La dette privée a fait son apparition en tant que catégorie d’actifs aussi bien pour les investisseurs institutionnels que particuliers lorsque la règlementation bancaire s’est fortement durcie après la crise financière de 2008-09. La nouvelle règlementation a forcé de nombreuses petites et moyennes entreprises à se tourner vers des organismes de prêts non-bancaires. Aujourd’hui, le marché de détail de la dette est estimé au Canada à environ 2 milliards de dollars (G$), comparativement à 200 M$ en 2010. Aux États-Unis, ce marché s’élève à 650 G$US, détenu surtout par les clients institutionnels.
« C’est une catégorie d’actifs en croissance, dont l’un des principaux moteurs a été le changement du paysage règlementaire des banques », dit Scott Colbourne, co-chef des placements chez Sprott Asset Management à Toronto. Comptant 26 ans d’ancienneté dans l’industrie, il s’est joint en 2010 à Sprott, où il fait partie de l’équipe qui supervise la gestion du Fonds de revenu alternatif (23 M$ d’actifs sous gestion). Le cogestionnaire est Ramesh Kashyap, vice-président principal du groupe du revenu alternatif.
« Dans de nombreux cas, les banques ont mis davantage l’accent sur ce qui paraît logique pour leurs bilans, et de nombreux emprunts ne sont plus acceptés », dit M. Colbourne. « Ce n’est pas nécessairement que les emprunteurs soient mauvais, mais d’un point de vue holistique, la banque n’a pas beaucoup de raisons d’effectuer la transaction. La nouvelle réglementation rend les choses plus difficiles pour les emprunteurs. »
Les nouvelles règlementations ayant forcé les emprunteurs à se tourner vers les organismes de prêts non-bancaires comprennent en particulier les consignes inter-administrations publiées en 2013 aux États-Unis et intitulées « Guidelines in Leveraged Lending » et la mise en place des consignes des Accords de Bâle III prévue pour 2018.
« Les emprunteurs n’obtiennent pas la garantie dont ils ont besoin et le levier financier auquel ils étaient habitués il y a dix ans. Et les banques prennent trop de temps pour finaliser un prêt, cela peut prendre des semaines, dit M. Colbourne. Les occasions présentées par la dette privée ont été générées par les décideurs. »
Sprott, qui est l’un des plus importants intervenants dans le segment de la dette privée au Canada, gère un actif de dette privée de près de 760 M$, sous forme de crédits garantis de premier rang. Lancé en août 2016, le Fonds de revenu alternatif Sprott qui est vendu par le biais d’un mémorandum plutôt que d’un prospectus, est destiné aux investisseurs qualifiés. « Le fonds est une solution clé en main pour les investisseurs qui exigent une approche diversifiée en matière de dette privée », dit M. Colbourne.
Il comprend quatre fonds sous-jacents : un tiers du fonds investit dans le Fonds de revenu Bridging Sprott, un tiers dans le fonds de Fiducie de crédit privé II Sprott, un sixième dans le Fonds opportunités de revenu de crédit Sprott et un sixième dans le Fonds d’obligations diversifiées Sprott.
Lancé en 2013, le Fonds de revenu Bridging Sprott investit dans un portefeuille de placements de prêts directs et d’affacturage dans la dette privée canadienne. Lancé en 2010 le fonds Fiducie de crédit privé II investit dans des prêts adossés à des actifs de compagnies canadiennes. Lancé en 2015, le Fonds opportunités de revenu de crédit Sprott investit dans des obligations de sociétés à courte durée.
Le Fonds d’obligations diversifiées Sprott, offert par prospectus, est un fonds mutuel à courte durée qui fournit une liquidité supérieure à l’ensemble du portefeuille. « La dette privée fournit aux investisseurs des rendements très attrayants, mais il ne faut pas compter sur une liquidité journalière », dit M. Colbourne. Les rachats de parts du Fonds de revenu alternatif Sprott sont autorisés mensuellement. Depuis son lancement à l’automne dernier, le fonds a affiché un rendement de 3,3 %, net de frais, au 30 avril.
Sprott et ses sous-conseillers appliquent un processus rigoureux pour s’assurer que les emprunteurs qualifiés remplissent leurs obligations de prêts. Entre les deux bassins de dettes privées, on compte environ 250 prêts de tailles variées. Jusqu’à présent, aucune dette ne s’est dégradée.
Sprott se concentre seulement sur les prêts appelés directs, qu’on appelle aussi prêts garantis de premier rang. « Ils se trouvent au sommet de la structure du capital, dit M. Colbourne. Et généralement, le ratio entre les garanties et le montant du prêt est de deux contre un. Un autre avantage de la dette privée est la hausse des rendements. Elle génère un meilleur rendement que celui d’un produit à revenu fixe traditionnel, environ 450 à 600 points de base de plus. »
Par ailleurs, les prêts ont un taux variable, ce qui signifie qu’ils suivent les taux d’intérêt à court terme. « Il n’y a pas de risque lié aux taux d’intérêt », dit M. Colbourne. De plus, le fonds permet aussi aux investisseurs de participer à une catégorie d’actifs qui n’est pas évaluée à la valeur du marché comme le sont les fonds du marché monétaire. « Puisque les contrats sont de nature exclusive, vous ne les trouverez jamais ailleurs. Nous exigeons aussi une documentation complète permettant de pouvoir renégocier le contrat si nécessaire. » Sur 100 emprunteurs potentiels, moins de cinq contrats sont conclus.
MM. Colbourne et Kashyap sont attentifs au fait que les banques centrales soient en phase de resserrement, mais ils sont optimistes par rapport à la solidité de la dette privée. « En tant qu’organisme de prêt, vous êtes avantagé par la hausse des taux d’intérêt. Mais cette catégorie d’actifs a été stable au fil des divers cycles. Les gens empruntent aux bons et aux mauvais moments », dit M. Colbourne, qui fait remarquer que les prêts sont structurés de manière à ce que Sprott puisse s’en défaire si les conditions deviennent extrêmement difficiles.
« L’objectif sous-jacent du fonds est de prêter aux compagnies qui offrent une bonne garantie, qui sont bien gérées et dont les affaires vont généralement bien. Donc vous pouvez investir, que les temps soient durs ou au beau fixe. »