinct. »

Dan Hallett doute également des garanties à l’échéance qui plaisent souvent aux gens proches de la retraite. Il met plus l’accent sur la construction du portefeuille. « Le client devrait structurer son portefeuille en fonction de ce qu’il essaie d’accomplir et de ce qui le met à l’aise, dit M. Hallett. Il est à espérer que ces deux facteurs convergent. De cette façon, la structure du portefeuille répondra à ses objectifs et ses préférences au niveau du risque. Il peut résoudre ces questions — avec des fonds conventionnels — tout en incorporant un certain degré de prudence qui lui permettra de ne pas perdre d’argent sur une période de trois à cinq ans, par exemple. Autrement, si le client veut une garantie à 100 %, il devra débourser un supplément substantiel pour cette protection. »